Question d'origine :
bonsoir, pourquoi autrefois les demoiselles d'opéra étaient "obligées" d'avoir un protecteur et quand cette pratique à t' elle cessée.
Réponse du Guichet

Bonjour,
Au XIXème siècle, les jeunes danseuses de l’Opéra de Paris étaient effectivement souvent amenées à se placer sous la protection d’un riche « bienfaiteur », et cela
« Au début de ce siècle [le XIXème, NDLR], mis à part quelques ballerines internationales, toutes les danseuses sont issues des classes les plus démunies de la capitale : 43 % de leurs parents sont illettrés. (…)
L'Opéra est, pour la ballerine, une sorte de piédestal d'où elle s'élance pour essayer d'accéder à la classe aisée. Mais si certaines y parviennent, c'est d'abord une logique de dépendance aux hommes. (…)
Les danseuses doivent vivre et payer en outre d'onéreuses classes de danse, si elles veulent sortir de la misère et de l'anonymat. Des balletomanes interviennent pour elles, tandis que des protecteurs se présentent. En 1831, Louis Véron, premier administrateur de l'Opéra, officialise la pratique consistant à autoriser les amateurs de l'Opéra à pénétrer dans le foyer lors des répétitions, tandis qu'un préposé est chargé de contrôler l'entrée des ayant droits. Ces protecteurs peuvent alors prendre plus facilement contact avec les danseuses et faire leur choix, au plus près. (…)
Contrainte souvent de changer de nom, « sans identité propre, dépourvue d'instruction et de culture, il ne reste à la danseuse que la séduction et la ruse, seules armes dans ce métier où l'élément masculin détient le pouvoir.» La position de protégée d'un homme riche, et si possible titré, est le moyen quasi obligé d'accéder à une reconnaissance professionnelle. (…)
Cependant, si la danseuse doit avoir un protecteur, c'est pour exercer art, pour faire carrière; c'est la danse qui légitime cette protection. Au même titre que l'analogie entre le maquereau et le protecteur n'est pas de mise, celle qui pourrait naître des ressemblances entre certains salons de "maisons closes" et le foyer n'est pas, non plus, possible. Certes, c'est bien là que se nouent liaisons, mais c'est la danse qui règne en maître. »
Source : Marie-Victoire Louis, « De l’ambivalence entre salariat et prostitution », Le droit de cuissage. France, 1860 – 1930, Éditions de l'Atelier, février 1984, p. 121 à 143, mis en ligne le 03/09/2006, consulté le 14/01/2016.
Pendant toute la période romantique et jusqu’à la guerre de 1870, le Foyer de la danse est ainsi « l’endroit où il faut être », le lieu où se côtoient les danseuses et leurs galants. L’Opéra est alors installé rue Le Peletier. Le changement intervient en 1875 avec le déménagement au Palais Garnier. Le nouveau foyer, bien qu’installé dans un lieu magnifique, entre alors en décadence.
L’extrait suivant nous renseigne sur la
« Peu à peu, la prostitution légère – « occasionnelle » - telle qu’elle se pratiquait volontiers grâce au Foyer de la danse, les relations tarifées entre abonnés et ballerines, disparaissent. Les mœurs changent et les artistes, comme les autres catégories de salariés, vont faire évoluer leur situation. Les lois sociales encadrent le travail, les émoluments augmentent, la condition des femmes s’améliorant puissamment après la Première Guerre mondiale. »
Source : Martine Kahane, « Le Foyer de la danse », Le ballet de l'Opéra : trois siècles de suprématie depuis Louis XIV / sous la direction de Mathias Auclair et Christophe Ghristi Paris : Albin Michel : Opéra national de Paris : BNF, DL 2013, p. 89-92.
Danseuses de l’Opéra au XIXème siècle : l’envers du décor
Virginie Valentin, « Tu seras étoile, ma fille. (France, XIXe-XXe siècle) », Clio. Femmes, Genre, Histoire [En ligne], 34 | 2011, mis en ligne le 31 décembre 2013, consulté le 14 janvier 2016.
Catalogue de l’exposition « Splendeurs et misères. Images de la prostitution, 1850-1910 », Musée d'Orsay, Flammarion, 2015
L’Histoire par l’image : De la classe à la scène, le ballet de l’Opéra de Paris vu par Edgar Degas
”Qui est la petite danseuse de Degas ?”, site Opéra en actes du Réseau Canopé.
Nous espérons vous avoir aidé dans vos recherches et vous remercions pour votre confiance.
L’équipe Arts vivants

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