Je recherche des documents sur la chaux utilisée en Andalousie pour protéger des épidémies
Question d'origine :
Bonjour,
Je cherche des documents (livres ou audio-visuels) en lien avec la chaux qui a été utilisée en Andalousie pour protéger des épidémies. Des documents historiques et/ou romancés sont les bienvenus. (En langue française)
Savez-vous où et comment je pourrais en trouver ?
En vous remerciant d'avance, je vous souhaite une bonne journée.
Réponse du Guichet
Suite aux épidémies successives de peste, de choléra, de fièvre jaune ou de typhus du XVIe au XIXe siècle, le blanc de chaux revêt dans les villages andalous (les "pueblos blancos") un rôle de rituel social associé à l'hygiène, à la propreté et au renouveau après la mort. De plus, en période de pénurie, comme lors des épidémies et des famines, il n'était pas toujours facile de se procurer des pigments.
Ce matériau, qui devait protéger des maladies, remonte probablement à la période islamique. Il existe peu de livres ou de DVD en français consacrés exclusivement à ce sujet très précis, il faut donc chercher dans des ouvrages ou documentaires plus généraux sur l’Andalousie, l’architecture vernaculaire ou l’histoire des épidémies. Nous vous proposons ainsi des pistes issues de nos recherches dans le catalogue de la BnF, Gallica, Isidore, et nos propres collections.
Afin de recueillir des sources espagnoles (qu'il vous faudra traduire en français par un outil de traduction en ligne le cas échéant), nous allons solliciter la plateforme de question / réponse en ligne du réseau des bibliothèques espagnoles : Pregunte, las bibliotecas responden. Nous ne manquerons pas de vous communiquer leur réponse.
Bonjour,
Vous cherchez des documents (documents imprimés et/ou audiovisuels, documentaires ou fictions historiques) en lien avec la chaux qui a été utilisée en Andalousie pour protéger des épidémies.
Les « pueblos blancos », littéralement les villages blancs de la province de Cadix, surplombent de nombreux sommets des collines d’Andalousie, dans le sud de l’Espagne. Lorsqu’une série d’épidémies s’est abattue sur la région entre les 16e et 19e siècles, les maisons ont été peintes au blanc de chaux. Ce matériau, qui devait les protéger des maladies, remonte probablement à la période islamique :
Lors de la période islamique, les villages avaient probablement déjà commencé à se vêtir de leur teinte distinctive, affirme Eduardo Mosquera Adell. Il étudie l’histoire de l’architecture à l’université de Séville. Il indique notamment qu’Ibn Khaldun, un savant arabo-andalou du 14e siècle, avait décrit une méthode pour fabriquer du blanc de chaux à partir de chaux éteinte.
La chaux permettait de maintenir la fraîcheur dans les maisons lors des étés très chauds en Andalousie. Au fil du temps, sa couleur éclatante a également été associée avec la notion d’hygiène. Lorsqu’une série d’épidémies de peste, de choléra ou encore de fièvre jaune a balayé la région entre les 16e et 19e siècles, les maisons ont été ravalées avec de la chaux pour éviter les infections. Il se pourrait que cette mesure ait été favorable. Des études révèlent que le blanc de chaux tue bel et bien la bactérie responsable du choléra. Année après année face aux maladies, certains de ces villages andalous se sont lentement teintés de ce blanc pur qui étincelle toujours sous les rayons du Soleil du sud de l’Espagne.
Aujourd’hui, les villages blancs d’Andalousie représentent également une véritable fierté culturelle. La production traditionnelle du blanc de chaux andalou a été inscrite au patrimoine de l’UNESCO en 2011. Le Museo de Cal de Morón au sud-ouest de Séville offre une démonstration du procédé artisanal aux visiteurs.
Source : Les pueblos blancos andalous, villages immaculés chargés d’histoire (Magazine National Geographic, 24 sept. 2025)
L'article du Courrier international (no. 1547, jeudi 25 juin 2020) titré Les blancs villages d'Andalousie peut être lu en intégralité sur la plateforme de presse ligne Europresse (avec un abonnement BmL). Voici des extraits évoquant le rôle de rituel social associé à l'hygiène, à la propreté et au renouveau après la mort que revêt l'usage du blanc de chaud dans ces pueblos blancos, suite aux épidémies successives de peste, de fièvre jaune ou de typhus du XVIe au XIXe siècle. De plus, en période de pénurie, comme lors des épidémies et des famines, il n'était pas toujours facile de se procurer des pigments :
Armée de chaux, d'un seau et d'un rouleau, Manuela Delgado contribue chaque printemps au charme immaculé de Medina Sidonia, un de ces villages de carte postale de la province de Cadix. Elle perpétuait ce rituel, comme sa mère et sa grand-mère avant elle, sans trop se demander pourquoi. Mais quand la crise provoquée par le nouveau coronavirus l'a empêchée de passer sa façade à la chaux, Manuela Delgado s'est souvenue des explications maternelles : "On passait les murs à la chaux à cause des épidémies. On a beau s'être modernisés, la nature sait encore se faire entendre. Mes ancêtres disaient déjà que la chaux éliminait tous les microbes."
Dans des villages andalous comme Medina Sidonia, toutes les maisons arborent des façades d'un blanc éclatant. Cette caractéristique est tellement ancrée dans les esprits que, bien souvent, les façades blanches sont inscrites au cahier des charges du plan d'urbanisme et sont aussi une attraction touristique. Mais il n'en a pas toujours été ainsi. Que s'est-il passé pour que des localités abandonnent la couleur, l'ocre, le bleu ou la terre cuite au profit du blanc ? Les épidémies successives de peste, de fièvre jaune ou de typhus du XVIe au XIXe siècle sont en grande partie responsables de cette obsession du blanc qui, au fil des siècles, est devenu un rituel social associé à l'hygiène, au changement de saisons, à la propreté et même au renouveau après la mort.
Les propriétés antiseptiques et antibactériennes de l'oxyde de calcium [communément appelé "chaux vive"] ont été prouvées par plusieurs études scientifiques, et son pouvoir assainissant lui vaut plus d'une centaine d'applications. Bien que son action concrète contre le coronavirus n'ait pas encore été démontrée, l'entreprise de fours à chaux traditionnels Gordillos, à Morón de la Frontera (province de Séville), a fait don de peinture à base de chaux pour blanchir les salles communes de la maison de retraite locale. "Nous avions l'obligation morale de mettre notre entreprise à leur service. D'après certaines études et des témoignages, c'est ce qui se faisait pendant les épidémies", explique Isidoro Gordillo, dernier représentant de la famille à la tête de cette entreprise fondée en 1874.
La chaux est l'un des plus anciens matériaux de construction utilisés par l'homme. Mélangée au mortier avec ou sans pigments, dissoute dans l'eau pour faire de l'enduit, elle est utilisée depuis des millénaires en architecture. Cependant, il n'est pas si facile de déterminer le moment exact où la relation de cause à effet a été établie entre la chaux et la lutte contre les épidémies. L'archiviste de Medina Sidonia, María José Dávila, a retrouvé des documents historiques donnant l'ordre de sceller les tombes avec de la chaux en cas de peste dès le XVIIe siècle. Quant à Eduardo Mosquera, universitaire et architecte spécialisé dans la restauration, il évoque les mesures hygiénistes de l'époque du roi Charles III - au XVIIIe siècle - qui ont conduit, entre autres mesures, à peindre en blanc l'intérieur des hôpitaux et des églises.
Choix économique. "C'était pour des raisons d'hygiène mais aussi d'uniformité de style", estime Eduardo Mosquera, puisque au temps du néoclassique, la couleur de la période baroque était mal vue. L'architecte souligne que cette recherche de la blancheur éclatante s'est sans doute étendue par assimilation à l'architecture populaire. Malgré la présence de touches de couleur dans le sud de la péninsule, le blanc était déjà utilisé dans les régions du bord de la Méditerranée pour ses propriétés réfléchissantes. Selon Gema Carrera, anthropologue à l'Institut andalou du patrimoine historique, une autre raison explique la disparition progressive de la couleur dans les villages après le passage des virus : "En période de pénurie, comme lors des épidémies et des famines, il n'était pas toujours facile de se procurer des pigments. Le badigeon coloré devenant trop onéreux, c'est le blanc de chaux qui a été privilégié."
À chaque vague d'infection, la pratique devenait rituelle, surtout dans des régions comme l'Andalousie occidentale, qui comprend les provinces de Cadix, de Huelva et de Séville. "Dans la pièce où quelqu'un était mort, on préparait de la chaux", se souvient Isidoro Gordillo. "Le blanc représente l'immaculé, et fait ressortir la saleté", ajoute Eduardo Mosquera. Et c'est pour cette raison que le blanchiment à la chaux est devenu un rituel de nettoyage pratiqué par les femmes. Il a ensuite été lié aux époques de l'année : les façades étaient passées à la chaux au printemps, pour les fêtes des saints patrons, et les cimetières étaient blanchis à la Toussaint. "Dans presque toutes les maisons andalouses, il y avait toujours un coin avec le matériel nécessaire pour un petit coup de neuf : brosses, pinceaux, escabeau, pots, seaux, avec de la chaux éteinte, toujours prêts pour une retouche et pour reprendre la peinture écaillée", explique Gema Carrera.
Il existe peu de livres ou de DVD en français consacrés exclusivement à ce sujet très précis, il faut donc chercher dans des ouvrages ou documentaires plus généraux sur l’Andalousie, l’architecture vernaculaire ou l’histoire des épidémies.
Gallica (bibliothèque numérique de la BnF) rend accessible des textes anciens scientifiques tels que celui-ci, qui préconise comme mesure de lutte contre le choléra le blanchissement des murs au lait de chaux :
Choléra, mode de propagation et moyens préservatifs, par Félix Boureau,1868
Lorsque le choléra aura été introduit dans une ville, il sera important de prendre sur-le-champ toutes les mesures capables d'en atténuer les effets : les habitations humides, malpropres, devront être séchées et purifiées ; il faudra blanchir les murailles au lait de chaux, et ventiler ensuite le plus longtemps et le plus souvent possible, en ouvrant les portes et les fenêtres. (p. 45)
Pour des études techniques et historiques sur la production et l’usage de la chaux dans les économies anciennes (incluant les zones méditerranéennes comme l’Andalousie), cette publication en archéologie et matériaux anciens est disponible sur OpenEdition Journals :
“Gamme de chaux dans les économies anciennes. Méthodes de prélèvement et d’identification des types de chaux dans les fours (DRX, MEB-EDS, pétrographie) (Antiquité, Moyen Âge, époque moderne)” / Christophe Vaschalde, Philippe Bromblet and Stéphane Büttner, ArcheoSciences [Online], 40, 2016
Sur l'habitat en Andalousie, nous avons trouvé sur la plateforme de recherche en sciences humaines, Isidore, les références suivantes :
L'habitat rural d'Andalousie orientale: quelle tradition ? / Delaigue Marie-Christine. In: Mélanges de la Casa de Velázquez, tome 27-1, 1991. Antiquité et Moyen-Age. pp. 101-125.
Matériaux et techniques de construction : quelques réflexions à propos de l'habitat villageois dans al-Andalus / Bazzana André. In: Castrum 6. Maisons et espaces domestiques dans le monde méditerranéen au moyen âge. Rome : École Française de Rome, 2000. pp. 53-74. (Publications de l'École française de Rome, 105)
Dans le catalogue de la BnF, ces documents imprimés pourraient vous intéresser :
- Documentaire
La Chaux [Texte imprimé] : sa production et son utilisation dans l'habitat / Groupe de recherche et d'échanges technologiques ; [rédigé par Guillaume Chantry], 1981
- Fictions
Répétition générale [Texte imprimé] : roman / Julien Perruchot, 2020
Cet ouvrage conte l'épopée d'un petit village paysan d'Andalousie, el pueblo Casals, et de ses habitants qui se métamorphosent – avec heurts, passions, amour et mort – entre l'épidémie de grippe de 1918 et l'année 1939. Devenue progressivement ville industrielle prospère, el pueblo Casals finit anéantie par l'absurdité d'une guerre civile. Une guerre qui porte en elle tous les ingrédients du second conflit mondial.À travers la beauté sibylline des paysages andalous, la maladie, la guerre et les crises sociétales s'entremêlent avec justesse autour de personnages touchants.
La fille de Casares [Texte imprimé] / François Henrotin, 2024
Le roman est également une ode à l'Andalousie, à ses paysages envoûtants, sa culture riche et ses habitants chaleureux. L'auteur nous fait voyager à travers les ruelles étroites de Casares, les places animées de Tanger, les souks colorés de Fès et les plages ensoleillées d'Estepona. Il nous plonge dans l'atmosphère unique de cette région, où se mêlent traditions ancestrales et modernité. [source éditeur]
Camerata [Texte imprimé] : Maria, le destin d'une mère / Muñoz, Mathieu, 2024
Dans ce premier tome de la série Camerata, Mathieu Muñoz rend hommage à ses ancêtres en soulignant l'importance capitale des femmes dans l'Andalousie de la fin du XIXe siècle. Une fresque historique bouleversante sur fond de quêtes personnelles ! [source éditeur]
Nous vous donnons ici des pistes bibliographiques plus générales issues de nos collections, sur l'histoire des épidémies et l'histoire de l'Andalousie :
- Imprimés
Causes des maladies épidémiques, moyens d'y remédier et de les prévenir [Livre] : avec quelques réflexions sur l'épidémie d'Espagne / par M. Lassis, 1822 : à consulter en ligne sur Numelyo
Précis historique de la maladie [Fièvre jaune] qui a régné dans l'Andalousie en 1800 [Livre] : années 8 et 9 de la République française / Jean-Nicolas Berthe, 1802 : à consulter en ligne sur Numelyo
Peste, contagion et martyre [Livre] : histoire du fléau en Occident musulman médiéval / Mohammed Melhaoui, 2005
Pandémies [Livre] : des origines à la Covid-19 / Patrick Berche, Stanis Perez, 2021
Histoire des épidémies de l'Antiquité à nos jours [Livre] / Brice Rabot, 2024
Histoire de l'Andalousie [Livre] : mémoire et enjeux : [actes du colloque tenu à l'Institut du Monde Arabe les 9 et 10 novembre 2001] / sous la direction de José Antonio Alcantud & François Zabbal, 2003
- Documents audiovisuels :
Sur les traces andalouses, une architecture millénaire [D.V.D.] / réal. de Sébastien Teze, 2015
Andalousie [D.V.D.] / réal. de Bernard d'Abrigeon et François Gall, 2004
Espagne du Sud [D.V.D.] / réal. de Patricio Guzman. Andalousie / Linda Ferrer Rocca. Cadix / réal. de Gualberto Ferrari, 2005
Afin de recueillir des sources espagnoles (qu'il vous faudra traduire en français par un outil de traduction en ligne le cas échéant), nous allons solliciter la plateforme de question / réponse en ligne du réseau des bibliothèques espagnoles : Pregunte, las bibliotecas responden. Nous ne manquerons pas de vous communiquer leur réponse.
Bien à vous,
Vers ma fin