Le MSA (Mean species abondance) de la France a-t-il été mesuré en 2020 ?
Question d'origine :
Bonjour,
sur l'édition numérique de "La France face aux neuf limites planétaires" á la page sur l'"érosion de la biodiversité", pourriez-vous m'aider á comprendre si la MSA (means species abondance) française à été mesurée entièrement en 2020 ou a nécessité une mesure préalable (et si tel était le cas, de quand serait-elle)?
Et sauriez-vous s'il serait relativement correct de traduire cette perte d'abondance des espèces de 0,36 par une perte de 64% de la biodiversité ou si ce serait faire un raccourci fallacieux, s'il vous plaît?
Réponse du Guichet

Les espèces, un indicateur clé de l’empreinte biodiversité
Les mesures de l’empreinte biodiversité se concentrent sur la diversité des espèces, car elles sont plus faciles à observer et à recenser que les gènes ou les écosystèmes. On peut suivre leur évolution avec des indicateurs comme l’abondance des populations, le taux d’extinction et les changements de zones de présence. Certaines espèces jouent même un rôle crucial dans le maintien de l’équilibre écologique ; leur disparition peut entraîner des déséquilibres majeurs.
Le MSA (mean species abundance ou abondance moyenne des espèces) est un des indicateurs importants utilisés pour évaluer l’impact des activités humaines sur la biodiversité et apporter une vision claire des changements qui se produisent. Il est utilisé à la fois pour mesurer directement l'état d'un écosystème et définir les pressions qui y sont exercées. Il permet donc d’exprimer l’abondance relative d’une espèce dans un écosystème par rapport à son abondance dans un écosystème vierge non perturbé et ainsi quantifier de manière concise la santé des écosystèmes et la richesse en espèces d'une région.
1. La MSA de la France en 2020 : mesure ponctuelle ou basée sur des données antérieures ?
Le chiffre donné pour la métropole française (0,36) dans le rapport La France face aux neuf limites planétaires n’est pas une mesure issue d’un unique inventaire de terrain en 2020, mais plutôt le résultat d’une modélisation intégrant des données de pressions humaines passées et présentes, appliquées au modèle scientifique GLOBIO. Ce modèle se base :
- sur une méta-analyse de centaines d’articles scientifiques académiques, établissant des relations quantitatives entre le niveau de pression (urbanisation, routes, fragmentation, dépôts d’azote, changement climatique…) et la réponse de la biodiversité (MSA) pour différents groupes d’espèces et types d’écosystèmes ;
- sur des données d’usages des terres et pressions environnementales actualisées chaque année (parfois issues de bases de données environnementales datant d’années antérieures, typiquement l’année N-1 ou N-2), fournies par des instituts tels que l’Agence néerlandaise d’évaluation environnementale ou le modèle IMAGE.
- Les mesures de MSA sont toujours ancrées par rapport à une référence "écosystème non perturbé", qui est théorique ou estimée à partir de l’abondance d’espèces dite « originelle ».
En pratique :
- La MSA de 2020 « photographiée » pour la France est donc une modélisation rétrospective, alimentée par les pressions connues jusqu’à cette date, et non une campagne d’observation de terrain strictement limitée à 2020. Elle repose sur des données pluriannuelles et des modèles, avec des mises à jour régulières. Les données proviennent de réseaux de suivi (comme le programme Vigie-Nature, les observatoires régionaux, ou des études ponctuelles) et nécessitent souvent des mesures préalables pour établir des tendances ou des références. Par exemple, le Baromètre de la Biodiversité ou les rapports de l'OFB (Office Français de la Biodiversité) utilisent des données collectées sur plusieurs années pour estimer l'abondance moyenne des espèces. La Stratégie Nationale pour la Biodiversité (SNB) et les rapports de l'IPBES (plateforme intergouvernementale sur la biodiversité) s'appuient aussi sur des séries temporelles, pas sur une seule année de mesure. Pour des données précises sur la MSA ou un indicateur similaire pour la France, il est utile de consulter les rapports de l'OFB ou des observatoires régionaux (ex : Rapport sur l’état de la biodiversité en Île-de-France).
Sources :
- Synthèse des outils de mesure d’impacts Biodiversité des entreprises les plus utilisés en France
- Globio.info
2. Peut on traduire une MSA de 0,36 en « perte de 64% de biodiversité » ?
La MSA représente la santé d'un écosystème et s’évalue entre 0 à 100%. Les écosystèmes les plus intacts auront le MSA le plus élevé. Cet indicateur constitue la moyenne des abondances (nombre d'individus observés divisé par le nombre d'individus dans un écosystème non perturbé) des espèces indigènes. Il tient compte à la fois de la richesse réelle en espèces et de l'abondance des espèces (si une espèce est absente, son abondance est égale à 0 et la MSA est plus faible).
L'indicateur MSA (abondance moyenne relative des espèces indigènes) varie entre 1 (écosystème intact, 100% d’abondance d’espèces originelles) et 0 (écosystème totalement détruit, abondance zéro). Il est également exprimé en pourcentage. Un MSA de 0% signifiera que l’écosystème a perdu toute sa biodiversité d’origine, tandis qu’un MSA de 100% signifiera que la biodiversité est égale à celle d’un écosystème original non perturbé. Par exemple, un parking correspond à un MSA de 0% ; une forêt vierge de toute activité humaine à un MSA de 100%.
Dans le cas du rapport La France face aux neuf limites planétaires, la valeur de 0,36 signifie donc qu’en moyenne pondérée, seules 36% des abondances originelles subsistent et par conséquent qu'il y a 64% de perte d’abondance des espèces indigènes par rapport à un état naturel théorique.
Attention toutefois, cette interprétation vaut sur l’abondance moyenne, pas sur le nombre d’espèces, ni sur toutes les facettes de la biodiversité (richesse en espèces, diversité génétique, intégrité fonctionnelle…).