Question d'origine :
bonjour,
il paraîtrait que les clous sur des portes notamment médiévales (prisons) ont une signification particulière
en savez-vous davantage ?
Merci
Réponse du Guichet

Bonjour,
Nous n’avons pas trouvé de signification particulière pour les clous des portes des prisons médiévales.
En lisant Gérard Monnier dans La porte : instrument et symbole on peut voir que ce modèle de porte à clous est assez traditionnel depuis le monde gréco-romain, et correspond à la construction des portes dites portes d’assemblage avec montants et traverses ou vantail à hais jointifs (voir le détail p. 54 ). Il est précisé : « Des clous de fer forgé, soit à tête apparente à l’extérieur, soit à tête carrée et encastrée, traversent les pentures, les planches et les traverses, leur pointe étant rabattue à l’intérieur. »
Plus loin dans le livre et plus tard dans l’histoire :
« Les portes de sureté :
Dans les constructions militaires, dans les prisons et dans les cachots, et aussi dans les bâtiments qui protègent les trésors ecclésiastiques, les techniques de construction s’adaptent au besoin d’une résistance accrue. […] A partir du XIVe siècle, semble-t-il, et en relation avec une production de fer plus importante, le blindage complet de la porte peut être envisagé. En France, les exemples connus sont surtout liés à des édifices fortifiés […] des bandes de fer de 2 à 3 mm d’épaisseur recouvrent la face extérieure de la porte, en se chevauchant les unes les autres, et en faisant retour sur l’épaisseur de vantail ; les clous à tête ronde traversent le bois et sont recourbés au dos du vantail ; horizontales, elles croisent et renforcent l’assemblage des planches verticales. »
Le renseignement est le même sur la page La ferronerie d’art au Moyen-Age :
« Les clous. - L'usage de revêtir les vantaux des portes de clous décoratifs remonte à l'antiquité gréco-romaine; tout le monde connaît les beaux clous à têtes ciselées du Panthéon à Rome. Au Moyen Age, les clous ne jouaient pas seulement un rôle décoratif, mais ils servaient aussi à fixer les pentures: La tige divisée en deux pointes était rivée sur les traverses en serrant ainsi les planches des huis. Ces clous affectaient une grande diversité de formes suivant leur grosseur et leur saillie. Ils étaient en pointes de diamant, refendues et à facettes (fig. 4 CD), en graines (E), en gouttes de suif, en forme de cône tronqué formant quatre feuilles ou simplement coniques (AB). Quelquefois ces clous sont recouverts d'une espèce de capsule en cuivre ajustée après coup. Certains comportaient une facette médiane indiquant où le marteau devait frapper pour ne pas écraser la tête; mais l'on croit que les petits masques qui ornaient quelquefois ces clous étaient adaptés lorsqu'ils étaient enfoncés. Sans cela, les figurines auraient été écrasées par le marteau. »
On peut cependant penser que l'aspect de la porte renforce alors le sentiment d'enfermement et que ces rangées de clous sont faites pour impressionner le prisonnier :
"La porte se distingue de certains objets architecturaux par la force symbolique qu’elle dégage. En matière carcérale, la porte fonde la prison dans son idée même. C’est la porte qui se referme à la fois derrière et sur l’individu condamné. L’expression « taule » pour désigner la prison apparaît d’ailleurs au cours du XIXe siècle (Rey, 2006) lorsque la taule remplace le bois et le fer pour la construction des portes de cellules. Ce sont les portes d’entrées des prisons qui sont le plus souvent marquées symboliquement, telles des forteresses (lourdes portes cloutées, surmontées parfois d’une maxime ou d’un symbole de la justice), pour impressionner, intimider, tourmenter."
La prison de murs troués, David Scheer, Champ Pénal, vol. XI, 2014.
On peut par ailleurs trouver de nombreuses portes cloutées dans les maisons paysannes, ou dans le monde arabo-musulman. Les clous peuvent alors prendre une valeur décorative ou symbolique.
« Au Moyen-Âge, des clous fixés aux entrées des maisons protégeaient les habitants et les animaux des sortilèges. Plantés en forme de croix, ils garantissaient prospérité et bonheur. Les clous provenant d'un cercueil chassaient les fantômes; les Romains le croyaient déjà. Pendant la première guerre mondiale, les soldats suspendaient fréquemment sur leurs baraquements de gros clous recourbés, provenant de fer à cheval en guise de porte-bonheur. Trouver un clou sur son chemin porte bonheur, à condition de le ramasser et de le conserver dans sa poche droite ou de le planter dans la porte de sa cuisine, dans le chambranle, du côté où se trouve la serrure et à la hauteur des yeux. Les joueurs sont heureux d'en ramasser un qui soit rouillé. Dans un théatre, si le machiniste oublie des clous sur la scène, la pièce est assurée de connaitre le succés. »
Page en ligne : Mes miniatures, article Le clou porte-bonheur.
Voir aussi : Dictionnaire des superstitions, Jean-Michel Pedrazzani, article Clou ou le Guide des superstitions, Pierre Canavaggio, article Clous en ligne sur Google Livres
« En Estonie, on plante trois clous de fer à cheval sur le seuil de la porte. De même en Argovie, le vendredi saint, sur la porte de l'étable pour préserver le bétail. En France même, on plante des clous sur les portes des maisons et des étables pour préserver bêtes et gens des maléfices. En Tunisie les portes sont décorées d'arabesques formées de têtes de clous dans le même but. En Sicile les tètes de clous sont disposées en croix. »
Les clous votifs, S. Zaborowski, p. 114 et 115.
« Pour déjouer les maléfices dont on peut être la victime, certaines pratiques sont recommandées : frapper trois fois sur la coque des œufs que l'on vient de manger, cracher sur le soulier de son pied droit avant de le chausser, planter sur la porte de sa maison des têtes de clous ou une peau de loup, se laver les mains avec de l'urine, porter sur soi du sel non béni ou de la racine de chicorée arrachée le matin de la Saint-Jean, etc. »
Les superstitions populaires au temps de Louis XIV, François Lebrun, L’Histoire, n° 9, février 1979
« Le clou, comme tout objet pointu ou tranchant en métal ou en fer refoule forces nuisibles et mauvais esprits. En outre, il a le pouvoir « de fixer, d’immobiliser ce qui est immatériel aussi bien que ce qui est matériel, grâce à une vertu de magie imitative. Ce pouvoir de fixation est généralement bienfaisant. Il permet d’arrêter les épidémies, de transférer et d’expulser les maux. En résumé, « planter le clou » équivaut à « expulser le mal ». »
L’article Clou du Livre des superstitions, d’Eloïse Mozzani donne beaucoup d’autres exemples de symbolisme du clou, mais rien qui semble avoir rapport avec les portes de prison …
Bonne journée !
Nous n’avons pas trouvé de signification particulière pour les clous des portes des prisons médiévales.
En lisant Gérard Monnier dans La porte : instrument et symbole on peut voir que ce modèle de porte à clous est assez traditionnel depuis le monde gréco-romain, et correspond à la construction des portes dites portes d’assemblage avec montants et traverses ou vantail à hais jointifs (voir le détail p. 54 ). Il est précisé : « Des clous de fer forgé, soit à tête apparente à l’extérieur, soit à tête carrée et encastrée, traversent les pentures, les planches et les traverses, leur pointe étant rabattue à l’intérieur. »
Plus loin dans le livre et plus tard dans l’histoire :
« Les portes de sureté :
Dans les constructions militaires, dans les prisons et dans les cachots, et aussi dans les bâtiments qui protègent les trésors ecclésiastiques, les techniques de construction s’adaptent au besoin d’une résistance accrue. […] A partir du XIVe siècle, semble-t-il, et en relation avec une production de fer plus importante, le blindage complet de la porte peut être envisagé. En France, les exemples connus sont surtout liés à des édifices fortifiés […] des bandes de fer de 2 à 3 mm d’épaisseur recouvrent la face extérieure de la porte, en se chevauchant les unes les autres, et en faisant retour sur l’épaisseur de vantail ; les clous à tête ronde traversent le bois et sont recourbés au dos du vantail ; horizontales, elles croisent et renforcent l’assemblage des planches verticales. »
Le renseignement est le même sur la page La ferronerie d’art au Moyen-Age :
« Les clous. - L'usage de revêtir les vantaux des portes de clous décoratifs remonte à l'antiquité gréco-romaine; tout le monde connaît les beaux clous à têtes ciselées du Panthéon à Rome. Au Moyen Age, les clous ne jouaient pas seulement un rôle décoratif, mais ils servaient aussi à fixer les pentures: La tige divisée en deux pointes était rivée sur les traverses en serrant ainsi les planches des huis. Ces clous affectaient une grande diversité de formes suivant leur grosseur et leur saillie. Ils étaient en pointes de diamant, refendues et à facettes (fig. 4 CD), en graines (E), en gouttes de suif, en forme de cône tronqué formant quatre feuilles ou simplement coniques (AB). Quelquefois ces clous sont recouverts d'une espèce de capsule en cuivre ajustée après coup. Certains comportaient une facette médiane indiquant où le marteau devait frapper pour ne pas écraser la tête; mais l'on croit que les petits masques qui ornaient quelquefois ces clous étaient adaptés lorsqu'ils étaient enfoncés. Sans cela, les figurines auraient été écrasées par le marteau. »
On peut cependant penser que l'aspect de la porte renforce alors le sentiment d'enfermement et que ces rangées de clous sont faites pour impressionner le prisonnier :
"La porte se distingue de certains objets architecturaux par la force symbolique qu’elle dégage. En matière carcérale, la porte fonde la prison dans son idée même. C’est la porte qui se referme à la fois derrière et sur l’individu condamné. L’expression « taule » pour désigner la prison apparaît d’ailleurs au cours du XIXe siècle (Rey, 2006) lorsque la taule remplace le bois et le fer pour la construction des portes de cellules. Ce sont les portes d’entrées des prisons qui sont le plus souvent marquées symboliquement, telles des forteresses (lourdes portes cloutées, surmontées parfois d’une maxime ou d’un symbole de la justice), pour impressionner, intimider, tourmenter."
La prison de murs troués, David Scheer, Champ Pénal, vol. XI, 2014.
On peut par ailleurs trouver de nombreuses portes cloutées dans les maisons paysannes, ou dans le monde arabo-musulman. Les clous peuvent alors prendre une valeur décorative ou symbolique.
« Au Moyen-Âge, des clous fixés aux entrées des maisons protégeaient les habitants et les animaux des sortilèges. Plantés en forme de croix, ils garantissaient prospérité et bonheur. Les clous provenant d'un cercueil chassaient les fantômes; les Romains le croyaient déjà. Pendant la première guerre mondiale, les soldats suspendaient fréquemment sur leurs baraquements de gros clous recourbés, provenant de fer à cheval en guise de porte-bonheur. Trouver un clou sur son chemin porte bonheur, à condition de le ramasser et de le conserver dans sa poche droite ou de le planter dans la porte de sa cuisine, dans le chambranle, du côté où se trouve la serrure et à la hauteur des yeux. Les joueurs sont heureux d'en ramasser un qui soit rouillé. Dans un théatre, si le machiniste oublie des clous sur la scène, la pièce est assurée de connaitre le succés. »
Page en ligne : Mes miniatures, article Le clou porte-bonheur.
Voir aussi : Dictionnaire des superstitions, Jean-Michel Pedrazzani, article Clou ou le Guide des superstitions, Pierre Canavaggio, article Clous en ligne sur Google Livres
« En Estonie, on plante trois clous de fer à cheval sur le seuil de la porte. De même en Argovie, le vendredi saint, sur la porte de l'étable pour préserver le bétail. En France même, on plante des clous sur les portes des maisons et des étables pour préserver bêtes et gens des maléfices. En Tunisie les portes sont décorées d'arabesques formées de têtes de clous dans le même but. En Sicile les tètes de clous sont disposées en croix. »
Les clous votifs, S. Zaborowski, p. 114 et 115.
« Pour déjouer les maléfices dont on peut être la victime, certaines pratiques sont recommandées : frapper trois fois sur la coque des œufs que l'on vient de manger, cracher sur le soulier de son pied droit avant de le chausser, planter sur la porte de sa maison des têtes de clous ou une peau de loup, se laver les mains avec de l'urine, porter sur soi du sel non béni ou de la racine de chicorée arrachée le matin de la Saint-Jean, etc. »
Les superstitions populaires au temps de Louis XIV, François Lebrun, L’Histoire, n° 9, février 1979
« Le clou, comme tout objet pointu ou tranchant en métal ou en fer refoule forces nuisibles et mauvais esprits. En outre, il a le pouvoir « de fixer, d’immobiliser ce qui est immatériel aussi bien que ce qui est matériel, grâce à une vertu de magie imitative. Ce pouvoir de fixation est généralement bienfaisant. Il permet d’arrêter les épidémies, de transférer et d’expulser les maux. En résumé, « planter le clou » équivaut à « expulser le mal ». »
L’article Clou du Livre des superstitions, d’Eloïse Mozzani donne beaucoup d’autres exemples de symbolisme du clou, mais rien qui semble avoir rapport avec les portes de prison …
Bonne journée !
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