influence de Jane Austen sur les soeurs Brontë
LANGUES ET LITTÉRATURES
+ DE 2 ANS
Le 10/06/2012 à 09h02
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Question d'origine :
Bonjour,
Sait-on si les romans des soeurs Brontë ont été influencés par la lecture de Jane Austen. Connait-on les lectures des ces écrivaines?
Merci!
Réponse du Guichet
bml_litt
- Département : Langues et Littératures
Le 13/06/2012 à 13h26
Bonjour,
Les sœurs Brontë et Jane Austen sont des écrivains au talent singulier qui se reflète dans leurs œuvres, et qui ne laissent personne indifférent. Les lectures de ces femmes ont été comme leurs écrits, originales et hétéroclites.
Jane Austen a précédé de peu les sœurs Brontë (1775-1817). Sa vie aura, comme pour tout auteur, grandement influencé ses œuvres. Ces lectures ont été fortement alimentées par les 500 livres de la bibliothèque paternelle et les lectures à haute voix qui étaient pratiquées dans sa famille. Les livres étaient pour elle un refuge et dès ses jeunes années ont été utiles pour ces déceins de romancière et ses personnages.
Dans la biographie de Jane Austen de Claire Tomalin intitulée Jane Austen, passions discrètes, l’auteur nous dévoile au fil des pages certaines lectures favorites de l’écrivain.
On découvre que Shakespeare a été plusieurs fois cité dans ces correspondances et, que la romancière Fanny Burney (1752-1840), notamment à travers sa principale œuvre Cécilia, lui a appris à corriger ses défauts d’écriture et à correctement orchestrer son dialogue. De plus, Jane Austen lisait beaucoup, la liste de ses lectures est donc titanesque, cependant certaines oeuvres majeures se détachent : les œuvres de Samuel Richardson , dont Sir Charles Grandison, Charlotte Smith avec Histoire et Emmeline : the orphan of the castle, William Cowper (considéré comme le précurseur des romantiques), Maria Edgeworth, Hannah Cowley, Henry Fielding avec Tom Jones, Laurence Sterne avecTristram Shandy et Voyage Sentimental, Boswell James et enfin Samuel Johnson avec Le paresseux, Rasselas et The Rambler.
Jane Austen a aussi aimé d’autres auteurs, et en a côtoyé certains dans sa vie d’écrivain, ce que raconte Maurice Lévy dans Le roman « gothique » anglais 1764-1824. Ainsi elle a tant apprécié The Héroïne d’Eaton Stannard Barett qu’elle en a acquis le manuscrit et en a signé la préface.
Enfin Anne Radcliffe avec Les mystères d’Udolphe et Mary Robinson avec The Widow l’ont inspiré lorsqu’elle s’est essayée au genre gothique.
La fratrie Brontë, Charlotte (1816), Emily (1818), Anne (1820) et Branwell (1817), a connu une enfance similaire à celle de Jane Austen, quant à la formation intellectuelle. Comme ils ont été retirés très tôt du système scolaire suite à des maltraitances, c’est leur père, érudit, qui s’est chargé de leur éducation culturelle.
Les Brontë dévorent elles aussi la bibliothèque paternelle et lisent des classiques comme Homère, Virgile et Horace, la Bible, Bunyan, Milton, les principaux poètes du siècle précédent et de l’époque romantique, surtout Byron, et des romans : Clarissa de Richardson, Evelina de Fanny Burney, les Mille et une nuits, et surtout Walter Scott, qui aura une influence déterminante sur leurs œuvres.
Ainsi Charlotte Brontë traduisait, dès l’âge de 14 ans, La Henriade de Voltaire en anglais.
Un aperçu de leurs goûts littéraires nous est donné dans une lettre de Charlotte dans laquelle elle indique des conseils de lecture à une amie, en 1834 :
«Si tu aimes la poésie, qu’elle soit de toute première qualité : Milton, Shakespeare, Thomson, Goldsmith, Pope (si tu en as envie, car je ne l’admire pas), Scott, Byron, Campbell, Wordsworth et Southey. … En matière d’histoire, lis Hume, Rollin et l’Histoire universelle, si tu y parviens ; je n’ai jamais pu. En matière de fiction, ne lis que Scott ; après les siens aucun roman ne vaut rien.
En matière de biographie, lis La vie des poètes de Johnson, La vie de Johnson de Boswell, La vie de Nelson de Southey, La vie de Burns de Lockhart, La vie de Sheridan de Moore, La vie de Byron [du même], Les œuvres posthumes de Wolfe.
En matière d’histoire naturelle lis Bewick et Audubon, et Goldsmith et L’histoire naturelle de Selbourne de Gilbert White. »
In Wuthering Heights et autres romans.
On peut donc constater que Jane Austen et les Brontë ont eu des lectures, et donc des influences, communes. Jane Austen a, en tant que femme écrivain, ouvert la voie aux sœurs Brontë, mais l’influence sur leur style d’écriture fait toujours l’objet de débats.
Le Magazine littéraire a d’ailleurs consacré un dossier complet aux femmes écrivains anglaises. (n°476, juin 2008) : « les romancières anglaises. De Jane Austen à Zadie Smith », plus particulièrement l’article « Une voix nouvelle » sur les trois auteurs femmes majeurs du XIXe siècle, Jane Austen, les sœurs Brontë et George Eliot.
Le point commun de ces auteurs est d’appartenir à une même famille littéraire, celle des «écrivaines de l’enfermement» qui écrivaient en réaction à la rudesse de la société victorienne envers les femmes.
Voici un extrait de l’article concernant les influences de Jane Austen et des sœurs Brontë :
« Jane Austen annonce l’émergence d’une féminité plus conquérante … »
« Si la subversion reste encore discrète chez Jane Austen, elle éclate davantage chez les sœurs Brontë, très marquées par le courant romantique. … Parmi les romancières du XIXe siècle, les sœurs Brontë expriment au mieux les paroxysmes auxquels peuvent conduire les tensions d’une société qui offre aux femmes si peu de perspectives, et les plonge dans des frustrations dont les seules issues sont parfois les extrêmes de la folie ou de la mort. » «Dans ce panorama, la carrière de George Eliot peut apparaître comme l’aboutissement d’un processus qui a consisté, pour les romancières, à être reconnues d’abord en tant qu’écrivains avant de l’être en tant que femmes. »
Les sœurs Brontë ont influencé ou en tout cas touché d’autres auteurs à leur tour, telle George Eliot, et surtout Virginia Woolf comme le raconte Bernadette Bertrandias dans Jane Eyre, Charlotte Brontë : la parole orpheline.
Enfin, sachez que la Brontë parsonage Museum & Brontë Society peut vous renseigner sur famille Brontë. Ce site est en anglais mais il regorge de précieuses informations sur cette famille, notamment dans la rubrique The Brontës.
Voilà tout ce que nous avons trouvé sur les liens existant entre Jane Austen et les sœurs Brontë, et pour vous détendre nous vous conseillons le visionnage du romantique Jane de Julian Jarrold, de 2007, avec Anne Hathaway dans le rôle de Jane Austen, et du plus dramatique Les sœurs Brontë d’André Techiné, de 1979, avec Isabelle Adjani (Emily), Marie-France Pisier (Charlotte) et Isabelle Huppert (Anne).
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