Auriez-vous des informations sur Prince Radziwill et Léontine, sa fille ?
Question d'origine :
Rebonjour
Merci beaucoup pour votre travail, auriez-vous des information sur Prince Radziwill et Léontine, sa fille
Merci beaucoup
Belle journée
Réponse du Guichet

Des informations sur le Prince Léon Jérôme Radziwill et Léontine Marie Saint-Hilaire Grisi
Bonjour,
Vous cherchez des informations sur Léon Jérôme RADZIWILL, ainsi que sur Léontine Marie Saint-Hilaire. De nombreux sites internet, ainsi que des sources littéraires, mentionnent le lien filial entre Léontine, le prince Léon Radziwill et la danseuse Carlotta Grisi. Voici les informations que nous avons pu trouver par l’analyse des différents actes consultés (état civil, archives judiciaires et successorales).
Concernant le prince Léon Jérôme RADZIWILL :
Vous trouverez son acte de décès en pièce-jointe. Nous y apprenons qu’il est né en Pologne en 1808, et qu’il a eu une carrière militaire auprès de l’Empereur de Russie. Né dans une famille princière polonaise, fils de Louis, prince Radziwill, et de son épouse dont le nom est Wodzynska. Il décède en son domicile parisien, au 6 rond-point des Champs Élysées, le 8 janvier 1885, à l’âge de 76 ans. Son acte de décès est cosigné par Antoine prince Radziwill, son neveu, Général auprès de l’Empereur d’Allemagne, roi de Prusse.
Léon Jérôme Radziwill s’est marié en 1833 avec Sophie Ourosoff (Urusova), dont il est séparé mais non divorcé au moment du décès, chacun ayant son propre domicile à Paris.
Un faire-part de décès (accessible en pièce-jointe) nous donne ses titres et décorations :
- Général aide de camp de Sa Majesté l’Empereur de toutes les Russies
- Chevalier de la Légion d’Honneur
- Grand-croix de l’ordre de Saint Alexandre Newski
- Officier de la Croix de Saint Georges
- Grand-croix des Ordres de l’Aigle rouge de Prusse et de la couronne de fer d’Autriche, etc.
De nombreuses sources mentionnent sa relation avec Carlotta GRISI, en particulier la Correspondance Générale de Théophile Gautier, dont Carlotta était la belle-sœur (et sans doute plus d’après ces mêmes sources…). Il apparait que le Prince Radziwill et Carlotta Grisi ont eu une relation suivie, entre la Russie et la France. Carlotta Grisi était danseuse de ballet, dans ce cadre professionnel elle a effectué des tournées notamment en Russie…
Nous avons accédé aux tables de successions et absences parisiennes, et retrouvé celle mentionnant la succession de Léon Jérôme Radziwill. Cette recherche ayant pour but de vérifier si Léontine Saint-Hilaire, que le Prince n’a jamais reconnue devant la loi, pouvait apparaître dans sa succession, et ainsi « exister » officiellement en tant qu’héritière… Or il est bien fait mention d’un testament dans sa succession. Malheureusement seul le registre récapitulatif est accessible en ligne : sa succession a été enregistrée par le 7ème bureau parisien, le 4 juillet 1885, numéro 869. Nous mettons à votre disposition en pièce jointe la page concernée. Si vous souhaitez aller plus loin et accéder à l’acte successoral, « Les informations permettant de poursuivre les recherches dans les registres originaux de déclarations de succession sont consultables en salle de lecture uniquement » (source Archives de Paris).
Concernant Léontine Marie SAINT-HILAIRE :
Léontine Marie Saint-Hilaire naît à Genève le vendredi 25 mai 1855. Elle est selon son acte de naissance la « fille naturelle de Thérèse Saint-Hilaire, rentière, âgée de vingt-six ans, domiciliée à Paris, en visite à Genève, fille de Joseph Saint-Hilaire et de Françoise Ferari sa femme. » Une mention marginale sur l’acte nous apprend qu’elle a été adoptée à l’âge adulte par Carlotta Grisi « selon jugement du Tribunal civil de la Seine du vingt-sept mai mil huit cent quatre-vingt-un ». Vous trouverez ces deux actes (naissance et adoption) en pièces-jointes.
Léontine a dix-neuf ans quand elle épouse à Paris en mars 1875 le peintre Auguste Émile Pinchart. L’acte de mariage mentionne « l’absence sans nouvelles » de la mère Thérèse Saint-Hilaire. Léontine est avant son mariage domiciliée chez son tuteur ad hoc Émile Bergerat, « présent et consentant » à l’union. Cet homme de lettres est marié à l’une des filles de Théophile Gautier et Ernesta Grisi (sœur de Carlotta Grisi). Émile Bergerat est également un ami du marié Auguste Pinchart…Le couple aura plusieurs enfants : Georges Émile né en mars 1876 à Paris, Léon né en 1877 à Chantilly, Paule née en 1880 et Marthe née en 1892 à Genève.
L’acte de décès de l’une des filles de Léontine, Marthe Marie Ida Pinchart (enregistré à Paris 14ème le 12 décembre 1971 et disponible en pièce-jointe) signale qu’elle est la fille d’Auguste Pinchart et de « Léontine Marie Saint-Hilaire dite Ernestine Grisi ». Or la correspondance de Théophile Gautier, qui évoque très souvent Léontine, la dit surnommée Ernestine. Si nous pouvons voir dans son premier prénom Léontine un lien symbolique avec le Prince Léon Radziwill, ce surnom Ernestine est plus énigmatique. Ernesta étant non sa mère mais sa tante, sœur de Carlotta Grisi et mère des filles de Théophile Gautier. C’est une note en fin du tome 9 de la Correspondance générale qui nous renseigne sur le port de ce surnom : « sa famille l’appelle Ernestine à partir du début d’août 1866 : lors de sa confirmation par l’Évêque de Genève, sa marraine a souhaité ce changement de prénom (p 559 du volume 9) ».
Des arbres généalogiques réalisés sur des sites dédiés (Généanet et Filae) nous indiquent que Léontine décède en 1918. Un arbre plus précis (construit par l’internaute Guillaume Pinchart, sans doute un descendant direct de Léontine Saint-Hilaire), évoque un décès survenu le 17 mars 1918 en Tunisie. De même, les enfants se marient en Tunisie, la famille s’y étant sans doute installée. Son mari Auguste Émile y décèdera également en 1920…ces informations n’ont pu être vérifiées avec des actes officiels, mais elles paraissent toutes converger.
Si les actes ne font pas apparaître les liens de sang entre Léontine Marie St-Hilaire, Carlotta Grisi et le prince Léon Jérôme Radziwill, les sources littéraires, elles, sont assez claires. Comme évoqué plus haut, ces personnes sont liées à Théophile Gautier. Les courriers de ce dernier, mis en forme et commentés par Claudine Lacoste-Veysseyre (Correspondance générale 1818 à 1872 ) sont extrêmement nombreux et précis. Des courriers échangés avec sa compagne Ernesta Grisi, ainsi que ceux en direction de Carlotta, montrent très clairement les liens familiaux de Carlotta et sa fille Léontine. L’enfant vit avec elle à Saint Jean, à côté de Genève. (La bibliothèque de Genève met en ligne une photo de cette bâtisse prise par Carlotta elle-même). Elles y vivent avec la petite fille de Carlotta, Rose Caroline Janin (fille de Marie Julie Perrot, que Carlotta a eue avec le maître de ballet Jules Perrot).
Voici un extrait des notes du tome 9 de cette correspondance : « Carlotta s’installe définitivement à Saint-Jean, où elle regroupe tous ceux qui composeront la « colonie ». Et d’abord elle fait face à deux disparitions : celle de « Mamina », qui meurt le 27 octobre 1862 ; et celle, peut-être moins regrettée, mais aux conséquences lourdes, du Prince Radziwill, qui a perdu son éminente position avec la mort de Nicolas 1er (3 mars 1855) et une partie de son immense fortune avec l’abolition du servage (19 février 1861). A partir de 1865, il ne paraîtra plus à Saint-Jean, et ne maintiendra avec Carlotta qu’une relation épistolaire. A sa fille Léontine qui est à Saint-Jean depuis au plus tard août 1861, elle fait connaître la famille Gautier qui y séjourne pendant le voyage du père en Russie. Elle recrute en 1864 une gouvernante dite « Fofo » et accueille sa petite fille Rose Perrot, fille de Marie-Julie Perrot, qu’elle avait eue de Jules Perrot lors de leur relation conjugale, et que seul le père avait reconnue. »
Vous noterez ici que cette dernière précision est fausse. Vous avez eu accès, lors de la précédente réponse du Guichet du savoir, à l’acte de naissance de Marie-Julie Perrot (page16/51) : ses parents ne sont pas mariés, et les deux reconnaissent l’enfant. C’est un peu le problème des sources secondaires et commentaires, qui peuvent comporter des erreurs…
Pour conclure, cette filiation n’a pas été inscrite dans les actes. Pourquoi les parents de Léontine n’ont-ils pu ou voulu reconnaître cette enfant dès sa naissance ? Nous n'avons aucune information sur ce sujet, juste une hypothèse : le Prince Radziwill est marié, et n’a pas d’enfant avec son épouse officielle. Les normes morales de l’époque sont dures en terme d’adultère, et l’enfant qui naît d’une telle union peut être mal considéré… Ce qui est étonnant également, c’est que sa mère, Carlotta Grisi, a déjà eu une enfant hors mariage qu’elle n’a pourtant pas hésité à reconnaître à la naissance… Alors pourquoi créer une mère qui n’est pas la bonne ? Et pourquoi reconnaître sa fille alors que celle-ci est déjà adulte et mariée, sinon pour des raisons uniquement successorales ? Nous n'en savons pas plus...
Pour aller plus loin, nous vous recommandons vivement la lecture de la Correspondance de Théophile Gautier… et vous souhaitons un bon été !
Pièces jointes






