Question d'origine :
Bonjour Cher Guichet du Savoir,
Hier, j'ai regardé un épisode de Nip/Tuck, deux chirurgiens plasticiens à Miami dont la vie est particulièrement mouvementé.
Mais cette épisode présentait une société automobile faisant subir à des dépouilles mortelles des essais de crash test, et ce afin d'examnier les cadavres et de déterminer les améliorations possibles en terme de sécurité (coupures / fractures / lésions...).
Je t'avoue que cela m'a un peu retourné l'estomac. Et j'ai pensé à cela toute la nuit.
En bref, peux-tu me dire ce qu'il en est exactement, afin de discerner fiction et réalité?
Des hommes donnent-ils leur corps à la science afin de favoriser les conditions de sécurité à de grandes multinationales dans le domaine automobile ?
Même si cela est louable, puisque pouvant préserver la vie des accidentés de la route, cela sert une cause financière au profit de grandes entreprise. Est-ce compatible avec le don de son corps après la mort pour l'avancé scientifique ?
Et quid de nos pratiques en France ?
Au moins, ils connaîtront le grand frisson une dernière fois
.
Merci pour tes réponses Guichet du Savoir !!

Réponse du Guichet

Bonjour,
On aimerait que ce soit un fiction bien sûr mais les Dispositifs anthropomorphes d’essai (DAE), crash test dummies en anglais, ont d'abord été des cadavres. Dans les années 1990 encore, cette utilisation des corps donnés à la science était argumentée dans un article , Humanitarian Benefits of Cadaver Research on Injury Prevention (« Les bénéfices humains de l'utilisation de cadavres dans la recherche pour la prévention des traumatismes ») :
« This paper discusses the value of human cadaveric subjects in injury biomechanics research. Published data were used to estimate the number of cadavers used in the past 30 years and to show that, as a benefit to society, over 60 lives were saved and countless injuries prevented for each cadaver used in the development and validation of safety improvements. Ethical and religious concerns regarding the use of cadavers are also addressed. »
"Cet article traite de l’importance des cadavres humains dans la recherche sur les blessures biomécaniques. Les données publiées ont été utilisées pour estimer le nombre de cadavres utilisés dans les 30 dernières années afin de montrer que, au bénéfice de la société, plus de 60 vies ont été sauvées et d'innombrables blessures évitées pour chaque cadavre utilisé dans le développement et la validation des améliorations de la sécurité. Les préoccupations éthiques et religieuses concernant l'utilisation de cadavres sont également abordées. […] » (Nous traduisons)
Ce type d’essai a commencé dans les années 1930 à Détroit (USA) mais existait aussi en France :
« Il existe à Marseille une unité de recherche mixte gérée par l'université de la Méditerranée et l'INRETS (Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité) qui réalise de nombreux essais sur des corps donnés à la science. Il y a des essais à échelle réelle et des essais fractionnés, spécifiques à une partie du corps. Tout cela sert à valider un modèle numérique pour dans l'avenir réaliser des essais numériques fiables et reproductibles à l'infini. Un second Laboratoire de l'INRETS est situé à Lyon-Bron, c'est le Laboratoire de Biomécanique et Mécanique des Chocs, également unité mixte avec l'université Claude Bernard Lyon 1. Ce Laboratoire, dans le cadre réglementaire du Don de corps à la Science, réalise des expérimentations biomécaniques sur des corps humains afin de mieux comprendre la tolérance humaine aux chocs et de développer des lois de comportements des organes et des matériaux biologiques pour réaliser des modèles du corps humain qui soient biofidèles, afin d'améliorer la protection offerte aux usagers des transports. En parallèle des recherches sont aussi menées sur des volontaires pour améliorer le confort et l'ergonomie des véhicules. »
(Wikipédia)
L’INRETS, réuni maintenant avec l’IFSTTAR, n’évoque sur son site que l’utilisation de mannequins équipés de capteurs :
« Catapultes de crash test et banc de simulation de choc avec mannequins instrumentés - Ifsttar TS2 :
"La catapulte de crash-test et les bancs de simulation de choc, associés à des mannequins instrumentés, visent à faire progresser la recherche dans les domaines de la sécurité passive automobile, de l'évaluation de critères de blessures, de la caractérisation de matériaux et d’ensembles mécaniques en dynamique rapide. La catapulte sert au lancement d'un véhicule ou d'un mobile contre un obstacle rigide ou un autre véhicule. Les bancs simulent des chocs lors d'une décélération d'un ensemble mobile ou permettent des essais dynamiques (impacteur horizontal, banc de chute vertical). Les mannequins instrumentés permettent de simuler le comportement d'un corps humain soumis à une décélération et de mesurer les sollicitations observées. Sont associés des moyens de métrologie pour la mesure en dynamique et l'observation par caméra vidéo rapide.
Cet équipement est géré par le département TS2 (Transport santé sécurité) »
A la fin des années 1990, début 2000, la presse dénonce ces essais (Libération (1998), sur l’utilisation 20 ans avant de corps d’enfants, pour tester des Renault), tandis que dès les années 1950 un mannequin pouvait y être substitué. Au début des années 1970, est utilisée et améliorée une série de mannequin pour essais de chocs, les Hybrid, ceux-là même que l’on peut voir dans certaines publicités automobiles. Des représentations numériques, créée au départ à partir de la numérisation de cadavres, trouvent aussi aujourd'hui de nombreuses applications, y compris dans les crash tests automobiles :
« Depuis la publication en 1994 des images saisissantes du Visible Human Project, qui a créé le premier modèle numérique du corps humain en photographiant 1.871 fines tranches du cadavre d'un condamné à mort, la représentation virtuelle de l'homme trouve des débouchés de plus en plus concrets. Elle peut servir par exemple à remplacer les mannequins ou les cadavres utilisés dans les crash-tests automobiles. L'idée est d'utiliser le numérique pour « mieux comprendre le fonctionnement et les interactions du corps dans son environnement », explique Stéphane Berdah, directeur du Laboratoire de biomécanique appliquée (LBA), une unité de l'Ifsttar (Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux) et d'Aix-Marseille Université, très en pointe dans l'étude des traumatismes routiers. »
(« Un homme virtuel pour explorer le corps », Les Echos - 05/02/2013).
« Chaque Hybride III fait l'objet d'une calibration préalablement à l'essai de choc. Sa tête est enlevée et lâchée d'une hauteur de 40 cm pour vérifier son instrumentation. La tête et le cou sont ensuite assemblés, mis en mouvement et arrêtés brusquement pour vérifier la bonne flexion du cou. Les mannequins sont revêtus d'une peau de chamois. Les genoux sont frappés au moyen d'une sonde métallique pour vérifier l'absence de crevaison. Enfin, la tête et le cou sont remontés sur le corps, qui est attaché à une plateforme d'essai et frappé violemment à la poitrine par un lourd pendule, pour vérifier la flexion des côtes.
Lorsque le mannequin est déclaré apte au test, il est habillé en jaune, des marques sont peintes sur sa tête et ses genoux, et des repères de calibration sont attachés sur le côté de sa tête, afin de faciliter le travail des expérimentateurs lorsque les films au ralenti sont visionnés. Le mannequin est ensuite placé dans le véhicule testé. Quarante-quatre canaux de données, situés sur toutes les parties du corps de l'Hybride III, enregistrent entre 35 000 et 40 000 valeurs lors des 100 à 150 millisecondes que dure un essai de choc typique. Ces données sont tout d'abord stockées dans un dispositif dans la poitrine du mannequin, avant d'être transférées vers un ordinateur à la fin du test.
Grâce à la standardisation de l'Hybrid, leurs pièces sont interchangeables. Non seulement un mannequin peut être utilisé pour plusieurs essais de chocs, mais en cas de défaillance d'une pièce, elle peut être remplacée par une nouvelle. Un mannequin muni de toute son instrumentation vaut environ 150 000 euros. »
(Wikipédia)
Voir aussi les tests de l’EURO Ncap [New Car Assessment Programm = Programme d’évaluation des voitures neuves].
Nous n’avons pas trouvé la réglementation française en vigueur pour ces tests. Un site affirme en 2011 que « cette pratique [l’utilisation de cadavres] a diminué, mais reste utilisée pour tester l'impact réel d'un accident sur un humain. Pour s'éviter toute mauvaise publicité, les constructeurs passent par des universités pour ces tests. ».
Selon cette fiche sur le Don du corps du site Service Public, il ne semble pas en effet qu’on « donne son corps à la science », en général, mais qu’on le propose à une Faculté de médecine, laquelle l’accepte si elle possède un « Centre de don ». L’article Article R2213-13 du Code général des Collectivités territoriales précise en effet que :
« Un établissement de santé, de formation ou de recherche ne peut accepter de don de corps que si l'intéressé en a fait la déclaration écrite en entier, datée et signée de sa main. Cette déclaration peut contenir notamment l'indication de l'établissement auquel le corps est remis. Une copie de la déclaration est adressée à l'établissement auquel le corps est légué ; cet établissement délivre à l'intéressé une carte de donateur, que celui-ci s'engage à porter en permanence. »
Ainsi est-on assuré que le corps donné sert aux intérêts publics et non privés. Au demeurant, il faut de nombreuses pressions d’organismes indépendants (comme les Ncap) sur les constructeurs automobiles pour que les standards de sécurité des véhicules soient plus élevés que les lois le prévoient, comme veut le démontrer cette animation.
Bonne journée.
On aimerait que ce soit un fiction bien sûr mais les Dispositifs anthropomorphes d’essai (DAE), crash test dummies en anglais, ont d'abord été des cadavres. Dans les années 1990 encore, cette utilisation des corps donnés à la science était argumentée dans un article , Humanitarian Benefits of Cadaver Research on Injury Prevention (« Les bénéfices humains de l'utilisation de cadavres dans la recherche pour la prévention des traumatismes ») :
« This paper discusses the value of human cadaveric subjects in injury biomechanics research. Published data were used to estimate the number of cadavers used in the past 30 years and to show that, as a benefit to society, over 60 lives were saved and countless injuries prevented for each cadaver used in the development and validation of safety improvements. Ethical and religious concerns regarding the use of cadavers are also addressed. »
"Cet article traite de l’importance des cadavres humains dans la recherche sur les blessures biomécaniques. Les données publiées ont été utilisées pour estimer le nombre de cadavres utilisés dans les 30 dernières années afin de montrer que, au bénéfice de la société, plus de 60 vies ont été sauvées et d'innombrables blessures évitées pour chaque cadavre utilisé dans le développement et la validation des améliorations de la sécurité. Les préoccupations éthiques et religieuses concernant l'utilisation de cadavres sont également abordées. […] » (Nous traduisons)
Ce type d’essai a commencé dans les années 1930 à Détroit (USA) mais existait aussi en France :
« Il existe à Marseille une unité de recherche mixte gérée par l'université de la Méditerranée et l'INRETS (Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité) qui réalise de nombreux essais sur des corps donnés à la science. Il y a des essais à échelle réelle et des essais fractionnés, spécifiques à une partie du corps. Tout cela sert à valider un modèle numérique pour dans l'avenir réaliser des essais numériques fiables et reproductibles à l'infini. Un second Laboratoire de l'INRETS est situé à Lyon-Bron, c'est le Laboratoire de Biomécanique et Mécanique des Chocs, également unité mixte avec l'université Claude Bernard Lyon 1. Ce Laboratoire, dans le cadre réglementaire du Don de corps à la Science, réalise des expérimentations biomécaniques sur des corps humains afin de mieux comprendre la tolérance humaine aux chocs et de développer des lois de comportements des organes et des matériaux biologiques pour réaliser des modèles du corps humain qui soient biofidèles, afin d'améliorer la protection offerte aux usagers des transports. En parallèle des recherches sont aussi menées sur des volontaires pour améliorer le confort et l'ergonomie des véhicules. »
(Wikipédia)
L’INRETS, réuni maintenant avec l’IFSTTAR, n’évoque sur son site que l’utilisation de mannequins équipés de capteurs :
« Catapultes de crash test et banc de simulation de choc avec mannequins instrumentés - Ifsttar TS2 :
"La catapulte de crash-test et les bancs de simulation de choc, associés à des mannequins instrumentés, visent à faire progresser la recherche dans les domaines de la sécurité passive automobile, de l'évaluation de critères de blessures, de la caractérisation de matériaux et d’ensembles mécaniques en dynamique rapide. La catapulte sert au lancement d'un véhicule ou d'un mobile contre un obstacle rigide ou un autre véhicule. Les bancs simulent des chocs lors d'une décélération d'un ensemble mobile ou permettent des essais dynamiques (impacteur horizontal, banc de chute vertical). Les mannequins instrumentés permettent de simuler le comportement d'un corps humain soumis à une décélération et de mesurer les sollicitations observées. Sont associés des moyens de métrologie pour la mesure en dynamique et l'observation par caméra vidéo rapide.
Cet équipement est géré par le département TS2 (Transport santé sécurité) »
A la fin des années 1990, début 2000, la presse dénonce ces essais (Libération (1998), sur l’utilisation 20 ans avant de corps d’enfants, pour tester des Renault), tandis que dès les années 1950 un mannequin pouvait y être substitué. Au début des années 1970, est utilisée et améliorée une série de mannequin pour essais de chocs, les Hybrid, ceux-là même que l’on peut voir dans certaines publicités automobiles. Des représentations numériques, créée au départ à partir de la numérisation de cadavres, trouvent aussi aujourd'hui de nombreuses applications, y compris dans les crash tests automobiles :
« Depuis la publication en 1994 des images saisissantes du Visible Human Project, qui a créé le premier modèle numérique du corps humain en photographiant 1.871 fines tranches du cadavre d'un condamné à mort, la représentation virtuelle de l'homme trouve des débouchés de plus en plus concrets. Elle peut servir par exemple à remplacer les mannequins ou les cadavres utilisés dans les crash-tests automobiles. L'idée est d'utiliser le numérique pour « mieux comprendre le fonctionnement et les interactions du corps dans son environnement », explique Stéphane Berdah, directeur du Laboratoire de biomécanique appliquée (LBA), une unité de l'Ifsttar (Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux) et d'Aix-Marseille Université, très en pointe dans l'étude des traumatismes routiers. »
(« Un homme virtuel pour explorer le corps », Les Echos - 05/02/2013).
« Chaque Hybride III fait l'objet d'une calibration préalablement à l'essai de choc. Sa tête est enlevée et lâchée d'une hauteur de 40 cm pour vérifier son instrumentation. La tête et le cou sont ensuite assemblés, mis en mouvement et arrêtés brusquement pour vérifier la bonne flexion du cou. Les mannequins sont revêtus d'une peau de chamois. Les genoux sont frappés au moyen d'une sonde métallique pour vérifier l'absence de crevaison. Enfin, la tête et le cou sont remontés sur le corps, qui est attaché à une plateforme d'essai et frappé violemment à la poitrine par un lourd pendule, pour vérifier la flexion des côtes.
Lorsque le mannequin est déclaré apte au test, il est habillé en jaune, des marques sont peintes sur sa tête et ses genoux, et des repères de calibration sont attachés sur le côté de sa tête, afin de faciliter le travail des expérimentateurs lorsque les films au ralenti sont visionnés. Le mannequin est ensuite placé dans le véhicule testé. Quarante-quatre canaux de données, situés sur toutes les parties du corps de l'Hybride III, enregistrent entre 35 000 et 40 000 valeurs lors des 100 à 150 millisecondes que dure un essai de choc typique. Ces données sont tout d'abord stockées dans un dispositif dans la poitrine du mannequin, avant d'être transférées vers un ordinateur à la fin du test.
Grâce à la standardisation de l'Hybrid, leurs pièces sont interchangeables. Non seulement un mannequin peut être utilisé pour plusieurs essais de chocs, mais en cas de défaillance d'une pièce, elle peut être remplacée par une nouvelle. Un mannequin muni de toute son instrumentation vaut environ 150 000 euros. »
(Wikipédia)
Voir aussi les tests de l’EURO Ncap [New Car Assessment Programm = Programme d’évaluation des voitures neuves].
Nous n’avons pas trouvé la réglementation française en vigueur pour ces tests. Un site affirme en 2011 que « cette pratique [l’utilisation de cadavres] a diminué, mais reste utilisée pour tester l'impact réel d'un accident sur un humain. Pour s'éviter toute mauvaise publicité, les constructeurs passent par des universités pour ces tests. ».
Selon cette fiche sur le Don du corps du site Service Public, il ne semble pas en effet qu’on « donne son corps à la science », en général, mais qu’on le propose à une Faculté de médecine, laquelle l’accepte si elle possède un « Centre de don ». L’article Article R2213-13 du Code général des Collectivités territoriales précise en effet que :
« Un établissement de santé, de formation ou de recherche ne peut accepter de don de corps que si l'intéressé en a fait la déclaration écrite en entier, datée et signée de sa main. Cette déclaration peut contenir notamment l'indication de l'établissement auquel le corps est remis. Une copie de la déclaration est adressée à l'établissement auquel le corps est légué ; cet établissement délivre à l'intéressé une carte de donateur, que celui-ci s'engage à porter en permanence. »
Ainsi est-on assuré que le corps donné sert aux intérêts publics et non privés. Au demeurant, il faut de nombreuses pressions d’organismes indépendants (comme les Ncap) sur les constructeurs automobiles pour que les standards de sécurité des véhicules soient plus élevés que les lois le prévoient, comme veut le démontrer cette animation.
Bonne journée.
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