Quels sont les bénéfices/les apports de la lecture ?
Question d'origine :
Quels sont les bénéfices/les apports de la lecture (quand on aime lire beaucoup de romans, est-ce que ça nous apporte de belles choses)?
Réponse du Guichet

Se projeter, imaginer, s'évader ... la liste est longue pour définir tout ce que la lecture peut apporter.
S’évader, ouvrir d’autres portes, plonger dans d’autres vies, trembler pour Julien Sorel, braver les interdits avec Emma Bovary, vivre au temps de Louis XV dans L’Echange des princesses … tels sont quelques-uns des aspects que prodigue la lecture.
Dans Le Journal du Cnrs, l’article "Pourquoi lit-on toujours ?" revient sur ce phénomène :
Succès après succès, débat après débat, la littérature n’en finit pas de prouver son potentiel inégalable pour nous raconter des histoires, nous plonger dans d’autres existences en nous confrontant à des choix, nous aider à construire notre récit personnel et accompagner les changements sociaux et politiques, tout en les influençant.
(…)
ces livres permettent d’opérer des réélaborations qui aident à échapper au traumatisme dans une société où l’instigation à se reconstruire et à saisir son propre destin est perpétuelle », analyse Alexandre Gefen.
(…) Mais plus largement, le récit plonge dans notre capacité à nous raconter des histoires.
(..)
Une fiction fondatrice peut jouer un rôle important dans la naissance d’une communauté, d’une nation ou d’un État, en tant que marque de sa nature profonde ou de ses désirs pour l’avenir.
La lecture est une clef de compréhension, un moyen pour découvrir et pour citer cette très belle formule de Philippe Garnier, la lecture peut être ressentie comme un "égarement immobile".
Nous nous sommes donc tournés du côté des auteurs et autrices pour savoir ce que leur apportait la lecture.
La lecture est une amitié. L’intégrale de ses préfaces de Proust aborde, entre autres, le plaisir, l’élévation …
Dans De la littérature, Umberto Eco évoque avec brio ses lectures et écrit que la littérature ne sert à rien ou plutôt qu’elle revêt une « série de fonctions » pour « la vie individuelle et la vie sociale ». Il note également qu’en contribuant à former la langue, la littérature crée une identité et une communauté et que :
Les œuvres littéraires nous invitent à la liberté de l’interprétation, parce qu’elles nous proposent un discours à niveaux de lecture multiples et nous placent face à l’ambiguïté et du langage de la vie (…) le monde est un livre « clos » qui ne permet qu’une seul lecture, car, s’il y a une loi qui gouverne la gravitation planétaire, soit elle est juste, soit elle est fausse ; en comparaison, l’univers d’un livre nous apparaît comme un monde ouvert.
La lecture donc comme des investissements passionnels individuels.
Alberto Manguel fait état lui aussi ses lectures dans Une histoire de la lecture. Nous retenons de son expérience que :
Au bout du compte, il se peut que l’histoire de la lecture soit l’histoire de chacun de ses lecteurs. Même son point de départ est nécessairement fortuit.
Pour Annie Ernaux il s’agit d’une recherche d’un « livre qui me bouscule ; m’apporte des pensées nouvelles (…) Je cherche et je trouve dans les romans contemporains des formes de vie qui me projettent dans l’avenir » ; elle parle d’une« avance sur la vie » :
lire sépare et relie. C’est d’abord une séparation concrète : la lecture suppose la rupture de toute communication verbale, elle isole de l’entourage. C’est aussi une séparation mentale : lire, c’est être téléporté dans un univers nouveau, qu’il soit purement imaginaire comme celui de Harry Potter, ou qu’à l’inverse, il réfère à la réalité, sociologique ou historique … lire, c’est être momentanément séparé de soi et laisser un être de fiction, ou le « je » de l’écrivain, occuper complètement notre espace intérieur, nous entraîner vers son destin, nous émouvoir. C’est accepter qu’une voix fasse effraction dans la conscience et se substitue à la nôtre, Longtemps je me suis couché de bonne heure … C’est accepter d’être dérangé, bousculé et, au final, transformé. Mais dans le même mouvement, lire rapproche des autres (…) lire ouvre la sensibilité à ce que vivent les gens (.. ;) Lire agrandit les capacité de compréhension du monde, de se diversité et sa complexité (..) Lire ramène à soi. Lire pour se lire.
Source : Pourquoi lire : 13 bonnes raisons (au moins)
Laure Murat dans Relire : Enquête sur une passion littéraire témoigne qu'il faut "Relire pour se retrouver et qu'il s'agit d'une "forme d’ajustement avec soi-même comme un horizon".
Et enfin, nous achèverons ces considérations par un Eloge du Mauvais lecteur comme l'a fait Maxime Decout pour qui il s'agit de "Lire une donnée personnelle", une interprétation où l’on peut lire « en projetant sur le texte ses pensées, voire en le déformant".
En espérant que vous aurez envie de découvrir ces très beaux témoignages.