Question d'origine :
bonjour
pouvez vs me dire si le métier de cordonnier était le même que de nos jours entre 1650 et 1750 environ
merci
Réponse du Guichet
Le 19/02/2015 à 16h14
Bonjour,
La Revue de la santé au travail propose une histoire de la cordonnerie depuis les prémices de la chaussure à nos chaussures actuelles.
Pour le XVIIe siècle :
« A partir de 1650, les hommes comme les femmes portaient de fins souliers sans talons, fermés sur le coup de pied mais dont la fragilité imposait le port de patins de bois, les protégeant ainsi des souillures de la rue. Les paysans quant à eux portaient des heuses de toile et des souliers grossiers. Les heuses, jambières sans pied ou bottes dans certains cas, formaient avec les brogues, semelles de cuir lacées autour de la jambe, un élément essentiel du costume paysan.
La botte, souci particulier des élégants, avait des formes gracieuses, comme en rapportaient des anecdotes piquantes. Par ailleurs elle a inspiré des vers, des contes, comme en témoignent les souvenirs attendris de notre enfance où l’on nous contait cette histoire du Petit Poucet avec celle du Chat Botté et de Cendrillon.
Dès les premières années du règne d’Henri IV, les fragiles « eschappins » de la Renaissance disparaissent. Ils sont remplacés par de solides souliers dont le dessus dépasse légèrement la semelle. La grande nouveauté de ce soulier résidait dans l’apport du talon qui fit incliner le pied et qui, jusque-là, était strictement réservé à la botte de cheval. L’absolutisme royal parut même un jour s’incarner dans une paire de bottes, car ce fut en bottes de chasse et le fouet à la main que Louis XIV vint signifier ses volontés au Parlement de Paris. Les souliers, quant à eux, eurent toujours une apparence plus pacifique et plus mondaine. Ceux qui étaient portés à la Cour de France sous l’ancienne monarchie étaient de véritables chefs-d’oeuvre. Louis XIV honora-t-il ainsi le mérite de la corporation des cordonniers en nommant l’un d’entre eux, le sieur LESTAGE établi à Bordeaux à l’enseigne du loup botté, au rang de cordonnier royal et lui donna des armes parlantes : d’azur à la botte d’or couronnée avec une fleur de lys de chaque côté.
Les cordonniers étaient placés sous les confréries des glorieux Saint Crespin et Saint Crespinie, dont les statuts et règlements remontaient au 15e siècle, et firent l’objet de notables modifications. Suite à ces dispositions, au sein même de la corporation des cordonniers, comme celles d’autres métiers, il se forma peu à peu une sorte d’aristocratie à Paris comme en Province. »
Pour le XVIIIe siècle :
« A cette époque, les hommes n’osent plus porter de souliers fins à boucle, de peur d’être catalogués d’aristocrates. Les gens du peuple portent en général des sabots.
Si la chaussure campagnarde reste et restera encore longtemps le sabot, la chaussure portée par le peuple des villes est, pour les hommes une chaussure de gros cuir noir dont la forme s’inspire des chaussures élégantes. Les femmes élégantes, sous Louis XVI, voient leur marche devenir parfois impossible, ayant besoin de se caler avec une haute canne. « Sans cet effort pour reporter le corps en arrière, la poupée serait tombée sur le nez » dit l’irrévérencieux comte de VAUBLAN dans ses mémoires.
En 1786, les souliers étaient luxueux à l’excès, brodés de diamants : c’était un écrin.
Le Directoire avec les Incroyables et les Merveilleuses apporta un instant l’excentrique mode des souliers à cothurnes dont les lacets enroulés symétriquement sur la jambe découverte de la femme, rappelaient les chaussons du Moyen Age. L’homme préférait l’élégante botte Anglaise. En effet, la botte devenait de plus en plus la chaussure générale, civile ou militaire, chaussure de tout homme ayant un rang dans la société.
C’est à ce moment que commença un demi siècle de triomphe pour la botte. Grande et robuste, ou petite et souple, de toutes formes, décorée ou simple, noire ou de couleur, on la fêta, on la chanta. L’expression du désir de porter des souliers à l’égard de l’homme élégamment botté fut la revanche populaire, signe de jalousie, donc d’envie. On inventa des formes variées et des noms spéciaux : bottes à la hussarde, à la prussienne, à l’écuyère, à la gendarme, à la cavalière, des pages, des postillons, de chasse...
Seuls les « sans culotte » et les « va-nu-pieds » avaient conservé l’usage du soulier grossier et lourd. »
Les XIXe et XXe siècles vont apporter de nombreuses modifications au monde de la cordonnerie avec l’arrivée de la mécanisation. Le travail des cordonniers va s’en trouver fortement impacté.
Au XIXe siècle, « être cordonnier, à cette époque, c’était non seulement réparer les chaussures, mais aussi fabriquer des souliers neufs. C’était dans une échoppe souvent étroite que cet artisan exerçait son métier. Là y foisonnaient des outils parfois curieux comme : une grosse pierre lisse servant à battre le cuir, un « pied de fer », une petite enclume à pied en bois serrée entre les genoux et une grande pince à monter, un pied à coulisse gradué en points, un marteau avec aspect bossu...
A partir de 1850, dans certaines villes comme Romans (Drôme), pendant plus d’un siècle, la production de chaussures fut l’activité quasi exclusive. De nombreuses tanneries et mégisseries y étaient implantées depuis quatre siècles. D’artisanale, la production de chaussures se développa pour devenir industrielle avec la généralisation de l’électricité. »
Au XXe siècle, les modèles de chaussures vont évoluer apportant plus de confort, elles feront l’objet d’attentions et seront apportées régulièrement chez le cordonnier :
« Dans l’entre-deux-guerres, les sabots étaient encore utilisés dans certaines régions et pour certains travaux. Les bottes en caoutchouc n’existaient pas encore. Sinon le port de chaussures en cuir s’était généralisé. Les brodequins étaient des chaussures montantes avec lacets, semelles en cuir épais cloutées avec trois sortes de pointes. Il y avait des souliers bas avec cuir plus souple et semelle plus fine, recouverte parfois par une semelle en caoutchouc et pour les sorties, des souliers vernis.
Quand les souliers étaient, soit usés, soit abîmés, contrairement à aujourd’hui on ne les jetait pas, on les portait chez le cordonnier, pour les ressemeler, les recoudre, ou y mettre des pièces. Les chaussures de l’époque n’étaient pas toujours très confortables à porter.
Au fil du temps, les chaussures ont évolué. Désormais, on parle de chaussures, mais aussi de souliers, faits de cuir, plastique, tissus, simili, etc. Il y a des chaussures dites « chaussures thérapeutiques », des chaussures de sécurité, des baskets, des chaussures de montagne, la chaussure talon aiguille, l’escarpin, la chaussure collège, etc. « Un pied bien chaussé est un pied en sécurité ». »
Désormais, on fait moins appel au savoir-faire des cordonniers qui ont été obligés de se diversifier pour garder leur activité :
« La profession s’est considérablement transformée depuis une trentaine d’années. Aujourd’hui on ne trouve quasiment plus de cordonnier exclusif : ceux-ci se sont diversifiés pour devenir « opérateurs en cordonnerie et multiservices » ; et la fabrication de chaussures ne relève plus du cordonnier mais du bottier ou de la fabrication industrielle.
A l’échelle nationale, on recensait 3 825 cordonneries traditionnelles en 2005.
Le métier de l’opérateur en cordonnerie et multiservices consiste à ajouter à son activité principale centrée sur la chaussure, des activités annexes dites de multiservices, telle que la vente d’accessoires (lacets, cirages, chausse-pied, formes, chaussons, chaussures...), la reproduction de clés, l’affûtage, la gravure (plaques minéralogiques, plaques professionnelles, cartes, gravures, tampons...), la photocopie... »
Vous trouverez d’autres renseignements sur le site France pittoresque.
Vous pouvez aussi consulter ce joli livre, Histoire des cordonniers, issu de la bibliothèque de travail daté de 1948.
Bonne journée.
La Revue de la santé au travail propose une histoire de la cordonnerie depuis les prémices de la chaussure à nos chaussures actuelles.
Pour le XVIIe siècle :
« A partir de 1650, les hommes comme les femmes portaient de fins souliers sans talons, fermés sur le coup de pied mais dont la fragilité imposait le port de patins de bois, les protégeant ainsi des souillures de la rue. Les paysans quant à eux portaient des heuses de toile et des souliers grossiers. Les heuses, jambières sans pied ou bottes dans certains cas, formaient avec les brogues, semelles de cuir lacées autour de la jambe, un élément essentiel du costume paysan.
La botte, souci particulier des élégants, avait des formes gracieuses, comme en rapportaient des anecdotes piquantes. Par ailleurs elle a inspiré des vers, des contes, comme en témoignent les souvenirs attendris de notre enfance où l’on nous contait cette histoire du Petit Poucet avec celle du Chat Botté et de Cendrillon.
Dès les premières années du règne d’Henri IV, les fragiles « eschappins » de la Renaissance disparaissent. Ils sont remplacés par de solides souliers dont le dessus dépasse légèrement la semelle. La grande nouveauté de ce soulier résidait dans l’apport du talon qui fit incliner le pied et qui, jusque-là, était strictement réservé à la botte de cheval. L’absolutisme royal parut même un jour s’incarner dans une paire de bottes, car ce fut en bottes de chasse et le fouet à la main que Louis XIV vint signifier ses volontés au Parlement de Paris. Les souliers, quant à eux, eurent toujours une apparence plus pacifique et plus mondaine. Ceux qui étaient portés à la Cour de France sous l’ancienne monarchie étaient de véritables chefs-d’oeuvre. Louis XIV honora-t-il ainsi le mérite de la corporation des cordonniers en nommant l’un d’entre eux, le sieur LESTAGE établi à Bordeaux à l’enseigne du loup botté, au rang de cordonnier royal et lui donna des armes parlantes : d’azur à la botte d’or couronnée avec une fleur de lys de chaque côté.
Les cordonniers étaient placés sous les confréries des glorieux Saint Crespin et Saint Crespinie, dont les statuts et règlements remontaient au 15e siècle, et firent l’objet de notables modifications. Suite à ces dispositions, au sein même de la corporation des cordonniers, comme celles d’autres métiers, il se forma peu à peu une sorte d’aristocratie à Paris comme en Province. »
Pour le XVIIIe siècle :
« A cette époque, les hommes n’osent plus porter de souliers fins à boucle, de peur d’être catalogués d’aristocrates. Les gens du peuple portent en général des sabots.
Si la chaussure campagnarde reste et restera encore longtemps le sabot, la chaussure portée par le peuple des villes est, pour les hommes une chaussure de gros cuir noir dont la forme s’inspire des chaussures élégantes. Les femmes élégantes, sous Louis XVI, voient leur marche devenir parfois impossible, ayant besoin de se caler avec une haute canne. « Sans cet effort pour reporter le corps en arrière, la poupée serait tombée sur le nez » dit l’irrévérencieux comte de VAUBLAN dans ses mémoires.
En 1786, les souliers étaient luxueux à l’excès, brodés de diamants : c’était un écrin.
Le Directoire avec les Incroyables et les Merveilleuses apporta un instant l’excentrique mode des souliers à cothurnes dont les lacets enroulés symétriquement sur la jambe découverte de la femme, rappelaient les chaussons du Moyen Age. L’homme préférait l’élégante botte Anglaise. En effet, la botte devenait de plus en plus la chaussure générale, civile ou militaire, chaussure de tout homme ayant un rang dans la société.
C’est à ce moment que commença un demi siècle de triomphe pour la botte. Grande et robuste, ou petite et souple, de toutes formes, décorée ou simple, noire ou de couleur, on la fêta, on la chanta. L’expression du désir de porter des souliers à l’égard de l’homme élégamment botté fut la revanche populaire, signe de jalousie, donc d’envie. On inventa des formes variées et des noms spéciaux : bottes à la hussarde, à la prussienne, à l’écuyère, à la gendarme, à la cavalière, des pages, des postillons, de chasse...
Seuls les « sans culotte » et les « va-nu-pieds » avaient conservé l’usage du soulier grossier et lourd. »
Les XIXe et XXe siècles vont apporter de nombreuses modifications au monde de la cordonnerie avec l’arrivée de la mécanisation. Le travail des cordonniers va s’en trouver fortement impacté.
Au XIXe siècle, « être cordonnier, à cette époque, c’était non seulement réparer les chaussures, mais aussi fabriquer des souliers neufs. C’était dans une échoppe souvent étroite que cet artisan exerçait son métier. Là y foisonnaient des outils parfois curieux comme : une grosse pierre lisse servant à battre le cuir, un « pied de fer », une petite enclume à pied en bois serrée entre les genoux et une grande pince à monter, un pied à coulisse gradué en points, un marteau avec aspect bossu...
A partir de 1850, dans certaines villes comme Romans (Drôme), pendant plus d’un siècle, la production de chaussures fut l’activité quasi exclusive. De nombreuses tanneries et mégisseries y étaient implantées depuis quatre siècles. D’artisanale, la production de chaussures se développa pour devenir industrielle avec la généralisation de l’électricité. »
Au XXe siècle, les modèles de chaussures vont évoluer apportant plus de confort, elles feront l’objet d’attentions et seront apportées régulièrement chez le cordonnier :
« Dans l’entre-deux-guerres, les sabots étaient encore utilisés dans certaines régions et pour certains travaux. Les bottes en caoutchouc n’existaient pas encore. Sinon le port de chaussures en cuir s’était généralisé. Les brodequins étaient des chaussures montantes avec lacets, semelles en cuir épais cloutées avec trois sortes de pointes. Il y avait des souliers bas avec cuir plus souple et semelle plus fine, recouverte parfois par une semelle en caoutchouc et pour les sorties, des souliers vernis.
Quand les souliers étaient, soit usés, soit abîmés, contrairement à aujourd’hui on ne les jetait pas, on les portait chez le cordonnier, pour les ressemeler, les recoudre, ou y mettre des pièces. Les chaussures de l’époque n’étaient pas toujours très confortables à porter.
Au fil du temps, les chaussures ont évolué. Désormais, on parle de chaussures, mais aussi de souliers, faits de cuir, plastique, tissus, simili, etc. Il y a des chaussures dites « chaussures thérapeutiques », des chaussures de sécurité, des baskets, des chaussures de montagne, la chaussure talon aiguille, l’escarpin, la chaussure collège, etc. « Un pied bien chaussé est un pied en sécurité ». »
Désormais, on fait moins appel au savoir-faire des cordonniers qui ont été obligés de se diversifier pour garder leur activité :
« La profession s’est considérablement transformée depuis une trentaine d’années. Aujourd’hui on ne trouve quasiment plus de cordonnier exclusif : ceux-ci se sont diversifiés pour devenir « opérateurs en cordonnerie et multiservices » ; et la fabrication de chaussures ne relève plus du cordonnier mais du bottier ou de la fabrication industrielle.
A l’échelle nationale, on recensait 3 825 cordonneries traditionnelles en 2005.
Le métier de l’opérateur en cordonnerie et multiservices consiste à ajouter à son activité principale centrée sur la chaussure, des activités annexes dites de multiservices, telle que la vente d’accessoires (lacets, cirages, chausse-pied, formes, chaussons, chaussures...), la reproduction de clés, l’affûtage, la gravure (plaques minéralogiques, plaques professionnelles, cartes, gravures, tampons...), la photocopie... »
Vous trouverez d’autres renseignements sur le site France pittoresque.
Vous pouvez aussi consulter ce joli livre, Histoire des cordonniers, issu de la bibliothèque de travail daté de 1948.
Bonne journée.
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