Que représentent les sculptures à l'intérieur de l'université Jean Moulin Lyon III ?
Question d'origine :
que représentent les sculptures à l'intérieur de l 'université Jean Moulin Lyon iii et visibles de l avenue des Frères Lumière ?
Réponse du Guichet

Les statues visibles depuis l'avenue des Frères Lumières sont des vestiges de la 8ème édition de la biennale hors normes qui a eu lieu à Lyon et dans la région Auvergne Rhône-Alpes en 2019. Elles sont l'oeuvre du plasticien T. Léo et représenteraient une réecriture du mythe d'Actéon dans la mythologie grecque. Une meute de chiens-loups avait aussi été installée sur les façades de ce campus de l'Université Jean Moulin Lyon III.
Bonjour,
La 8ème édition de la Biennale Hors Normes consacrée à l'art brut a eu lieu dans la métropole de Lyon et en Auvergne Rhône-Alpes pendant les mois de septembre et octobre 2019. Lors de chaque édition, la coutume veut que le travail d'artistes plasticiens soit aussi exposé dans des lieux atypiques et hétérogènes de la région, déracinant les œuvres des traditionnelles galeries d'art et des musées. C'est à ce titre que l'Université Jean Moulin Lyon III fut choisie pour accueillir sur le campus de l'ancienne manufacture des tabacs (dans le 8ème arrondissement) les installations plastiques des artistes T.Léo et Marco.
D'après nos recherches, tout porte à croire qu'il s'agit bien des vestiges de cette exposition que vous apercevez depuis l'avenue des Frères Lumière, où des silhouettes sorties d'outre-tombe déambulent le visage hagard sur les hauteurs de l'enceinte du campus. Ces âmes perdues seraient le fruit du travail de T. Léo, dessinateur, peintre et sculpteur installé en Touraine dont l'univers artistique est fortement inspiré par la mort et mythologie grecque. Vous pouvez lire un petit portrait de l'artiste dans cet article de la Nouvelle République, publié en 2019 : T.LEO, artiste surprenant.
Le site de l'Université Lyon III présentait en 2019 les statues qui allaient orner le campus de la manufacture, dont l’installation devait perdurer jusqu'en juillet 2020. On y découvre l'étendu du travail exposé pour la biennale, qui s'est aussi caractérisé par la pose de sculptures de chiens-loups sur la façade de l'établissement. Cette meute sauvage et ces hommes seraient une réécriture du mythe d'Actéon, ce chasseur transformé en cerf par Artémis et dévoré par ses propres chiens après que celle-ci l'a surpris en train de l'épier pendant qu'elle se baignait. Nous pouvons lire sur le site de l'Université :
A l'occasion de la 8e Biennale Hors Normes, franchissez les portes de la connaissance avec Actéon, accompagné de sa meute...
Chien-loup, gardien intemporel de la connaissance, appelle à oublier pour un temps son origine. Dans son apparence de mort en acte, tête sans visage pour référer à tout visage, laisse transparaître la nécessité du sauvage dans l’intellect pour s’épanouir. Le dédain de la raison pour le chien n’est qu’un refus de l’absurde, d’une condition d’animal mortel.
(...)
Après l’abandon du personnage d’Actéon, la meute devient personnage à part entière et à géométrie variable ; n’ayant plus de victime désignée elle semble nous prendre à partie, nous rappelant l'homme par ses traits, ses comportements...
Le chien peut aussi devenir, dans une certaine mesure, le bouc émissaire des méfaits de notre humanité comme s’il devait assumer la part de bestialité que l’on s’évertue à bannir de nos caractéristiques.
Il est aussi la sauvagerie domestiquée (le loup reste un peu en chaque chien), asservie par l’homme qui dresse aussi ses contemporains. Docilité parfois inquiétante ; il arrive que sa soumission déconcerte comme déconcerte notre obéissance dans certaines circonstances.
Les installations inscrivent l’animalité dans les espaces qu’elles occupent et prennent dans ceux-ci des connotations particulières. Au pied d’une cathédrale les canidés deviendraient ainsi une invasion de gargouilles ; sur les murs d’un musée des êtres fantomatiques se confondant avec la paroi les supportant... À l’Université, peut-être le symbole de cette bestialité domptée par l’acquisition des savoirs aussi bien qu’un rappel que notre sauvagerie n’est pas bien loin.
Source : 8BHN - Installations plastiques. T. Léo - Université Jean Moulin Lyon III.
Retrouvez également les photos des coulisses de l'installation des œuvres avec la participation de T. Léo, d'artistes et de cordistes suspendus dans cette galerie de photos : Plein feu sur les coulisses. Où l'on aperçoit aussi la pose des statues humaines sur l'enceinte de l’Université.
Vous retrouverez le récit de cette retransposition du mythe d’Actéon autour de l'Université Lyon III, sur le site Popsciences de l'Université de Lyon. Dans un jeu de questionnement entre l'Homme et la reconnaissance de son animalité, Actéon se retrouve confronté à sa propre bestialité laissée à la porte de l'Université, temple des savoirs, de la connaissance et de la domestication. Voici quelques extraits du mythe réinterprété et raconté par Mathieu Perchat, étudiant en Master 2 Philosophie – Esthétique & cultures visuelles (promotion 2018-19), qui expliquent ce que représentent les statues :
Bien des années passèrent, Actéon évitait avec un dégout mêlé d’une nouvelle frayeur les gardiens du lieu sans arriver à savoir pourquoi. Parfois, lorsque son regard s’égarait sur eux, un subreptice sentiment de nostalgie redonna vie à son esprit. Mais sa froide discipline vint très rapidement éteindre cette étincelle. Il se sentit près à sortir, suffisamment armé pour affronter le monde. Alors il entreprit d’ouvrir la seconde porte. Les pieds sur le seuil, la poignée toujours entre sa main, il vit avec surprise un regroupement de quatre hommes nus entourant une horloge sur un haut mur. Son regard ne pouvait transpercer cette muraille de pierre, alors il se concentra sur ce spectacle étrange.
Chaque homme se tenait immobile, le dos tourné vers l’instrument de mesure. Sur leurs corps mous, pleins, semblables à un tas de plâtre tombé d’une hauteur certaine maintenant sec, une tête figée regardait de manière hagarde l’horizon. La vivacité semblait avoir désertée ces corps, une telle stagnation régnait sur eux, que jamais il n’était possible de soupçonner le moindre mouvement, même de l’esprit pouvant animer pareils personnages. Leurs chairs, lasses de devoir lutter contre la force de la gravité se laissaient aller et coulaient lentement le long de leurs os. Seule l’aiguille de l’horloge donnait un repère du temps qui passe, et témoignait d’un changement lent mais certain. Son tic-tac mécanique donnait sens à leur existence.
Source : Popsciences - Exposition hors normes à la Manu | Collections & Patrimoine #4.
Apprenez en davantage sur le contenu de cette 8ème édition de la biennale hors norme en parcourant le catalogue d'exposition.
Nous n'avons en revanche, pas trouvé d'explication concernant le maintien de l’œuvre bien au-delà de la durée initialement prévue. Peut-être pourriez-vous poser la question directement aux équipes du campus de la manufacture des tabacs pour en savoir plus : contact.
Bonne journée,
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