Question d'origine :
à quoi sert le solfège?
Réponse du Guichet
bml_mus
- Département : Musique
Le 08/02/2013 à 14h05
Les définitions qu’on peut trouver du solfège insistent toutes sur son caractère fondamental. Citons celle du Larousse en ligne :
Discipline qui est la base de l'enseignement musical et qui permet la connaissance et la mémorisation des signes de notation tout en développant l'audition pour une appréciation exacte des sons et des intervalles.
.. et celle du TLFI (trésor de la langue française informatisé) :
Discipline de base de l'enseignement musical consistant à développer la perception des sons et des rythmes ainsi que la connaissance de tout ce qui se rattache aux signes employés pour écrire la musique.
Le mot solfège désigne aussi, selon ces dictionnaires les livres qui traitent de cette discipline, proposent des exercices ; le TLFI ajoute le sens d’ « exercice de pratique musicale qui consiste en la lecture chantée des notes, dont l'exécutant doit respecter la durée, la hauteur, l'intensité et le phrasé. »
Quoi qu’il en soit, c’est la discipline qui est en question ici, discipline au sens de science, matière pouvant faire l’objet d’un enseignement spécifique (TLFI), pas au sens de règle imposée (ibid.)… mais derrière votre question l’on sent bien l’interrogation, voire la protestation d’un enfant soumis à cette discipline et qui ne comprend pas son but.
Soulignons tout d’abord que le solfège tel qu’il est généralement enseigné dans les écoles de musique et conservatoires n’est pas nécessaire pour jouer de la musique : dans beaucoup de musiques traditionnelles, il n’existe pas d’enseignement du solfège : l’apprentissage se fait à partir de l’écoute, de l’imitation et du soutien d’un maître. En rock, rap, électro, jazz, la connaissance du solfège n’est pas indispensable non plus.
En ce qui concerne la musique dite classique, le solfège n’est pas non plus un préalable à l’apprentissage d’un instrument. Dans la méthode Létourneau (présentée par exemple ici), les enfants commencent à se familiariser avec leur instrument par des activités d’éveil souvent basées sur le folklore, des rythmes et chansons connus. L’apprentissage de la lecture de partitions se fait progressivement en même temps que progresse la pratique avec l’instrument. Ce type de fonctionnement n’est plus spécifique d’écoles privées aux méthodes originales.
Les conservatoires et écoles de musique publics l’adoptent de plus en plus alors qu’ils ont longtemps fait d’au moins deux années de solfège un préalable à l’apprentissage d’un instrument. (Voir à ce sujet le témoignage de Catherine Ringer cité par Louis Chrétiennot dans une conférence prononcée à la Bibliothèque de la Part-Dieu à partir de la minute 51). Il y a déjà 15 ans Dominique Vuillemin, professeur de violon en conservatoire soulignait que l’apprentissage du solfège préalablement à la pratique instrumentale était non seulement détesté des enfants, mais inefficace pédagogiquement (dissociant la lecture des notes du son) et absurde (on apprend la lecture dans telle ou telle clé (sol le plus souvent) alors que les clés varient suivant les instruments et que pour certains instruments les notes sont transposées). L’objectif est, selon elle, de décourager les élèves pour éviter qu’il n’y ait plus de candidats que de possibilités d’apprendre un instrument… un bel objectif pédagogique ! (L’apprentissage de la musique : guide à l’attention des parents pages 30-31).
Néanmoins, au bout d’un moment, il devient très difficile de progresser dans une pratique instrumentale, et même de continuer à pratiquer un instrument en musique classique sans savoir lire la musique, et même sans comprendre comment elle est conçue, donc sans notions de théorie de la musique. Ces connaissances sont nécessaires en musique classique, et même de grands musiciens virtuoses ont du mal à s’en passer. Ainsi ceux de l’ensemble Taraf de Haidouks, virtuoses roms de Roumanie qui jouent des musiques tziganes et traditionnelles d’Europe de l’est ont voulu pour leur cinquième disque reprendre des morceaux de musique classique inspirés par des musiques traditionnelles tziganes ou gitanes (Bartok, notamment) et quelques autres. Il s’agit de musiciens de très haut niveau, mais ils ont dû batailler plusieurs jours en réécoutant une interprétation de danses folkloriques roumaines de Bartok pour retrouver à l’oreille de quoi leur permettre de les réinterpréter à leur tour. La connaissance su solfège leur aurait permis de le faire bien plus vite (compte tenu de leur niveau) et sans le filtre d’une première interprétation.
Ils relatent leur expérience dans cette vidéo très intéressante à regarder avant ou après avoir écouté Maskarada, le disque auquel elle a abouti :
Bref, on peut dire que le solfège sert surtout à jouer de la musique classique plus facilement que les musiciens de Taraf de Haidouks même quand on a moins de talent qu’eux.
Discipline qui est la base de l'enseignement musical et qui permet la connaissance et la mémorisation des signes de notation tout en développant l'audition pour une appréciation exacte des sons et des intervalles.
.. et celle du TLFI (trésor de la langue française informatisé) :
Discipline de base de l'enseignement musical consistant à développer la perception des sons et des rythmes ainsi que la connaissance de tout ce qui se rattache aux signes employés pour écrire la musique.
Le mot solfège désigne aussi, selon ces dictionnaires les livres qui traitent de cette discipline, proposent des exercices ; le TLFI ajoute le sens d’ « exercice de pratique musicale qui consiste en la lecture chantée des notes, dont l'exécutant doit respecter la durée, la hauteur, l'intensité et le phrasé. »
Quoi qu’il en soit, c’est la discipline qui est en question ici, discipline au sens de science, matière pouvant faire l’objet d’un enseignement spécifique (TLFI), pas au sens de règle imposée (ibid.)… mais derrière votre question l’on sent bien l’interrogation, voire la protestation d’un enfant soumis à cette discipline et qui ne comprend pas son but.
Soulignons tout d’abord que le solfège tel qu’il est généralement enseigné dans les écoles de musique et conservatoires n’est pas nécessaire pour jouer de la musique : dans beaucoup de musiques traditionnelles, il n’existe pas d’enseignement du solfège : l’apprentissage se fait à partir de l’écoute, de l’imitation et du soutien d’un maître. En rock, rap, électro, jazz, la connaissance du solfège n’est pas indispensable non plus.
En ce qui concerne la musique dite classique, le solfège n’est pas non plus un préalable à l’apprentissage d’un instrument. Dans la méthode Létourneau (présentée par exemple ici), les enfants commencent à se familiariser avec leur instrument par des activités d’éveil souvent basées sur le folklore, des rythmes et chansons connus. L’apprentissage de la lecture de partitions se fait progressivement en même temps que progresse la pratique avec l’instrument. Ce type de fonctionnement n’est plus spécifique d’écoles privées aux méthodes originales.
Les conservatoires et écoles de musique publics l’adoptent de plus en plus alors qu’ils ont longtemps fait d’au moins deux années de solfège un préalable à l’apprentissage d’un instrument. (Voir à ce sujet le témoignage de Catherine Ringer cité par Louis Chrétiennot dans une conférence prononcée à la Bibliothèque de la Part-Dieu à partir de la minute 51). Il y a déjà 15 ans Dominique Vuillemin, professeur de violon en conservatoire soulignait que l’apprentissage du solfège préalablement à la pratique instrumentale était non seulement détesté des enfants, mais inefficace pédagogiquement (dissociant la lecture des notes du son) et absurde (on apprend la lecture dans telle ou telle clé (sol le plus souvent) alors que les clés varient suivant les instruments et que pour certains instruments les notes sont transposées). L’objectif est, selon elle, de décourager les élèves pour éviter qu’il n’y ait plus de candidats que de possibilités d’apprendre un instrument… un bel objectif pédagogique ! (L’apprentissage de la musique : guide à l’attention des parents pages 30-31).
Néanmoins, au bout d’un moment, il devient très difficile de progresser dans une pratique instrumentale, et même de continuer à pratiquer un instrument en musique classique sans savoir lire la musique, et même sans comprendre comment elle est conçue, donc sans notions de théorie de la musique. Ces connaissances sont nécessaires en musique classique, et même de grands musiciens virtuoses ont du mal à s’en passer. Ainsi ceux de l’ensemble Taraf de Haidouks, virtuoses roms de Roumanie qui jouent des musiques tziganes et traditionnelles d’Europe de l’est ont voulu pour leur cinquième disque reprendre des morceaux de musique classique inspirés par des musiques traditionnelles tziganes ou gitanes (Bartok, notamment) et quelques autres. Il s’agit de musiciens de très haut niveau, mais ils ont dû batailler plusieurs jours en réécoutant une interprétation de danses folkloriques roumaines de Bartok pour retrouver à l’oreille de quoi leur permettre de les réinterpréter à leur tour. La connaissance su solfège leur aurait permis de le faire bien plus vite (compte tenu de leur niveau) et sans le filtre d’une première interprétation.
Ils relatent leur expérience dans cette vidéo très intéressante à regarder avant ou après avoir écouté Maskarada, le disque auquel elle a abouti :
Bref, on peut dire que le solfège sert surtout à jouer de la musique classique plus facilement que les musiciens de Taraf de Haidouks même quand on a moins de talent qu’eux.
DANS NOS COLLECTIONS :
Ça pourrait vous intéresser :
Commentaires 0
Connectez-vous pour pouvoir commenter.
Se connecter