Question d'origine :
Quelle est la date à laquelle Robespierre a été accusateur public
Réponse du Guichet

Maximilien Robespierre a été élu accusateur public du tribunal criminel de Paris le 10 juin 1791 avant de démissionner le 15 avril 1792 sans n'avoir jamais exercé cette fonction. Il aurait remis sa démission à la veille de la première session du tribunal.
Bonjour,
Maximilien Robespierre (1758 - 1794) a été élu accusateur public du tribunal criminel du département de Paris le 10 juin 1791 et en a démissionné le 15 avril 1792, à la veille de sa première session alors que celui-ci n'avait pas encore commencé à exercer. Entre ces deux dates, de nombreux événements ont bouleversé le cours de la Révolution française et la destinée de Robespierre. Cette désertion aurait été perçue comme une lâcheté et une manigance en faveur de la contre-révolution par ses contemporains. Nous trouvons les explications nécessaires dans la biographie de Robespierre par Jean Massin, rééditée en 2017 aux éditions Agone :
Ce qui est à noter aussi, c'est que peu de jours après son discours contre la peine de mort, le 10 juin, Robespierre est élu à une forte majorité, par l'assemblée des électeurs parisiens, accusateur public du tribunal criminel de Paris en voie d'organisation. Son principal concurrent était André, député de droite. Duport avait été élu la veille président de ce tribunal ; pour n'avoir pas à collaborer avec Robespierre, il préféra démissionner et fut remplacé par Pétion.
Source : Robespierre de Jean Massin (réédition 2017, p. 96)
Et plus loin :
Un geste de Robespierre permit à ses ennemis de redoubler leurs clameurs. On se souvient qu'il avait été élu en juin 1791, accusateur public auprès du tribunal criminel de Paris. Ce tribunal avait mis près d'un an à s'organiser ; il allait commencer à fonctionner, lorsque Robespierre donna sa démission d'accusateur public le 15 avril 1792, à la veille de l'ouverture de la session. Les raisons de cette démission étaient faciles à comprendre : Robespierre avait accepté ce poste à la veille de la fuite à Varennes, à un moment où il espérait pouvoir se retirer plus ou moins de la vie politique après l'expiration de son mandat de député ; mais les mois qui venaient de s'écouler lui avaient amplement prouvé quelle tâche politique l'attendait encore.
Il était donc tout à fait normal qu'il se libère d'une tâche astreignante (et peut-être vaine dans les conditions où fonctionnait le régime) pour se rendre entièrement disponible en vue des événements qu'il pressentait. Mais son acte était commenté comme une lâcheté, une désertion. D'autant plus que le Feuillant Duport-Dutertre venait d'être élu pour le remplacer au poste d'accusateur public. Aussitôt la cabale s'emparar de l'affaire : l'Inorruptible était définitivement vendu à la contre-révolution.
Source : Robespierre de Jean Massin (réédition 2017, p. 168 - 169)
Les détails de l'éléction de Robespierre à cette fonction en juin 1791 sont partagés en note de bas de page numéro 2 p. 474 dans Histoire de Robespierre. D'après des papiers de famille, les sources originales et des documents entièrement inédits (numérisé sur Google Livres).
Nous retrouvons un discours d'intention et de formalisation de l'exercice d'un procureur par Robespierre (février 1792) sur internet et une analyse juridique commentée de celui-ci : Un discours d'intallation au tribunal criminel de Paris.
L'historien Gérard Walter, cité en note de bas de page Wikipédia sur la page consacrée à Robespierre, donne la date du 14 avril pour la demission, et les explications qui suivent : "Robespierre dut se rendre à l’évidence que, même si les formes avaient changé, l’esprit de l’ancienne justice persistait. Le , il préféra démissionner du poste d'accusateur public, ne voulant pas être compromis par les erreurs qu’il pressentait devoir se produire". (Gérard Walter, Maximilien de Robespierre, Paris, Éditions Gallimard, coll. « NRF biographies », , 779 p.)
Pour éviter toute confusion, nous tenons à rappeler que Robespierre, bien que membre régulier du Comité de Saut Public, n’a jamais été accusateur public au sein du Tribunal révolutionnaire, ni dans aucune autre institution judiciaire révolutionnaire. Le poste d’accusateur public du Tribunal révolutionnaire, créé par la Convention en mars 1793, a d’abord été proposé à Louis-Joseph Faure, qui a refusé et c’est Antoine Fouquier-Tinville qui a ensuite occupé cette fonction, avec toute la légende noire qui l'accompagne, avant sa mort par guillotine en 1795. (Dictionnaire historique de la révolution française, PUF, 2004).
Voici enfin un acte d'accusation du tribunal criminel de Paris, numérisé sur Gallica.
Pour aller plus loin dans nos collections :
Robespierre : la fabrication d'un monstre / Jean-Clément Martin (Perrin, 2018)
Nouvelle histoire de la Révolution / Jean-Clément Martin (Perrin, 2012)
Les tribunaux criminels sous la Révolution et l'Empire : 1792-1811 / Robert Allen ; [trad. de l'anglais par James Steven Bryant] (PUR, 2012)
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