Que signifie "La Juana" dans ce poème de Miguel Angel Asturias ?
Question d'origine :
Bonjour,
Je suis en train de lire le poème "Marimba jouée par les Indiens" écrit par Miguel Angel Asturias. Dans la version publiée dans les Poèmes Indiens, édition NRF Poésie Gallimard, au bas de la page 34, un vers mentionne "La Juana avec moi!". Je cherche à identifier à quoi fait référence cette Juana. Auriez-vous des pistes à me donner s'il vous plait ? Merci par avance.
Réponse du Guichet

Nous n'avons pas trouvé qui est Juana mais gardons espoir et attendons la réponse du service de Questions/Réponses espagnol Pregunte.
Bonjour,
Dans l'ouvrage que vous citez, Poèmes indiens : Messages indiens, Claireveillée de printemps, Le Grand diseur, il est indiqué que "Dans les deux poèmes indiens écrits entre 1933 et 1946, c’est en folkloriste que Miguel Angel Asturias abordait la vie indigène. Marimba jouée par les indiens est un tableau de genre auquel la virtuosité verbale donne une étonnante force suggestive."
On trouve une analyse de ce poème dans Poésies américaines : peuples, langues et mémoires :
... dans les deux poèmes suivants « Marimba joué par les Indiens » et « Técoun-Oumane », écrits entre 1933 et 1946, Asturias change de démarche. Il s’intéresse davantage au folklore et aux mythes qui constituent l’essence de la culture méso-américaine. Ainsi, on peut repérer dans le premier poème l’image de l’homme-foudre représentant la pierre qui contient le feu selon la mythologie Maya (p. 33). Tandis que dans le second poème, il évoque une figure majeure de la résistance indienne et commence à esquisser un appel à la révolte. En s’intéressant à un héros qui s’est battu contre l’envahisseur, il suggère en effet qu’une nouvelle sédition pourrait éclater car l’esprit du guerrier est toujours vivant, prêt à être appelé (p. 40). Outre ces références qui inscrivent ces deux poèmes dans une nouvelle démarche, il apporte également à ses écrits une tonalité mélodieuse qui rapproche la poésie de la musique. Il évoque ainsi cet art considéré comme primordial dans les civilisations Mayas. En effet, « dans toutes les villes, à côté des temples, il y avait de grands édifices où vivaient des maîtres qui enseignaient à chanter et à danser1. » La musique fait donc partie intégrante de la civilisation méso-américaine tout comme elle constituera les fondements de l’écriture asturienne. Dans le premier poème, il s’intéresse à un instrument de musique traditionnel pratiqué par les Indiens qui, par ses sons harmonieux, parvient à atteindre le cosmos. La métaphore des œufs pondus dans les astres, que nous retrouvons dans le refrain, renvoie à la puissance de la création qui, par sa beauté, parvient à éclore dans les Cieux. L’aspect naturel du langage employé caractérisé par le recours récurrent aux onomatopées ou encore aux multiples exclamations renvoie à cette spontanéité chère à Asturias (p. 31,32,33). Il ne s’agit pas de déguiser la parole mais bien de la restituer dans son authenticité. Elle est destinée à montrer l’émerveillement du poète comme s’il s’extasiait devant le pouvoir de la musique. La présence de l’épanalepse qui reprend comme dans une litanie les premiers vers [...] participe également à cet effet d’harmonie visé par Asturias (p. 31). Les nombreuses répétitions du son-roulement renforcent quant à elle la musicalité qui se dégage de ce poème consacré justement à la musique (p. 34). Car si la poésie se lit, elle doit surtout se faire entendre. C’est ainsi qu’elle s’incarne littéralement à travers la mélodie jouée par les instruments. Asturias évoque cette transmutation de la musique en chair humaine : elle se transforme littéralement en corps et elle est composée de chair et d’os laissant transparaître l’intention animiste du poète (p. 33). Cette harmonie sonore se retrouve dans « Técoun-Oumane ». On peut en effet y entendre les vibrations des tambours et les éléments qui grondent ce qui vient renforcer l’aspect mélodieux du texte (p. 37,38). Les actions guerrières sont toujours accompagnées de cette musique qui cadence les combats. C’est ainsi qu’on peut entendre les « bong » et « borong » résonner au cœur de l’affrontement ce qui permet à Asturias de livrer une véritable symphonie où l’ouïe et la vue se complètent pour proposer des poèmes sensitifs (p. 38). Avec « Marimba jouée par les Indiens » et « Técoun-Oumane », Asturias pénètre ainsi plus profondément dans les traditions et la culture indienne. On comprend donc avec ces deux poèmes qu’il affine son écriture, l’enrichit avec le folklore qui constitue l’essence de ses racines. Ces poèmes offrent aussi une ampleur différente (ils s’étendent tous deux sur cinq pages) ce qui témoigne d’une envie de développer plus précisément des thématiques qui lui sont chères mais aussi d’étayer cette partition musicale. Mais cet hommage au folklore ne constitue qu’un premier niveau de lecture. Car Asturias commence à dénoncer également les ravages causés par les colonisateurs. Dans « Marimba jouée par les indiens » il évoque ainsi les balles et les chevaux qui symbolisent le conquistador dont il faut se libérer (p. 35). La récurrence de la présence du sang insiste sur la barbarie exercée sur le peuple et nous indique qu’une révolution est en marche : celle qui consiste à dénoncer les travers de la société méso-américaine, dirigée par la violence et menacée par la destruction.
Nous avons consulté les documents suivants pour enquêter sur Juana :
- Miguel Angel Asturias : une étude avec un choix de poèmes / Claude Couffon
- Miguel Angel Asturias / Jean-Marie Saint-Lu, Dorita Nouhaud, Bernard Graciet, et al.
- Miguel Angel Asturias : l'écriture antérieure / Dorita Nouhaud
- Leyendas de Guatemala = Légendes du Guatemala / Miguel Angel Asturias qui dispose d'un lexique en fin d'ouvrage
... sans succès !
Nulle part il est précisé qui est "La Juana" invitée à suivre le narrateur.
S'agit-il de Juana Maria, la dernière survivante amérindienne de sa tribu, Juana la Loca, reine de Castille trahie par son époux volage, Juana Ramirez, La Avanzadora, une combattante et héroïne de la guerre d'indépendance du Venezuela, Juana de Vega, Juana Galán, Juana de la Concepción, ... des femmes engagées, fortes, symbolisant la culture hispanique ? "La Juana" n'est peut-être qu'une figure symbolique, représentative de la culture et des traditions indigènes, défendant son héritage culturel... ?
N'ayant pas trouvé de réponse claire à votre interrogation, nous avons posé cette question au service espagnol "Pregunte" proposé par les bibliothèques publiques espagnoles.
Nous vous tiendrons informé.e de sa réponse dès qu'elle nous parviendra.
Bonne journée.
Complément(s) de réponse

Bonjour,
Nous avons reçu une réponse du service de Questions/réponses, Pregunte. Elle provient plus précisément de la Bibliothèque Publique de l'État de Santa Cruz de Tenerife qui indique que le personnage de la Juana serait une référence poétique symbolique.
Nous la traduisons :
Dans le poème « Marimba jouée par les Indiens » de Miguel Ángel Asturias, la phrase « La Juana conmigo ! est une expression qui a généré diverses interprétations. Bien qu'il n'y ait pas de consensus définitif sur sa signification, il existe un consensus sur le fait qu'il s'agit d'une référence poétique symbolique. Voici quelques lectures possibles :
- La « Juana » dans ce contexte ne fait pas référence à une personne spécifique, mais est une personnification du marimba lui-même. Asturias utilise « Juana » pour donner vie et caractère au marimba, le décrivant comme une figure féminine qui participe à la création musicale et culturelle.
-"Juana avec moi !" Il a une connotation qui pourrait faire référence à un symbolisme culturel et social lié aux luttes des peuples autochtones et à leur résistance.
-« La Juana » pourrait être une figure qui représente la femme guatémaltèque, ou même la Terre Mère, dans un contexte de revendication et de résistance. Le poème est rempli d’images de la culture et de la souffrance indigènes, et « La Juana » est probablement une représentation symbolique de cette lutte.
-Il est également possible que la figure de « La Juana » ait une composante plus personnelle ou spécifique dans le contexte culturel et politique du Guatemala à l'époque où Asturias écrivait ses œuvres, durant la première moitié du XXe siècle. Certains critiques suggèrent que Jeanne pourrait être une allusion à un personnage spécifique du folklore ou de l'histoire sociale.
-Référence à une danse ou à une chanson traditionnelle : « La Juana » pourrait faire référence à un morceau de musique ou à une danse spécifique de la culture guatémaltèque, et l'expression serait une invitation à l'interpréter ensemble.
Nous espérons que vous avez trouvé ces informations utiles et vous souhaitons une bonne journée.
Bonne journée
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