J'aimerais en savoir plus sur les fours à chaux du quartier Saint-Paul au XVIIème siècle
Question d'origine :
Bonjour,
dans les registres paroissiaux de St Paul, je vois qu'une famille de boulangers vivait sur la paroisse de Saint Paul, du côté de Vaise, près des fours à chaux dans le dernier quart du XVII ème siècle. Je voudrais pouvoir situer avoir plus d'informations sur la localisation de ces fours à chaux, leur organisation, leur intégration dans la ville,et ce qu'ils sont devenus; et toute information que vous pourrez avoir à ce sujet. Vous en remerciant
Réponse du Guichet

Selon nos sources, c'est au XVIIe ou au XVIIIe siècle que furent construits à Vaise, trois fours à chaux où travaillaient des ouvriers miséreux, le long de la Saône près du pont de Serin et de la porte de Vaise, actuellement n°36 à 38 quai Arloing. Le dernier a été démoli en 1860 à cause de la construction des quais.
Bonjour,
L'existence de trois fours à chaux construits à Vaise est attestée sur le site Hypothèses, histoires lyonnaises (15 juin 2019). PATRIMOINE/La paroisse Saint-Pierre de Vaise. Histoires lyonnaises mais au XVIIIe siècle et non au XVIIe :
Au XVIIIe, trois fours à chaux s’installèrent près du pont de Serin construit en 1745 par les Hospices et qui s’écroula en 1789.
Nous avons pu localiser précisément ces fours à chaux grâce à une ancienne réponse du Guichet du savoir, à Wikimédia commons et au plan de Lyon de Ferdinand Delamonce (vers 1750) mis en ligne par les Archives municipales de Lyon.
Ancienne réponse du GDS, la porte de vaise
Le Lyon de nos pères, d'Emmanuel Vingtrinier (1901), mentionne aussi les deux portes. Vous y trouverez en outre plusieurs reproductions de gravures, notamment de la main d'Israël Sylvestre et de J.-J. de Boissieu. Deux légendes mettent justement le doigt sur l'homonymie : l'une présente "La porte de Pierre-Scize, appelée au XVIIe siècle Porte de Vaise (d'après J.-J. de Boissieu) Démolie en 1793" (p. 291), tandis qu'une autre gravure montrant le four à chaux de Vaise est légendée comme suit (p. 294) : "Le four à chaux se trouvait en amont et tout près du pont de Serin et de la porte de Vaise, appelée, au XVIIe siècle, porte du Lion."
"Porte du Lion ou de Vaise", ou encore "porte neuve du Pont-Levis", telles sont les appellations employées par Vingtrinier pour désigner la porte située au nord de l'Observance, à proximité du pont Serin.
Wikimédia commons
L'ancien four a chaux de Vaise, près du pont de Serin, vers 1850, illustration de J. Drevet
dans l'édition Le Lyon de nos pères d E. Vingtrinier publiée en 1901, collection BML
L'ouvrage est consultable en ligne sur Numélyo. La gravure apparaît page 214.
Plan de Lyon de Ferdinand Delamonce
Zoom sur la partie du plan où se trouvent les fours à chaux
Cependant, ces fours existeraient depuis le XVIIe siècle selon Guetty Long et Sylvie Marion-Feyeux qui nous remémorent la vie des vaisois en 1600 dans l'ouvrage Vaise, l'étonnante histoire d'un quartier lyonnais, 2009, pp. 26-27 :
Les années 1600 apportent au faubourg de Vaise leur lot de vicissitudes. La population a augmenté, et l'église St-Pierre aux Liens ne correspond plus aux besoins. Un nouvel édifice est financé en 1625, plus grand et de style byzantin, digne d'être le coeur d'une paroisse. Cependant, malgré la "restructuration" de la Maison de Dieu, les Vaisois traversent des temps de petits revenus. Ce sont principalement des prolétaires, ouvriers des fours à chaux ou des moulins à blé. La pauvreté est grande. Les hivers 1679, 1681, 1691, sont terribles, et le siècle tourné, celui de 1709 sera tragique. Les vignes ont gelé et les blés aussi, en terre ; la navigation, activité essentielle pour Vaise, est interrompue. "Le pain est rare et cher. C'est la famine pour tout ceux qui n'ont que leur travail pour vivre."
Le curé de Vaise parle de "gens morts de faim, n'ayant eu à manger que de l'herbe..." De plus, la mauvaise qualité du sol et l'élargissement du centre de Lyon favorisent l'installation, ici, d'industries polluantes. L'essor du commerce, le nombre de voyageurs ayant diminué, le champ est libre pour l"aménagement de nouvelles tanneries (rue du même nom), de tuileries, 3 nouveaux fours à chaux (actuellement N°36 à 38 quai Arloing) une fonderie de canons (entre les actuels pont Koening et Clémenceau), des lavoirs aussi, des blanchisseries qui verront leur "zénith" un siècle plus tard et leur disparition dans les années 1960.
Malheureusement, certaines de ces activités empuantissent l'air, les tanneries et les fours à chaux surtout, et affaiblissent les habitants. Et cela va durer trois siècles !!!
[...]
Ces fours ne disparaîtront qu'en 1860, avec les travaux de construction des quais.
Dans un mémoire de fin d'étude à l’École Nationale Supérieure des Bibliothèques datant de 1985, Catalogue des manuscrits de la société d'agriculture de Lyon, Alain Sainsot, est évoqué le Rapport de la commission travaillant sur l'établissement de fours a chaux à Veize, par Othon de Moidière, p. 21. Celui-ci est conservé à la bibliothèque municipale de Lyon et nous avons pu le consulter. Ce document rend compte de ce qui a été décidé par cette commission créée pour statuer sur les oppositions à la construction de ces fours. La lecture n'en est pas aisée mais en voici des photos. S'il vous intéresse, nous vous conseillons toutefois de venir consulter ce manuscrit à la BML. Sa côte est Ms 5573 - division f. 49-50 :
Dans Lortet Pierre, Audibert Cédric, Bärtschi Blandine, Benharrech Sarah, Chambaud Françoise, Philippe Marc, Thiébaut Mélanie. Les Promenades botaniques de Clémence Lortet, née Richard (1772-1835). In: Bulletin de la société linnéenne de Lyon, tome 87, fascicule 7-8, Septembre-octobre 2018. pp. 199-254, il est aussi question d'un four à chaux mais la description de l'endroit ne correspond pas à ceux de Vaise :
On peut suivre le Rhône jusqu’au four a chaux qui est a la grande digue, là on peut sortir de l’ile, ou plutôt de la presqu’ile, on trouve dans le courant d’eau qui la sépare de la plaine... p. 213
Les Archives municipales de Lyon possèdent également un livre intitulé Fours à chaux du Rhône / Hours, Henri (1926-2017 ; archiviste paléographe), Lavigne-Louis, Maryannick (1942-.... ; directrice du Pré-inventaire des monuments et richesses artistiques du Rhône).
Enfin, un article de l'Influx, Vivre jadis sur les quais de Saône à Lyon, nous apprend qu'aujourd'hui, certaines rues du quartier portent des noms évoquant les anciennes activités s’y trouvant : rue des Docks, rue du Four à chaux, rue des mariniers, rue de la navigation.
Bonne journée