Question d'origine :
En admettant qu’un homme soit aussi grand que Shaquille O’Neal, qu’il soit aussi rapide que Usain Bolt, qu’il ait autant de détente que Michael Jordan ou Javier Sotomayor, qu’il ait autant d’élasticité que Nadia Comaneci et qu’il ait, enfin, autant de puissance musculaire qu’un champion olympique d’haltérophilie.
Franchement, il serait pas trop fort?
Quels seraient ses records dans les disciplines suivantes :
100m
Saut en longueur
Saut en hauteur?
Merci!
Réponse du Guichet

Bonjour,
Si l’homme dont vous parlez est aussi rapide qu'Usain Bolt… gageons qu’il égalera ses records (une grande taille et une importante musculature… ne conditionneront pas une rapidité plus importante…) sur le 100 m.
Une étude menée sur Les déterminants mécaniques de la performance au 100 m démontre une plus grande importance des variables associées à la vitesse plutôt qu'à la force.
Pour les autres disciplines que vous mentionnées, les records de saut en hauteur et saut en longueur auraient bien besoin d’un tel athlète puisqu’ils n’ont pas été dépassés depuis plus de 20 ans !
Les recherches en biomécanique tentent d’expliquer les performances sportives et les facteurs d’évolution des records. Vous trouverez ainsi du TPE au mémoire de thèse, des analyses scientifiques chiffrés des records d’un sportif idéal.
Ainsi un TPE sur le saut en hauteur en appliquant des principes de biomécanique à la technique de Fosbury souligne que ce dernier « aurait pu sauter jusqu'à 4,13m grâce à ses caractéristiques mais si et seulement si la totalité de son énergie potentielle se transformait en énergie cinétique.
Propos également nuancés par une thèse de doctorat de 2009 sur Les capacités mécaniques des membres inférieurs et mouvements explosifs.
(Par conséquent), pour sauter haut, il faut présenter une puissance maximale des
membres inférieurs importante et un profil force-vitesse optimal.
variations de profil force-vitesse
Tout ne tient donc peut-être qu'à la puissance des quadriceps...
Dix secondes aux 100 mètres, six mètres au saut à la perche, neuf mètres au saut en longueur, etc. : les athlètes du sprint et des sauts nous stupéfient. Et les haltérophiles donc qui soulèvent plus de deux fois leur poids !
Source: Aussi vite, aussi haut, aussi fort, Pour la science, octobre 2005.
En fait, le super athlète que vous nous présentez ne semble malheureusement pas à l’ordre du jour… C’est en tout cas l’avis du directeur de l'Institut de recherche biomédicale et d'épidémiologie du sport (IRMES/INSEP), Jean-François Toussaint :
Nous avons mené depuis 3 ans maintenant une série d’études sur l’ensemble des disciplines quantifiables, celles sur lesquelles le fait est établi par la mesure de l’homme (bien qu’elle n’en soit qu’une infime partie, évidemment). Ces études montrent que les records du monde ont eu, au tout début de l’ère Olympique (1896 à 1914), une part de progression où les gains entre chacun des records étaient extrêmement importants, puis une phase d’accélération un peu moindre entre les deux guerres ; enfin la dernière période, après la seconde guerre mondiale, montre que la distance entre chacune des marques établies est de plus en plus faible et le temps entre chacun des records devient de plus en plus long, bref que les records se raréfient. (...)
Dans cette compétition (les jeux olympiques), introduite et réglementée depuis 1896, par Pierre de Coubertin notamment, l’homme ne va pas suivre une évolution au sens darwinien du terme mais simplement l’optimisation de ses capacités physiologiques et de ses capacités d’espèce : l’augmentation de sa taille, de son poids et de sa masse musculaire. On le suit sur l’ensemble des sociétés américaine, européenne, asiatique, africaine. Ceci n’est simplement que l’expression maximale d’un génome qui remonte à plusieurs dizaines de milliers d’années. Il n’y a donc pas d’intégration de nouvelles mutations, mais la recherche et l’exploitation, par le biais du développement économique, du maximum de nos capacités du moment.
(….)
On va chercher les sportifs les plus grands pour jouer au basket ou au volley, ceux qui présentent une association de gènes (on emploie le terme scientifique de co-ségrégation génomique) qui favorisent à la fois la taille, l’expression des isoformes musculaires et la rapidité enzymatique (Usain Bolt). Mais au sein de ce groupe des coureurs rapides, prédomineront ceux qui sont aussi capables de résister aux charges d’entrainement et qui ont psychologiquement d’autres avantages, tels que des capacités de résilience par rapport à ce que deviennent les contraintes du haut niveau. On constate donc une sélection, qui est à la base du regroupement, mais pas du tout une évolution au sens darwinien.
Sources: Limites humaines et adaptation, site de l'INSEP.
Que révèle l’étude de l’évolution des records ?, vidéo en ligne sur le site Universcience.
D’autres facteurs entrent en jeu comme les conditions météo... ainsi en ce qui concerne Usain Bolt, les chercheurs ont déduit (de ces mesures) le coefficient de traînée du sprinter, à savoir le paramètre qui quantifie sa facilité à pénétrer dans l'air. Ils arrivent à la conclusion peu surprenante qu'Usain Bolt n'est pas l'être humain le plus aérodynamique au monde. Sa taille, plus d'1 mètre 90, le laissait présager. Cela veut aussi dire que l'athlète jamaïcain est très sensible aux conditions atmosphériques.
Source: Le record du monde d'Usain Bolt étudié par la science
... et le mental (voir l'article La force du mental de Cerveau et psycho), juin 2005 !
Ces références complémentaires pourraient également vous intéresser :
- Biomécanique du sport et de l’exercice, De Boeck, 2010.
- Physiologie du sport, bases physiologiques des activités physiques et sportives, Hugues Monod, Roland Flandrois, Henry Vandewalle, 2007, Elsevier Masson.
- Physiologie du sport et de l'exercice: adaptations physiologiques à l'exercice physique, D. L. Costill, J. H. Wilmore, De Boeck, 2006.
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