Question d'origine :
Bonjour, Après avoir étudié le XIXe siècle, j'ai appris que les canuts de Lyon avaient connu diverses révoltes qui engendrèrent beaucoup de morts. J'aimerais savoir qu'est devenu ce métier pendant le XXe siècle. Merci de vos informations.
Réponse du Guichet
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- Département : Documentation régionale
Le 03/02/2015 à 09h04
Bonjour,
Votre question interroge la définition du mot canut. Voici une synthèse que la bibliothèque a écrit au sujet des canuts, où l'on trouve cette définition :
« Canut : Le terme de canut apparaît, semble-t-il, pour la première fois, en 1805, et est usité uniquement à la Croix-Rousse.
A ce sujet, l'outil de travail du canut est central dans l'évolution de sa condition. Le métier à bras va évoluer du métier « à la tire », pour passer « à la grande tire ». La révolution industrielle combinée à des améliorations et certaines innovations va aboutir à la mécanisation des métiers autour de 1870. Les métiers sont dorénavant alimentés par la force hydraulique ou par des machines à vapeur dans les grandes usines ; le rendement peut être quadruplé.
La mécanisation fait entrer les femmes dans les usines de tissage, car les métiers à bras étaient trop lourds à manipuler auparavant. La main d'oeuvre féminine sera même recherchée par les industriels.
Et c’est là que le métier de canut va connaître une transition majeure, au tournant du 19è au 20è siècles. Les hommes qui manipulaient les métiers à bras auparavant deviennent « gareurs » : ils entretiennent les machines, sont contremaîtres ou surveillent la production.
La première moitié du 19è siècle était le moment où la concentration de travailleurs de la soie à Lyon est le plus importante de l’histoire de la ville. Voici une question du Guichet du savoir sur la densité de l'habitat à la Croix-Rousse. Après les révoltes, les marchands fabricants auront soin de délocaliser la fabrication de la soie à l’extérieur de la ville. En somme, dès 1860, de petites fabriques ou de grandes usines aux règlements très strictes vont se développer dans les alentours de Lyon.
A l’image de l’usine-pensionnat de Jujurieux, sur laquelle la bibliothèque possède plusieurs ouvrages, dont C. J. Bonnet : images de la soierie lyonnaise anciennes et nouvelles à Jujurieux, Ain.
Dans l’ouvrage L'aventure textile en Rhône-Alpes, de Valérie Huss, deux positions sont alors décrites :
> « La remise en cause du statut des canuts qui en découle ne sera jamais acceptée par ces derniers, qui s’appuieront sur leur extraordinaire savoir-faire pour conserver le monopole du tissage des grands façonnés. » Le façonné est un tissu dont le motif est réalisé dans la trame du tissu. La fabrication des tissus les plus précieux par les canuts de Lyon demeurera un monopole pendant encore quelques décennies.
> « Les paysans accueillent avec enthousiasme ce travail qui limite l’exode vers les centres urbains et l’éclatement des familles ».
La seconde révolution industrielle bouleverse également par l'arrivée de l’électricité, dans les années 1920. Elle permet l’alimentation individuelle en énergie des métiers. Le travail à domicile qui s’était écroulé est revitalisé, avec des ateliers familiaux qui comptent jusqu’à une trentaine de métiers.
Dans l'ouvrage L'aventure textile en Rhône-Alpes (Valérie Huss ), « La Fabrique lyonnaise organise alors sa production sous deux formes : l’une, artisanale, dans les fermes de la région utilisant une main d’œuvre peu coûteuse mais dispersée ; l’autre, industrielle, regroupant métiers et ouvriers dans de grandes manufactures et de usines-pensionnats. Les fabricants restent à Lyon et se concentrent à la Croix-Rousse et aux Terreaux ».
Dans les environs de Lyon, les villes se spécialisent : rubanerie et passemanterie à Saint-Etienne, belles soieries à Charlieu, velours à Voiron et dans l’Est lyonnais, draperie à Vienne, teinture et mousseline à Tarare, tricotage à Roanne, ennoblissement (teinture, impression, apprêt) à Bourgoin-Jallieu et à Tournon. Les tissus unis continuent d’être fabriqués dans les ateliers familiaux et Lyon se spécialise dans les colorants. Autour de ces villes, l’activité peut rayonner jusqu'à plus de 50km.
Aujourd’hui à Lyon, parmi les héritiers de la tradition des canuts, certains utilisent encore des métiers à bras :
- La Maison des canuts fabrique encore de la soie avec des métiers à bras (cinq métiers) ;
- La manufacture Prelle utilise des métiers à tisser à bras et mécanique ;
- La maison Tassinari et Châtel fait fonctionner des métier à bras dans Lyon et mécaniques à Panissières (Loire)
- L'atelier Soierie Saint-Georges fabrique des soieries à motifs simples avec des métiers à bras.
En Rhône-Alpes, certaines entreprises fabriquent de la soie de manière plus industrielle, à Vaulx-en-Velin, dans la Loire et en Isère. Mais il est important de comprendre que les canuts considéraient leur travail comme de type industriel et non artisanal. Leur journal, L'Echo de la fabrique, en témoigne (voyez le titre).
Les historiens de la condition des canuts qualifie d'ailleurs leur travail de proto-industriel. Ces entreprises sont-elles donc aussi héritières du métier des canuts ?
Pour découvrir les sites historiques de textile en Rhône-Alpes, nous conseillons de regarder la carte Textile et mode en Rhône-Alpes : des patrimoines à découvrir.
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