Quelle est la différence entre les magicien.es et les sorcier.es ?
Question d'origine :
Bonjour,
J’espère que vous allez bien. Je me demandais s’il existe une différence entre les magicien.es et les sorcier.es. merci de combler mes lacunes !
Réponse du Guichet

Dans l'imagerie populaire, le magicien, homme érudit, lettré, œuvre pour le bien et le sorcier, d'un milieu plus populaire, pour le mal.
Bonjour,
D'après le site de l'exposition Fantasy de la BNF : "Le magicien est censé être neutre. Il est différent du sorcier, souvent méchant."
Le magazine Ca m'intéresse s'est justement intéressé à cette question et précise cette idée d'opposition entre le gentil magicien face au méchant sorcier :
Il est fréquent dans les histoires de fantasy, dans les jeux vidéo ou encore dans les jeux de rôle, de croiser des sorciers et des magiciens. S'il est admis que ces personnages ont tous un lien avec la magie, cela est en réalité leur seul point commun. Tous savent lancer des sorts, et utilisent des puissances magiques à différentes fins. Néanmoins, ils possèdent leurs caractéristiques propres. Au fil des siècles, les deux types de personnages ont d'ailleurs gagné ces éléments caractéristiques. Par le passé, notamment dans les périodes les plus sombres de l'Histoire comme pendant l'Inquisition, aucune distinction n'était faite entre les adeptes de la magie, que ce soit des sorcières, des magiciens… [...]
Qu’est-ce que la sorcellerie ?
La sorcellerie désigne généralement une pratique qui sollicite les moyens naturels et surnaturels pour aboutir à une action mystérieuse. C’est d’ailleurs ce caractère mystique qui fait de la sorcellerie un mauvais élève dans la sphère religieuse. Elle est d’ailleurs considérée comme vicieuse, mystique et relative au mal.
Le magicien : un adepte de la magie blanche qui maîtrise les forces qu'il invoque
Quel que soit l'élément maîtrisé, le magicien est partisan de la magie blanche. Cela signifie qu'il utilise ses pouvoirs à des fins positives, préventives… Généralement de nature solitaire, il vit reclus, et peut posséder d'autres domaines comme l'astronomie ou l'herboristerie. Mais s'il est sollicité, il vient toujours en aide aux autres. [...]
À la différence du magicien, le sorcier est un adepte de la magie noire. Il peut avoir conclu un pacte avec le Diable ou une entité maléfique en vue d'acquérir ses pouvoirs. Ses intentions sont souvent mauvaises, et il utilise la magie de manière égoïste pour arriver à ses fins. Pendant longtemps, il a été associé à l'occulte, l'interdit. De fait, il est souvent considéré comme mauvais.
Néanmoins, ce trait de caractère a été remis en cause dans les descriptions plus modernes du sorcier.
source : En quoi les sorciers diffèrent-ils des magiciens ?
Cette dichotomie entre magie blanche et magie noire apparait dans de nombreuses sociétés. C'est ce qu'indique Jean-François Dortier dans un dossier spécial du magazine Sciences humaines (n°60 - septembre 2020) : Dix questions (plus une) sur la magie et la sorcellerie :
Le mot « magie » peut rassembler une multitude de personnages différents : appartenant au passé (les druides) ou au présent (les marabouts africains), réels (les chamanes) ou imaginaires (les fées). Leur point commun ? Tous détiennent des pouvoirs extraordinaires : faire des présages (les astrologues et les voyants), transformer la matière (le plomb en or pour les alchimistes, la citrouille en carrosse pour les fées), guérir, protéger et réaliser nos vœux le plus chers ou, au contraire, jeter des mauvais sorts. Ces pouvoirs magiques proviennent d’un contact privilégié avec des forces ou des esprits invisibles. [...]
3- Magie et sorcellerie : Quelle différence ?
La distinction entre la magie et la sorcellerie ou « magie blanche » et « magie noire », l’une étant bénéfique et l’autre maléfique, est courante dans beaucoup de sociétés. Les expressions « magie blanche » et « magie noire » ont été introduites en Europe au XIXe siècle, mais on les retrouve déjà sous d’autres noms dans d’autres sociétés. Selon l’anthropologue Adolphus Elkin, les Aborigènes d’Australie font la distinction entre le « medecine man », sorte de chamane qui use de ses pouvoirs pour guérir et le « sorcier » qui jette des mauvais sorts, provoque des maladies et sème la mort. A. Elkin a consacré un livre aux chamanes aborigènes. Chaque clan a son chamane et on fait appel à lui en diverses circonstances : pour soigner les maladies (qui résistent aux remèdes habituels que chaque famille connaît), appeler la pluie ou favoriser la chasse. Ces « hommes de haut degré » utilisent donc leur pouvoir pour le bien d’autrui.
Quand il a cherché à rencontrer des sorciers et des jeteurs de sorts, A. Elkin admet n’en avoir jamais trouvés. Les sorciers sont supposés exister, mais toujours dans le clan ennemi. Ce qui suggère que la sorcellerie relèverait d’une accusation plutôt que d’une pratique réelle.
On observe le même phénomène durant la chasse aux sorcières qui eut lieu en Europe du XVIe au XVIIe siècle : ce furent d’abord des hérétiques puis des femmes isolées, des notables qui étaient accusés des pires abjections : jeter des maléfices, avoir pactisé avec le diable, se livrer à des rituels sataniques. Mais ces aveux ont été extirpés sous la torture. Encore aujourd’hui en Afrique, personne ne se présente comme sorcier et n’affirme pratiquer la « magie noire », alors que les devins, guérisseurs et marabouts ont pignon sur rue. La sorcellerie est donc un fantasme. Elle procède plus de la rumeur et de l’accusation que de la réalité.
Éric de Rosny, prêtre jésuite et ethnologue, qui fut initié comme nganga (guérisseur, féticheur) au Cameroun raconte que les commerçants prospères de Douala étaient accusés de sorcellerie : leur réussite s’expliquait par le fait qu’ils s’emparaient en secret de l’âme de leurs victimes pour les exploiter.
Quelques témoignages de « magie noire » et de sorcellerie existent, mais ils sont rares. Ainsi, les pharaons usaient de pratiques magiques pour éliminer symboliquement leurs ennemis avant une bataille. En Grèce antique, on utilisait parfois des tablettes (dites tablettes de défixion) avec des inscriptions destinées à nuire à ses adversaires avant un procès.
Lire aussi : Magie et sorcellerie : quelle différence ?
Cette distinction n'a pas toujours eu cours. Les frontières sont plutôt poreuses entre ces deux personnages et varient selon les époques et contextes culturels. Comme il a été dit plus haut "Par le passé, notamment dans les périodes les plus sombres de l'Histoire comme pendant l'Inquisition, aucune distinction n'était faite entre les adeptes de la magie, que ce soit des sorcières, des magiciens… " Au Moyen-Âge, les deux notions sont peu distinctes. Le magicien peut être aussi qualifié de nigromancien ou d'invocateur de démons. De nos jours, dans la littérature jeunesse, Harry Potter, bien que qualifié de sorcier, œuvre pour le bien.
Une autre différence entre les deux personnages émerge toutefois. Dans la culture populaire, le magicien apparaît supérieur au sorcier : homme de sciences, lettré et urbain, il se distingue du sorcier issu d'un milieu populaire, rural et initié oralement par des proches :
I. Sorcellerie et Magie
Il y a d’abord une discrimination à opérer entre les notions de Magie et de Sorcellerie. La Magie est l’Art de commander aux forces du Mal. La Sorcellerie celui d’essayer de commander les mêmes forces. Le Magicien est un initié aux grands mystères ; le Sorcier ne connaît que les petits mystères. Le Magicien est un Maître. Le Sorcier est un apprenti qui souvent déchaîne – comme on le sait – les forces qu’il ne connaît que peu et dont il n’est plus ensuite le maître. Il y a connaissance réelle des formules chez l’un, vulgarisation chez l’autre. Il y a plus. À partir du Moyen Âge, le Magicien devient citadin ; le Sorcier est un villageois. Le Magicien se double souvent d’un adepte d’une hérésie nouvelle. Le Sorcier, par ses pratiques, perpétue la tradition des anciennes religions mortes : cultes druidiques ou païens. Le Magicien est en quelque sorte un homme de science. Le Sorcier est un attardé social. Le Magicien ne risque – aux yeux des croyants – que son âme car il est le protégé des grands à la cour desquels il vit et qui le consultent. Le Sorcier risque son âme et sa vie, car il n’est qu’un paysan sur lequel viennent s’accumuler les haines et les jalousies de ses frères de misère. Au XVIIe siècle, en Normandie, les paysans feront une distinction intéressante entre « Grand » et « Petit Sorcier », le premier terme désignant le Magicien, le second le berger guérisseur et envoûteur. Il est évident que dans la mentalité paysanne le terme de « Magicien » n’a jamais été employé avec son sens plein.
source : La sorcellerie / Jean Palou
Lire aussi à ce propos : Entre science et nigromance: Astrologie, divination et magie dans l’Occident médiéval (XIIe-XVe siècle) / Jean-Patrice Boudet - 2019
Quelques livres pour aller plus loin :
La sorcellerie / Lionel Obadia
Dictionnaire de la France mystérieuse : croyances populaires, superstitions, sorcellerie, rites magiques / Marie-Charlotte Delmas
Histoire culturelle de la France. 01 [Livre] : Le Moyen-Age / Michel Sot, Jean-Patrice Boudet, Anita Guerreau-Jalabert ; sous la dir. de Jean-Pierre Rioux et Jean-François Sirinelli
En espérant que cette réponse vous trouve également en bonne santé, nous vous souhaitons une excellente journée.