Est-ce que les gens cherchent naturellement à se valoriser ?
Question d'origine :
Est-ce que les gens cherchent naturellement à se valoriser? Pourquoi? Est-ce que les gens ont différentes idées sur comment se valoriser? Pourquoi?
Réponse du Guichet

La valorisation de soi est nécessaire et diffère de la vantardise excessive, qui révèle le plus souvent un mal-être et un manque de confiance en soi. D'après certains psychologues, une bonne estime de soi repose sur une évaluation réaliste de ses qualités et de ses défauts. Christophe André souligne qu'elle libère du regard des autres et des injonctions sociales. À l'inverse, une quête effrénée d'approbation extérieure peut conduire à une perte d'individualité et à une vie dictée par les attentes d'autrui. Pour mieux vivre, il serait essentiel de se détacher le plus possible des jugements sociaux !
Bonjour,
Cet article publié sur Psychologies.com pourrait vous aider à bien faire la différence entre une valorisation de soi nécessaire et une vantardise excessive, jugée révélatrice d'une faille narcissique. Les personnes dans l'excès d'affirmation de soi (récits triomphants, étalages de connaissance, rabaissement d'autrui pour le dominer etc.) seraient en réalité souffrantes et exprimeraient un malêtre, un manque de confiance en elles-mêmes. Avec ce comportement, elles cherchent à gagner l'approbation et la reconnaissance d'autrui, à épater, mais trahissent en réalité de véritables carences selon Isabel Korolitski, psychologue, qui résume : "plus le besoin de montrer sa valeur est grand, moins la conviction d’en avoir est forte."
A contrario les personnes sûres de leurs qualités sont aussi conscientes de leurs défauts. Elles ne cherchent pas à les dissimuler mais se sentent assez fortes pour les exposer. Elles ne ressentent pas le besoin de faire l'étalage de leurs succès pour exister. Leur estime d'elles-mêmes repose sur une évaluation réaliste et consciente de leur valeur, là où le narcissisme découle souvent de processus inconscients liés à des carences affectives. Alors oui, ces personnes cherchent aussi à se mettre en avant, mais elles le font avec de toutes autres intentions. En usant de la séduction grâce à leurs comportements, elles séduisent non pas pour dominer mais pour entrer en contact avec autrui et communiquer :
Choisir ses mots, améliorer son apparence, peaufiner son style sont autant de manières de dire à l’autre qu’il est intéressant pour nous, puisque l’on fait des efforts pour capter son regard, arrêter son attention et créer une relation avec lui. « On voit bien que ça n’a rien à voir avec la posture écrasante du vantard ou la pseudo-authenticité de celui qui clame : “Je ne ferai pas d’effort, je suis comme je suis.” Dans les deux cas de figure, l’altérité est niée, il n’y a que soi et son besoin d’être reconnu dans sa valeur. » Autre différence de taille, l’autopromotion, verbale ou physique, est permanente : puisqu’elle est un mécanisme de défense, elle s’impose dès lors qu’il y a confrontation avec autrui. En revanche, parce que la mise en valeur de soi ne répond pas à un besoin mais est de l’ordre du désir, elle est ponctuelle, optionnelle. Elle dépend des circonstances, de l’humeur et des interlocuteurs.
Source : Se mettre en valeur n’est pas faire son autopromo - Psychologies.com
Dans l'ensemble, nous pouvons dire que chaque stratégie de valorisation de soi est une entreprise de reconnaissance sociale, celle-ci jouant un rôle clé dans notre estime personnelle. Les humains étant des êtres sociaux, les interactions sociales et les jugements externes influencent fortement la perception que les individus ont d'eux-mêmes. Quitte parfois à se perdre, à noyer sa personnalité pour plaire à autrui :
Si nous essayons toujours de plaire aux autres, cela signifie que notre bonheur et notre épanouissement dépendent de sources extérieures. Ainsi, nous continuons à vivre une vie que nous ne voulons pas particulièrement, mais qui correspond à ce que les autres attendent de nous. À long terme, quiconque a ce besoin d'approbation cesse de prendre des risques, de tracer sa propre voie et de suivre son instinct. En raison de la peur du rejet et de la peur d'être jugée, la personne finit par perdre son individualité et vivre une vie qui n'est pas la sienne. Ilene Strauss Cohen, psychothérapeute.
Source : Pourquoi ai-je besoin de l'approbation des autres ? - Psychologue.net
Pour avoir une bonne estime de soi, il faut "savoir s'oublier" selon les mots du célèbre psychiatre Christophe André. Il ne s'agit de pas de ne plus prêter attention à soi ou de ne plus mettre en avant ce que nous sommes, mais plutôt de ne plus prêter attention au regard des autres, de se libérer de la peur et des injonctions sociales. Parcourez cet entretien très instructif :
Parce que c'est l'une des caractéristiques de la bonne estime de soi : on est allégé, libéré de soi ! Les personnes capables de porter un regard stable et équilibré sur elles-mêmes, un regard lucide mais bienveillant sur leurs qualités, leurs défauts, sont libérées de la peur du regard des autres, des notions de performance sociale, des injonctions à la réussite. Leurs exigences de progrès personnel ne sont pas tyranniques. Toute tentative d'être parfait physiquement, intellectuellement, relationnellement est une forme de défense stressante par rapport aux peurs de ne pas être estimé par autrui. Dans la bonne estime de soi, il y a une liberté par rapport au jugement social : si on me critique, ça m'intéresse ! Soit la critique est juste, et je vais apprendre quelque chose ; soit elle est fausse, et je vais comprendre pourquoi on me voit ainsi. “Il nous est impossible de ne pas nous juger, c'est une fonction cérébrale qu'on ne peut éteindre !”
Source : L'estime de soi repose sur 3 piliers indispensables, d'après le psychiatre Christophe André - psychologies.com
Nous pouvons aussi vous proposer d'explorer d'autres pistes de réflexion avec ces articles scientifiques :
Bénédicte Zimmermann, « Entre valorisation de soi et mise à l’épreuve de soi : les dynamiques paradoxales de l’autonomie », HALSHS : archive ouverte en Sciences de l’Homme et de la Société, ID (2017)
Isabelle Queval, « L'industrialisation de l'hédonisme. Nouveaux cultes du corps : de la production de soi à la perfectibilité addictive », Psychotropes (2012)
Nous vous recommandons ces livres, disponibles dans les collections de la BmL :
S'estimer et s'oublier : Abécédaire de l'estime de soi et de tout le reste / Christophe André (Odile Jacob, 2024) : "Le psychiatre poursuit son exploration de l'estime de soi, une dimension psychologique capitale pour mieux vivre, en développant et en affinant la compréhension de cette notion."
L'estime de soi : s'aimer pour mieux vivre avec les autres / Christophe André, François Lelord (Odile, Jacob, 2021) : "S'aimer soi-même, avoir confiance en soi, croire en soi sont autant de facettes d'une dimension fondamentale de la personnalité. Bien des difficultés psychologiques sont rencontrées dans la vie quotidienne, comme l'incapacité de communiquer ou de se sentir bien dans sa peau qui peuvent expliquer le manque de confiance en soi. Des conseils pratiques et des tests sont proposés."
Confiance & estime de soi / Fabien Lafay (L'Etudiant, 2020) : "Un guide à destination des lycéens et des étudiants pour construire la confiance personnelle en dépit des difficultés de l'adolescence et du stress généré par les études. Il fournit des conseils, des témoignages, des exercices et des astuces pour contrer le mal-être et apprendre à s'affirmer".
De la reconnaissance [Revue] : don, identité et estime de soi (La Découverte, 2004) : "Depuis deux décennies, on assiste à un changement de nature du conflit social. Désormais, le problème social relève plus du thème de l'identité et moins de celui des inégalités sociales. En Allemagne, aux États-Unis comme en Grande-Bretagne, la philosophie morale et politique s'interroge, montrant l'importance du débat sur l'identité comme sur celui de la reconnaissance.".
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