Question d'origine :
Bonjour,
Où sont les exemplaires de l'édition princeps, publiée à compte d'auteur, d'Une saison en enfer, d'Arthur Rimbaud ?
En outre, où est actuellement, et qui en est le propriétaire, de l'exemplaire donné par Rimbaud à Verlaine ?
Merci
Guillaume
Réponse du Guichet

Seule œuvre éditée du vivant d’Arthur Rimbaud, Une saison en enfer occupe une place singulière dans l’histoire de l’édition de l’œuvre du poète. Rimbaud l’a en effet publiée en 1873 à compte d’auteur avec le soutien financier de sa mère. Imprimée à Bruxelles par M. J. Poot sous la raison sociale Alliance typographique, cette plaquette de 53 pages ne fut jamais commercialisée en raison du défaut de paiement de l’auteur à l’égard de l’éditeur.
Alors que commençait à prendre forme une légende selon laquelle l’auteur aurait détruit de lui-même cette édition dans la cheminée familiale, on retrouva en 1901 dans les caves de l’imprimeur Poot les caisses comprenant les quelques 500 exemplaires du tirage. Conscient de l’opportunité de réaliser une belle opération financière, l’avocat et bibliophile belge Léon Lossau acheta à bas prix les ouvrages afin de les revendre avec une belle plus-value.
Ce collectionneur avisé est par ailleurs l'auteur d'une étude sur la question, La légende de la destruction par Rimbaud de l'édition princeps de "Une saison en enfer", publiée à Bruxelles en 1916.
Les exemplaires en main privée se négocient de nos jours entre 15 000 et 20 000 euros pièce en vente publique.
Certains de ces ouvrages sont conservés dans des collections publiques comme le Musée Rimbaud de Charleville-Mézières ou à la Bibliothèque nationale de France (cote Rés. P. Z. 1197, avec renvoi vers l'exemplaire numérisé dans Gallica).
Du petit nombre d’exemplaires remis à Rimbaud en octobre 1873, le poète en distribua six à ses amis Ernest Delahaye, Jean-Louis Forain, Ernest Millot, Jean Richepin, Raoul Ponchon et Paul Verlaine.
Ce dernier exemplaire de l’édition princeps d’Une saison en enfer est le seul qui comporte un envoi autographe de Rimbaud, sous la forme suivante : « A P. Verlaine, A. Rimbaud. » Il est possible de voir sur un site consacré aux autographes cet envoi de Rimbaud à Verlaine (notice n° 116).
Cet exemplaire passa ensuite des mains de Paul Verlaine à celles de Frédéric-Auguste Cazals puis de Louis Barthou, ministre des Affaires étrangères assassiné en 1934 au cours de l’attentat contre le roi Alexandre Ier de Yougoslavie. L’exemplaire fut vendu en 1935 lors de la succession du défunt ministre (n°850 du catalogue de la vente) et acquis par le libraire Pierre Berès, lequel l’avait toujours en sa possession en 1954, année au cours de laquelle il l’a prêté à la Bibliothèque nationale à l’occasion d’une importante exposition consacrée à Rimbaud.
Plus d’un demi-siècle plus tard, en 2006, fort âgé, Berès se séparait de sa collection au cours d’une vente aux enchères spectaculaire. L’exemplaire fut vendu 440 000 € (sans les frais) au bibliophile français Pierre Leroy, devenant à l’époque le livre le plus cher de la littérature française. Il se trouve toujours, sauf erreur de notre part, dans la collection Leroy.
On peut lire le récit de l’histoire de cet exemplaire d’Une saison en Enfer dans un article documenté de Jérôme Dupuis publié sur le site de l’Express.
En complément d'information, la valeur marchande d’un des six exemplaires offerts par Rimbaud, celui donné au peintre Jean-Louis Forain, était estimée entre 100 000 et 120 000 francs lors de la vente aux enchères en mars 1998 de la collection de Jean Hughes, son dernier propriétaire à cette date.
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