Comment les écosystèmes de l'archipel européen ont-ils été impactés par l’arrivée des hadrosaures ?
Question d'origine :
En Europe, la fin du Crétacé est marquée par l'arrivée des hadrosaures, les fameux dinosaures à bec de canard. Comment les écosystèmes de l'archipel européen ont -ils été impactés par ce changement?
Réponse du Guichet
N'étant pas paléontologues, nous peinons à répondre à votre question très pointue. Outre une indication à propos de l'impact sur leur environnement des dinosaures herbivores dont font vraisemblablement partie les hadrosaures, nous n'avons pu que récolter quelques informations sur la faune et la flore au temps de ces hadrosauridés dans l'archipel européen. Nous vous conseillons de vous adresser au Muséum national d'Histoire naturelle de Paris, à l'Association Paléontologique Française ou même au Natural History Museum de Londres pour obtenir des informations éclairées sur la question.
Bonjour,
Après la Pangée il y avait deux supercontinents. La Laurasie et le Gondwana. Selon Tim Flannery dans l'émission L'Europe, des dinosaures à nos jours, Du vent dans les synapses, France inter, 28 décembre 2019, tous les continents résultent de la fission entre les supercontinents. Il n'y a que l'Europe qui a comme origine la constitution d'un archipel. Cette histoire là fait de l'Europe un endroit à part.
Cependant, étant simplement bibliothécaires et non pas paléontologues, nous peinons à répondre à votre question très pointue. Nous n'avons pu que récolter quelques informations sur la faune et la flore au temps des hadrosaures dans l'archipel européen.
Par exemple, p. 18 de l'ouvrage Les mondes d'hier : voyage aux origines de la Terre / Thomas Halliday ; traduit de l'anglais par Aurélien Blanchard, 2022, nous apprenons qu'il n'y avait pas d'herbe dans l'hémisphère nord et que les plantes à fleur se sont diversifiées au milieu du Crétacé.
Quant à la faune, nous trouvons quelques indications dans Le supercontinent : une histoire naturelle de l'Europe / Tim Flannery ; avec Luigi Boitani ; traduit de l'anglais (Australie) par Sophie Lem ; préface de Ronan Allain ; illustrations d'Alain Bénéteau, 2019 :
Quelles étaient à cette époque reculée les espèces typiquement européennes ? Et qu'en reste-t-il aujourd'hui ? Les scientifiques parlent d'une "faune souche" (core fauna), qui comprend tous les animaux dont les lignages étaient présents dans l'archipel à l'époque des dinosaures. Les ancêtres de cette faune primitive, qui compte des amphibiens, des tortues, des crocodiles et des dinosaures, sont pour la plupart d'entre eux arrivés très tôt par mer, en provenance d'Amérique du Nord, d'Afrique et d'Asie. [...]
Les dinosaures en provenance d'Asie sont les candidats à l'immigration les plus hardis, bien que les Zhelestidae (des mammifères primitifs insectivores qui ressemblaient à des musaraignes-éléphants) puissent également concourir au titre. De lourds hadrosaures bipèdes du groupe des lambéosaures, quelques céraptosiens faisant penser aux rhinocéros et des parents des vélociraptors, tous de grande taille et bons nageurs : voilà ceux qui résistent le mieux aux embûches du voyage. Il est probable que pour un dinosaure qui réussit à se hisser sur une grève européenne, dix mille périssent. Un million d'années plus tard, les descendants du survivant sont devenus les dinosaures nains de l'archipel européen. [...]
[..] Vers la fin de l'époque des dinosaures, de grands fleuves coulent de l'Afrique vers l'Europe, et les poissons d'eau douce africains pénètrent en masse dans les eaux européennes. On trouve parmi eux eux les parents éloignés des piranhas, des tétras si apprécié en aquarium, des orphies ainsi que des cœlacanthes d'eau douce, connus sous le nom de Mawsoniidae. Le cœlacanthe est un grand poisson apparenté aux tétrapodes, dont la découverte en 1938, sur la côte d'Afrique du Sud, stupéfia le monde entier : on le pensait en effet éteint depuis 66 millions d'années.
En même temps que ces poissons, les premières grenouilles modernes arrivent en Europe. Connu sous le nom de néobatraciens, le groupe comprend les grenouilles-taureaux (ouaouarons) et les crapauds qui vivent aujourd'hui en Europe. Ces migrants africains trouvent un habitat accueillant dans ce qui est aujourd'hui la Hongrie, où leur fossiles ont été retrouvés dans des mines de bauxite. Certaines tortues side-neck, des serpents de la famille des Madtsoiidae ressemblant à des pythons avec des vestiges de membres, ces crocodiles terrestres aux dents crénelées, et plusieurs sortes de dinosaures viennent aussi d'Afrique. Un dinosaure carnivore, Arcovenator, semble même avoir migré de l'Inde jusqu'en Europe par l'Afrique. Mais le pont terrestre qui relie l'Afrique et l'Europe disparaît sous les flots il y a 66 millions d'années.
Les connexions avec l'Afrique s'interrompent, mais dans le même temps, les migrations en provenance de l'Amérique du Nord par le corridor De Geer s'intensifient. Le monde est beaucoup plus chaud à l'époque, mais un long voyage dans les régions polaires, plongées dans l'obscurité pendant trois mois par an, est néanmoins nécessaire. Les lézards à queue en fouet font partie des premiers arrivants, même si la branche européenne s'est éteinte depuis longtemps. Il est aussi possible que le marsupial dont les dents ont été retrouvées en Charente ait utilisé le corridor De Geer.
Plusieurs représentants de la lignée des crocodiles et des dinosaures apparentés au curieux lambéosaure arrivent par le couloir de De Geer vers la fin de l'âge des dinosaures, à un moment où le réchauffement du climat rend cette route plus praticable. [...]
Les rares espèces fortunées qui réussissent à atteindre l'Europe rencontrent ensuite de complexes barrières qui limitent leurs déplacements. Les îles de l'archipel sont séparées par d'importantes étendues d'eau, et chaque île possède ses caractéristiques propres. Certaines sont trop petites, d'autres trop arides ou encore ne peuvent, pour une raison ou une autre, soutenir la croissance de certaines populations. Quelques espèces réussissent malgré tout à s'installer sur l'ensemble du territoire européen, mais la plupart se limitent à une île ou à un groupe d'îles.
pp. 53-56
Voici un autre élément de réponse que donne la page La période du Crétacé : à quoi ressemblait la Terre avant l’extinction des dinosaures ? du Natural History Museum de Londres :
Les dinosaures herbivores, c'est-à-dire ceux qui se nourrissaient de plantes, étaient peut-être aussi des ingénieurs d'écosystèmes : ils modifiaient leur habitat par leur comportement. En consommant des graines, ces dernières traversaient leur système digestif et étaient éliminées dans leurs excréments, contribuant ainsi à leur dissémination dans leur milieu naturel lors de leurs déplacements.
Autre piste, Le Crétacé, la grande diversification avant la grande extinction, Muséum national d'Histoire naturelle de Paris :
À la fin du Crétacé, les températures moyennes sont supérieures à 18 °C (15 °C et 2023) et il n’y a pas de glace aux pôles. Le niveau des mers s’élève. Au Crétacé supérieur (- 100 Ma à - 66 Ma) il est 200 à 300 m au-dessus du niveau de 2023 ! Il y a 5 fois plus de CO2 dans l’atmosphère qu’en 2023.
Enfin, ces documents pourraient peut-être vous intéresser :
Csiki-Sava Z, Buffetaut E, Ősi A, Pereda-Suberbiola X, Brusatte SL. Island life in the Cretaceous - faunal composition, biogeography, evolution, and extinction of land-living vertebrates on the Late Cretaceous European archipelago. Zookeys. 2015 Jan 8;(469):1-161.
Le Crétacé supérieur fut une période de bouleversements globaux considérables. Les dernières phases de l'ère des dinosaures furent marquées par des fluctuations climatiques et du niveau marin, et furent témoins de changements paléogéographiques et fauniques importants, avant l'impact du bolide de la fin du Crétacé. La connaissance des fossiles terrestres du Crétacé supérieur en Europe s'affine progressivement, grâce notamment à d'intenses travaux de terrain menés ces vingt dernières années, promettant de nouvelles perspectives sur l'évolution faunique de cette période. Nous passons en revue les fossiles terrestres du Crétacé supérieur en Europe et discutons de leur importance pour la compréhension de la paléogéographie, de l'écologie, de l'évolution et de l'extinction des vertébrés terrestres. Nous étudions les principales faunes du Crétacé supérieur d'Autriche, de Hongrie, de France, d'Espagne, du Portugal et de Roumanie, ainsi que des données plus fragmentaires provenant d'autres régions d'Europe. Nous abordons le contexte paléogéographique et l'histoire de la formation de ces faunes, et soutenons qu'elles sont composées d'un noyau endémique enrichi par diverses vagues d'immigration. Ces faunes vivaient dans un archipel insulaire, et nous décrivons comment ce milieu insulaire a engendré des particularités écologiques telles qu'une faible diversité, une prédominance de taxons primitifs et des changements morphologiques marqués (notamment un nanisme). Nous concluons en discutant de l'importance des données européennes pour la compréhension de l'extinction de la fin du Crétacé et montrons qu'il n'existe aucune preuve tangible d'un déclin à long terme des dinosaures ou d'autres groupes en Europe avant l'impact du bolide.
Bernat Vila, Albert G. Sellés, Stephen L. Brusatte, Diversity and faunal changes in the latest Cretaceous dinosaur communities of southwestern Europe, Cretaceous Research, Volume 57, 2016, Pages 552-564.
Condamine, F.L., Guinot, G., Benton, M.J. et al. Dinosaur biodiversity declined well before the asteroid impact, influenced by ecological and environmental pressures. Nat Commun 12, 3833 (2021)
Zoltan Csiki, Michael J. Benton, An island of dwarfs — Reconstructing the Late Cretaceous Haţeg palaeoecosystem, Palaeogeography, Palaeoclimatology, Palaeoecology, Volume 293, Issues 3–4, 2010, Pages 265-270.
Nous vous conseillons de vous adresser au Muséum national d'Histoire naturelle de Paris, à l'Association Paléontologique Française ou même au Natural History Museum de Londres pour obtenir des informations éclairées sur la question.
Bonne journée
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