Traces sur le visage de certains africains
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 12/12/2007 à 13h25
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Question d'origine :
Bonjour,
Je vois parfois des personnes d'origine africaine avec des marques sur le visage, le plus souvent sur les tempes. Ces marques semblent être des cicatrices (en tout cas, il ne s'agit pas de henné), petites traces en longueur de moins de 3 cm.
Bien que les origines et traditions puissent connaître une grande variabilité d'un pays ou d'une culture d'origine à une autre, pouvez-vous dire comment ces marques sont faites, et quelles en sont les significations ?
Merci !
Réponse du Guichet

Il s'agit probablement de marques de scarification, pratique sociale africaine qui, selon les ethnies, distingue les individus en fonction de leur rang social ou familial, symbolise leur maturité, ou bien encore sert de cure médicale. Ce sont des incisions peu profondes, généralement pratiquées dès l'enfance ou l'adolescence, qui laissent des cicatrices indélébiles :
La scarification en Afrique
La scarification sociale a une origine ancienne, on la trouve couramment pratiquée en Afrique (particulièrement en Afrique de l'Ouest) où elle a remplacé le tatouage qui se distingue mal sur les peaux sombres. La scarification sociale revêt une signification particulière, rituelle de passage à l’âge adulte ou appartenance à un groupe restreint.
(source : Wikipedia).
Comme vous le supposez, il n'existe pas d'explication univoque pour chaque type de scarification, chaque ethnie ayant ses propres pratiques et symboliques. Voici quelques exemples :
- chez les Moose du Burkina Faso :
Importance sociale des scarifications chez les Moose de Manga
Les cicatrices permettaient une classification sociale divisant la société en nobles, princes ou esclaves selon le type de scarifications que l’on porte.
Le Marende : ce sont des cicatrices de la beauté, de l’élégance qui consistent à faire deux ou trois traits horizontaux sur la tempe. Ce terme Marende renvoit aux marense (teinturiers d’origine Sonrhaï) qui sont une catégorie socio professionnelle des moose. La relation avec cette couche sociale n’est pas ressortie dans les explications des dépositaires de la tradition de Manga. Mais ailleurs la référence aux marense est très probable.[...] (Alain Joseph SISSAO, Centre National de la Recherche Scientifique et Technologique burkinabe)
- chez les Sarakolés du Mali et les Haal Pular de Mauritanie :
Les scarifications peuvent avoir aussi une fonction thérapeutique. Les Sarakolés, de même que d'autres ethnies de la région de Kayes, au Mali, ont parfois trois courts traits sur chaque tempe. Il s'agit en fait d'une méthode de « guérison » appliquée aux personnes qui ont des maux d'yeux : on leur ôte le mauvais sang dont quelques gouttes sont versées dans leurs yeux. Il paraît que ça marche !
Enlever le mauvais sang - au sens figuré du terme -, tel est l'objet des balafres pratiquées chez les Haal Pular (ceux qui ont en commun l'usage de la langue peule, c'est-à-dire les Foulbè et les Toucouleurs) de Mauritanie. Les adultes sont marqués de deux traits (« les guillemets ») sur les tempes pour, dit-on, chasser le sang impur et rendre les gens plus mûrs et plus intelligents. L'expression « o fessaki » lancée à un jeune signifie d'ailleurs qu'il raconte n'importe quoi, car « il n'est pas balafré ». (source : Une carte d'identité sur le visage, Jeune Afrique, décembre 1999).
Comme de nombreuses autres traditions ancestrales, la scarification est une pratique en recul : problèmes sanitaires, souffrances inutiles, obstacle à l'unité africaine, discrimination, sont les arguments de ses détracteurs.
Vous pouvez consulter l'exposition en ligne des photos de Jean-Michel Clajot qui a réalisé un reportage sur ce sujet. (Attention, certaines images sont susceptibles de heurter les sensibilités).
En ce qui concerne les techniques, elles aussi varient en fonction des ethnies. Il existe deux types de scarification, en creux ou en relief. Les premières sont généralement réalisées à l'aide d'un couteau ou tout autre instrument tranchant, les autres sont faites en soulevant la peau puis en insérant des matériaux qui vont boursouffler la peau lors de la cicatrisation et l'empêcher de se refermer. Une substance est généralement appliquée (du charbon par exemple) sur la plaie afin de la colorer. Les hommes et le femmes sont indifféremment concernés :
Sur le visage des femmes comme des hommes, sont réalisées des modifications permanentes ou temporaires. Des scarifications faciales sont pratiquées tant chez les femmes que chez les hommes ; elles prennent cependant chez la femme des proportions plus grandes avec un souci esthétique plus grand. Ces scarifications faciales, de dimensions variables, sont pratiquées soit sur les tempes - elles sont de petites dimensions chez les Peuls, les Toucouleurs et les Sarakolés, et peuvent aller des tempes au menton chez les Mossi, les Haoussa et les Bambara ; il s’agit alors de véritables balafres -, soit sous les yeux et sur les joues. Selon leurs dimensions et leur situation sur le visage, il est possible de classer les individus dans une catégorie ethnique et sociale déterminée. Leur caractère esthétique, à base de symbolisme, est très net dans certains cas. Les scarifications, selon certains témoignages, ont d’autres fonctions. (source : Sur l'esthétique de la femme africaine, Abdou SYLLA, Ethiopiques, 1985).
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