Je souhaiterais avoir des précisions sur le titre "de France"
Question d'origine :
Bonjour!
Selon l'historien Andrew W. Lewis dans son ouvrage « Royal succession in Capetian France: studies on familial order and the state », l'expression « de France » représente un titre de la famille royale française, qui était transmis aux fils et aux filles du roi de France. Pouvez-vous me dire si, dans le cas où un membre des branches Bourbon ou Orléans dépose une demande de reconnaissance de ce titre auprès du Ministère de la Justice/Garde des Sceaux, est-il encore possible de procéder à cette reconnaissance ?
Merci beaucoup!
Réponse du Guichet

Nous doutons que la section du sceau de France accepte la reconnaissance du titre "de France" aux membres des dynasties Bourbon et Orléans car d'une part il était réservé aux enfants et petits-enfants d'un souverain régnant. Cette qualification se perdait à partir des arrières-petits-enfants. D'autre part, il ne s'agit pas d'un titre nobiliaire. Par conséquent, il ne semble pas devoir être vérifié par le garde des sceaux. Nous avons toutefois posé votre question à la DACS (Direction des affaires civiles et du sceau) et ne manquerons pas de vous faire part de son retour dès qu'il nous parviendra.
Bonjour,
Les enfants et petits-enfants du roi de France étaient appelés enfants de France et petits-enfants de France (fils ou filles de France, petits-fils ou petite-fille de France).
Cette transmission onomastique particulière a cessé lors de la monarchie de juillet en 1830. Louis-Philippe est le dernier roi à avoir régné en France, entre 1830 et 1848, avec le titre de « Roi constitutionnel des Français », rompant ainsi, par ce titre, avec les 68 "rois de France" qui l'ont précédé.
Vous l'avez dit, le titre ou statut "de France" n'était donné qu'aux enfants du souverain régnant. Or, d'une part il n'y a plus de roi en France et d'autre part, ce titre se perdait à partir des arrières-petits-enfants qui devenaient prince du sang. C'est pourquoi nous doutons que le garde des sceaux accepte de reconnaitre ce titre.
Voici quelques éléments d'information sur ce sujet :
Patronymes dans la famille royale de France
Le roi et la reine de France n'ont pas de patronyme. Les enfants de France (fils de France et filles de France, autrement dit les enfants du roi, mais aussi les enfants du dauphin, et même les enfants du fils aîné du dauphin) portent le patronyme « de France ». Cet usage est ancien car il remonte à la fin du XIIIe siècle. Le roi, la reine, le dauphin, la dauphine, ainsi que les enfants de France et les épouses des fils de France, signent de leur prénom seul, sans numéro ni surnom. C'est un privilège qui leur est réservé et qui marque leur prééminence au-dessus de tous les autres dynastes, qui doivent eux signer en ajoutant leur patronyme après leur prénom.
Les petits-enfants de France portent pour patronyme le nom de l'apanage qui a été conféré à leur père (ainsi, le Régent s'appelait Philippe d'Orléans et non Philippe de France). S'ils font souche, ce nom devient leur patronyme héréditaire, comme pour la famille d'Orléans. C'est ainsi que les princes du sang ont pour patronyme le nom de l'apanage du fils de France dont ils descendent. Toutefois, quand une branche de princes du sang accède au trône en devenant la branche aînée de la dynastie, elle prend alors le nom « de France ».
Lors de la Révolution française, le patronyme de la famille royale est « Capet ».
La chute de la monarchie en 1830 a mis fin à cette transmission onomastique particulière, et de nos jours les membres de la branche aînée (issue de Louis XIV) de la maison de France s'appellent « de Bourbon » (car ce nom a été adopté par leurs ancêtres communs, Charles Ier et son frère Philippe Ier, ducs de Parme) — à l'exception notable de la famille régnante du Luxembourg, qui porte le nom de Nassau, tandis que la branche cadette du roi des Français Louis-Philippe et de son père Philippe Égalité porte depuis 1662 le patronyme « d'Orléans » (ou d'Orléans et Bragance pour les descendants de Gaston d'Orléans, comte d'Eu).
source : Maison de France / Wikipedia
Au début du XIVe siècle, timidement, certains cadets, les plus modestes, sont dits de la famille de France, mais sans que cela soit systématique et automatique ni ne concerne les filles. La notion d’enfants de France comme celle de prince du sang restent mal assurées, tout comme celle de dynastie.[...] Après enfants et petits-enfants de France, il n’y a pas de statut pour les arrière-petits-enfants qui basculent dans le groupe des princes du sang, ce qui n’est pas sans susciter un sentiment de déclassement. Leur statut a été défini en 1576 sous Henri III, alors qu’ils étaient rares, afin de les mieux distinguer des cardinaux, des princes étrangers et des ducs et pairs. La loi salique qui frappe d’incapacité les filles impose en effet de ne pas négliger les branches collatérales. Les princes du sang descendent de rois par les mâles et par légitime mariage et sont aptes à succéder à la Couronne. Le monarque signe leur contrat de mariage et exerce un contrôle sur leurs alliances. [...]
En juin 1790, la noblesse est abolie en France avec ses titres, ses armoiries… et le citoyen est invité à ne porter « que le vrai nom de sa famille ». Ceci pour répondre à la proposition de Lepeletier de Saint Fargeau d’abandon des noms de terre pour revenir au patronyme. Aussi lorsque la monarchie tombe, Louis XVI est désigné sous le nom de Louis Capet, ce qui permet à la fois de le renvoyer à un sobriquet plutôt qu’à un nom de terre et de l’incorporer aussi dans la longue lignée des monarques. En 1793, les exhumations entendent déraciner l’inépuisable sang de France qui prétend incarner la France.
source :
Par ailleurs, Jean Foyer dans son article intitulé "Les querelles dynastiques aujourd'hui" explique :
La maison d’Orléans se dit Maison de France, ses membres s’appellent eux-mêmes « de France ». Dès lors qu’il n’y a plus de roi de France, il n’y a plus de Maison de France, car celle-là était la maison du roi régnant. Nous sommes bien en présence d’une fantasmagorie.
La Seconde République, dans l’un de ses premiers actes, abolit tous les titres de noblesse et la noblesse elle-même par un décret du 23 février 1848. Il fut même interdit de faire publiquement usage de ces titres. La Constitution de novembre 1848 devait, dans son article 10, reprendre et confirmer cette double abolition.
Mais Louis-Napoléon Bonaparte revint immédiatement sur cette abolition et abrogea le décret du 29 février 1848 par un décret du 24 janvier 1852. La noblesse se retrouvait donc dans l’état où elle était sous Louis-Philippe.La dernière évolution du droit des titres se fit sous la IIIème République. Mac-Mahon décida le 10 mai 1875 de ne plus créer de nouveaux titres nobiliaires. Seules les transmissions de titres continueraient de faire l’objet d’arrêtés officiels. Ceux-ci demeurent donc régis respectivement par le droit d’ancien régime ou par le décret du 1er mars 1808. C’est cet état de droit qui a perduré depuis lors, à travers la section du Sceau de France dont il faut dire quelques mots.
[...]
Situation particulière des maisons souveraines ayant régné sur la France.
Les membres des maisons souveraines ayant régné sur la France (Bourbon, Valois, Napoléon) disposent de la qualification de prince. Cette qualification constitue pour les intéressés, moins un titre, au sens du droit nobiliaire, qu’une qualité par laquelle se reconnaissent les membres des familles ayant régné sur la France. Ce ne sont pas des titres héréditaires décernés par un souverain régnant par lettres patentes, au contraire des quatre maréchaux d’Empire, auxquels Napoléon Ier a décerné le titre de Prince.
Distinctes des titres de noblesse, ces appellations portées par les anciennes familles régnantes sur la France ne sont pas soumises au même droit. Non héréditaires, elles n’ont pas à être vérifiées par le Garde des Sceaux. Elles sont à la discrétion de leur titulaire.
Pour les exercer, ce titulaire se fonde sur les règles anciennes, aujourd’hui abrogées, mais ayant valeur coutumière pour le chef de famille.
source : Le Sceau de France, titre nobiliaire et changement de nom / Académie des sciences morales et politiques - Institut de France
N'étant toutefois pas spécialistes du sujet, nous avons posé votre question à la DACS (Direction des affaires civiles et du sceau) et ne manquerons pas de vous faire part de son retour dès qu'il nous parviendra.
"La section du Sceau de France exerce actuellement les attributions dévolues à la chancellerie en matière de titres nobiliaires, de dotations et d'armoiries et prépare les décrets relatifs aux changements de nom et aux dispenses en vue de mariage. Il traite le contentieux relatif à ces actes individuels."
Bonne journée.
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