Quand et comment les humains ont-ils commencé à traiter l'eau avant de la consommer ?
Question d'origine :
Bonjour,
Sait-on à partir de quand l'être humain a commencé à traiter l'eau pour la boire, que ce soit en la faisant bouillir ou via des méthodes plus industrielles ? Les hommes préhistoriques buvaient-ils l'eau directement à la source, étaient-ils malades ?
Merci.
Réponse du Guichet
Le manque de sources nous empêche de dater avec précision les débuts du traitement de l'eau pour la consommation des hommes et femmes préhistoriques. Il semblerait toutefois que la domestication du feu et la purification par ébullition se soient développées parallèlement. Suivent ensuite de nombreuses autres techniques de purification, souvent millénaires : désinfection solaire, filtre à charbon, ionisation ou encore coagulation.
Bonjour,
Sans qu'une réponse précise soit apportée sur les techniques employées par les hommes du néolithique pour le traitement de l'eau, cette précédente réponse du Guichet du Savoir (Que buvaient et comment s'hydrataient les hommes du néolithique ?), vous donnera de premiers éléments de réponse plus généraux sur sa consommation, son transport ou sa conservation. Mais attention, la réponse ne coule pas de source !
Cependant, ce rapport entre l'eau et les hommes préhistoriques est mal connu et n’a été que peu étudié par manque de sources et découvertes.
On peut néanmoins constater que la plupart des sites archéologiques majeurs de la période se trouvent à proximité d’un point d’eau. Nous pouvons citer en exemple la vallée de l’Awash en Éthiopie où fut découvert les fossiles de Lucy ou bien encore le site de Brassempouy dans les Landes où traverse le Luy de France et où a été retrouvé la plus ancienne représentation connue d’un visage humain (statuette nommée "dame de Brassempouy" ou "dame à la capuche").
Nous pouvons donc alors imaginer que les hommes du paléolithique buvaient l’eau des rivières, fleuves et cours d’eau qui étaient à proximité de leur campement. Toutefois, il est très dur d’estimer un critère de choix concernant sa consommation ainsi que sa quantité.Ces dernières années de recherche ont néanmoins démontré que les sites n’étaient pas obligatoirement à proximité d’une source d’eau d’où l’importance de la question du transport de l’eau et/ou de sa conservation relevée par les archéologues et historiens. En effet, des objets coniques composés d’os ont été retrouvés notamment sur le site de Brassempouy, on peut supposer qu’ils pouvaient servir comme récipient pour contenir de l'eau. De même, des « sacs » ou poches étanches ont pu être fabriqués à partir de peaux, vessies et autres viscères animales pour y contenir des liquides et graisses (voir cet article). Cette hypothèse est appuyée également par la découverte du feu et ses conséquences. En effet, l’attestation et la découverte de la présence de charbon et donc du feu a pu démontrer que les sociétés paléolithiques cuisaient leurs viandes et aliments, renforçant alors l’idée qu’ils savaient maîtriser en partie l’eau également pour la préparation de ceux-ci.
La plus ancienne méthode de désinfection de l'eau consistait à la faire bouillir avant de la consommer, éliminant ainsi les germes pathogènes à transmission hydrique. Les hommes et femmes préhistoriques ont très probablement utilisé cette technique dès la domestication du feu, sans pour autant comprendre les mécanismes physiques sous-jacents.
Le site LennTech dispose de nombreuses ressources sur l'histoire de l'eau. Il évoque ainsi la maîtrise de la méthode de désinfection solaire de l'eau et sa filtration à l'aide d'un charbon de bois dès 2000 ans av-J.C. Nos ancêtres auraient aussi recours à des pièces de cuivre qui, plongées dans l'eau, permettaient d'en traiter les impuretés et les éléments pathogènes. C'est ce qu'on appelle l’ionisation par le cuivre ou l'argent, une méthode aujourd'hui encore reconnue comme fiable pour purifier et désinfecter de l'eau.
Les Égyptiens auraient aussi utilisés de l'alun pour faire de la coagulation (Brève histoire des techniques de potabilisation de l'eau - 1ère partie sur la revue Eau, Industrie, Nuisances).
Regardez aussi du côté de la documentation disponible sur le site du Centre d'information sur l'eau.
Mais attention, nos critères contemporains en matière de qualité de l'eau ne doivent pas être apposés à nos prédécesseurs. Au Moyen-âge notamment, ce qui relevait d'une eau consommable n'entrerait dans aucun indice hygiénique aujourd'hui. Les habitudes et les gouts n'étaient pas les mêmes non plus. C'est ce que rapporte l'historien Jean-Pierre Leguay dans son ouvrage L'eau dans la ville au Moyen-âge (PUR, 2002), duquel nous retranscrivons ce passage éloquent qui permet de décentrer notre regard et éviter de tomber dans une logique misérabiliste (p.122) :
Quant à la qualité de l'eau consommée et recherchée, évitons de juger selon nos critères. On aura la surprise d'apprendre que, contrairement aux affirmations de savants du passé, l'eau de rivière non filtrée ou l'eau de pluie lavée par les toits et laissée croupir dans une citerne a pu être préférée par le commun des mortels à l'eau de source en mouvement ! En plein XIXème siècle, un chercheur nommé Parent-Duchâtel, constatant l'excellente santé affichée par les égoutiers, concluait fort doctement qu'ils étaient protégés par la bonne odeur et les vertus hygiéniques...des lieux qu'ils fréquentaient et de l'ordure qu'ils côtoyaient !
Voir également cette précédente réponse du Guichet du Savoir : Pourquoi buvait-on autant de vin au Moyen Age ?
Pour l'époque moderne, vous pouvez lire ce mémoire de Christèle Le Gulludec sur la découverte et la massification de l'utilisation du chlore pour la désinfection des eaux à destinée humaine (PDF, premier lien Google) avec comme cas d'étude le département de l'Isère (1995). Et sur l'histoire de l'Eau de Javel, voir la page dédiée sur le site officiel du produit.
Bonne journée,
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