Livres animés et livres objets

Réponse du service Guichet du Savoir

livre animé
synt. n.m. - Livre: -> Livre ; animé: p.p. du verbe animer (latin animare, de anima, « air, souffle, âme, principe de la vie »). - Angl. pop-up book.

Livre conçu de manière que ses pages puissent changer d'aspect, au moyen de dispositifs divers (systèmes mécaniques, découpes en cartes fines, pages divisées en volets donnant lieu à des combinaisons variées, etc.), sous l'action de la per-
sonne qui l'ouvre. Livre animé composé d'illustrations qui se déploient en trois dimensions (-> Pop-up). Livre animé composé de volets à combinaisons (-> Pêle-mêle). Livre animé à volvelles, à musique. SYN. livre à système, livre à transformation.

Les livres animés, ou à système, se caractérisent d'abord par leur interactivité : le geste du lecteur ne se résume pas, en général, au fait de tourner les pages. L'animation peut être automatique (le simple fait d'ouvrir le livre déclenche un mouvement de pièces mobiles ou en relief). Dans tous les cas le système vise à une transformation du contenu de la page et séduit principalement par l'effet de surprise : la page s'avère être plus qu'une simple page. Le livre animé se distingue assez nettement du livre-objet, dans la mesure où il s'attache à conserver la forme classique du livre occidental, tout en la subvertissant.

Des origines savantes
Si le livre animé est surtout connu pour son aspect ludique, ses origines, dès les débuts de l'imprimerie, sont savantes et didactiques. A la fin du Moyen Age, des manuscrits montrent des figures anatomiques avec des parties que l'on peut soulever, comme de petits volets. Cette exposition de l'anatomie par feuillets superposés connaîtra de nombreux avatars au XIXe siècle et jusqu'à nos jours. Le plus célèbre est le superbe Catoptrum microcosmicum, de Johannes Remmelin, publié en 1613 (traduit vers 1620 sous le titre Abrégé de l'anatomie du corps humain). Au XIXe siècle, on remarque les ouvrages d'Achille Comte et L'Anatomie iconoclaste de Gustave-Joseph-Alphonse Witkowski, qui compte dans sa première édition onze albums in-folio de lithographies coloriées. En France, des ouvrages techniques exploitant ce principe connaîtront encore un grand succès dans la première moitié du XXe siècle, ainsi la célèbre Encyclopédie Quillet. Ces productions demeurent cependant peu connues et leur histoire reste à écrire.
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livre-objet
n.m. - Livre: latin liber; objet: latin médiéval objectum, « ce qui affecte les sens », issu du latin classique objicere, « placer devant ». - Angl. collector's book.

1. Livre que sa présentation matérielle apparente à un objet précieux, rare ou curieux. 2. Objet qui emprunte à un livre son apparence, mais qui n'est pas fait de feuillets imprimés, ou qui n'est pas destiné à la lecture. Livres-objets en terre cuite, en marbre sculpté.
La redondance même du mot livre-objet (tout livre est un objet) met l'accent sur la manière dont une telle création est envisagée : dans sa matérialité concrète immédiate bien plus que dans sa dimension de support de texte voué à la lecture.
À l'origine de ce terme, les reliures que Georges Hugnet réalisa, au milieu des années 1930, sur les livres de ses amis surréalistes. Ainsi transformés, il les nomma livres-objets par analogie avec les tableaux-objets de la période cubiste de
Picasso et de Braque et avec les poèmes-objets, dont le premier fut réalisé par André Breton en 1929.
Vers les années 1960, le mot livre-objet réapparut en réaction d'une part contre l'uniformité du livre de consommation courante et d'autre part contre le manque d'imagination de la bibliophilie traditionnelle.
Le livre-objet prend donc deux orientations, l'une qui contribue à renouveler le livre de bibliophilie, l'autre qui au contraire s'y oppose.

Renouvellement
Dans la première, l'artiste qui collabore au livre avec un écrivain n'intervient pas nécessairement dans celui-ci mais à l'extérieur, donnant à son illustration un caractère tridimensionnel: sculpture pour entourer le livre, ou emboîtage original pour contenir des objets courants mais distraits de leur rôle utilitaire. Prolongement du livre, il lui donne un surplus de sens. Les éditions du Soleil noir animées par François Di Dio sont représentatives de cette tendance. L'artiste n'est
plus seulement illustrateur, il est celui qui construit un objet autour du livre, impliquant une véritable mise en scène pour celui qui veut lire. Certaines créations des éditions de Claude Givaudan, plus radicales encore, ont exploité des techniques et des matériaux modernes comme supports de l'écriture, assimilant le livre-objet à une installation.

Opposition
Dans la seconde orientation, l'artiste crée un objet à partir de la forme du livre en lui refusant sa fonction de véhicule d'information, la niant même. Le livre devient un objet en soi, un objet unique. Livre emprisonné, ficelé, livre utilisant des matériaux de récupération, proche des conceptions de l'arte povera. Livre figé comme les livres en brique de Robert Filliou, en marbre de Marie Orensanz, livre bétonné de Wolf Vostel, livre-boules de Gérard Duchêne. Le livre échappe dès
lors au lisible pour devenir sculpture et n'être plus que cela. Livre qui ne garde de la fonction du livre que le nom, réceptacle du rien.

Source (et suite) sur Dictionnaire encyclopédique du livre