Immeubles 18e siècle rue de la Républiqe
LYON, MÉTROPOLE ET RÉGION
+ DE 2 ANS
Le 12/03/2016 à 21h28
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Question d'origine :
Bonsoir,
pourriez-vous me dire svp pourquoi se trouvent encore des immeubles (apparemment) 18e siècle rue de la République aux n° 77, 73, 77 et 81 (ce dernier "traboulant" avec la rue Bellecordière), alors que l'ensemble des immeubles de cette rue sont censés avoir été rasés lors du percement de la rue impériale dans les années 1850?
S'agit-il d'immeubles déjà alignés ou en très bon état lors de la percée? Y a t-il eu impossibilité d'exproprier leur(s) propriétaires? Je n'ai trouvé aucune réponse dans la littérature à cette question(B. Gauthiez ou D. Bertin)
D'avance Merci !
Commentaire de
TJ :
Publié le 12/03/2016 à 21:31
Je voulais dire les n° 71, 73, 77 et 81 rue de République.
Désolé et merci
Réponse du Guichet
bml_reg
- Département : Documentation régionale
Le 16/03/2016 à 16h49
Bonjour,
À partir du 25 mars 1853 s’ouvre à Lyon une vaste entreprise d’urbanisme, à l’image des travaux engagés par Haussmann à Paris, sous l’impulsion de Claude-Marius Vaïsse (1799-1864), devenu préfet et maire. Dès la fin de l’année, on charge l’architecte René Dardel (1796-1871) de dresser les plans pour la “régénération du centre de la presqu’île”. Ils se concrétisent dans le percement de la rue Impériale (actuelle rue de la République). Elle vise à ouvrir un large axe longiligne au coeur de la ville ancienne, à partir de laquelle d’autres voies sont créées.
M. Vaïsse manifeste la volonté de faire entrer Lyon dans une ère nouvelle en créant une ville nouvelle à laquelle la bourgeoisie puisse s’identifier :
« L’ouverture de la rue Impériale doit amener, d’une manière plus ou moins immédiate, la transformation de toute la partie de la ville traversée par cette rue. En y apportant le mouvement, l’air, la lumière, elle rend à un quartier vaste et central sa valeur qui allait dépérissant de jour en jour ; c’est un vrai capital qu’elle reconstitue et conserve. La valeur étant restituée au sol, des maisons aérées, éclairées, saines et commodes seront, de proche en proche, substituées aux maisons sombres, malsaines, incommodes où se presse une population nombreuse, dans les plus mauvaises conditions de bien être et de santé. ».
Pour emporter la décision, Cl.M. Vaïsse termine son rapport avec emphase, tel un discours électoraliste :
« Notre population lyonnaise a dans tous les rangs le sentiment de l’importance de sa ville, de grandeur de son devenir ; elle demande que les établissements publics, les rues, les places, les quais y soient mis en rapport avec cette importance, avec cet avenir ; elle demande surtout que l’on commence promptement : c’est une impatience qu’il faut prendre en considération, un point d’honneur auquel il faut donner satisfaction. »
Source : De la rue impériale à la rue de la République [Livre] : archéologie, création et rénovation urbaines
En 1854, Benoît Poncet conçoit la société immobilière de la rue Impériale chargée par le préfet d’ouvrir la rue et de construire des immeubles.
Au total le percement de la rue et la construction du Palais du Commerce auront entraîné la destruction de 289 maisons et la construction d’un ensemble d’immeubles long de 17,60 kilomètres.
Le détail de ces destructions et reconstructions n’apparaît dans aucun des nombreux ouvrages que nous avons consultés. Nous n’avons pas trouvé non plus de plan parcellaire des propriétés à exproprier (comme c’est le cas par exemple pour la rue Grenette pour le prolongement de la rue jusque sur le quai Saint-Antoine, plan par G. Bonnet, 31 octobre 1856).
En revanche la consultation de deux plans, le premier, datant de 1831, provenant des Archives Départementales du Rhône, Le second, de 1864, issu du plan parcellaire des Archives Municipales, pourrait être instructive. En effet la comparaison de ces deux plans, réalisés avec plus de trente années de distance, montre que l’alignement de bâtiments situé sur la portion de rue qui nous intéresse n’a pas bougé. On retrouve à peu de chose près le même nombre de bâtiments et pour l’aspect de ceux-ci on ne note aucune différence. Cette comparaison nous permet de confirmer que la présence des immeubles auxquels vous faites références était bien antérieure au percement de la rue Impériale.
Dans l’ouvrage Lyon, entre Bellecour et Terreaux : urbanisme et architecture au XIXe siècle , un plan figurant les constructions nouvelles entre 1835 et 1868 apporte sur le secteur qui nous intéresse une information supplémentaire. On voit assez nettement sur ce plan que l’élargissement de la rue et le reculement des façades ne concerne que les constructions opposées à notre alignement d’immeubles (voir reproduction du plan en pièce–jointe).
Sur les raisons qui expliquent que ces bâtiments aient été conservés nous n’avons pas trouvé non plus d’informations. Nous vous signalons néanmoins l’existence d’un document qui pourrait apporter des réponses : « Ouverture de la rue Impériale. État, situation des immeubles traversés par le projet dressé par la Compagnie de la rue Impériale », manuscrit daté de 1853 , conservé aux Archives Municipales de Lyon, fonds du Service de la Voirie, vol. 16 1 .
Toutefois, nous pouvons supposer, avec vous, que les bâtiments ne posaient tout compte fait pas de problème par rapport au plan d’alignement qui fut joint au traité du percement de la rue Impériale (voir le plan des constructions nouvelles de 1835 à 1868), ni même par rapport à l’élargissement de la rue.
Pour finir nous ne résisterons pas au plaisir de vous proposer un extrait d’un petit livre « La merveilleuse histoire de la rue Impériale » écrit par Albert Giuliani en 1956, célébrant le centenaire la naissance de la rue de la République:
« A l’endroit de notre place de la République, sur la gauche de la préfecture, qui se trouvait place des Jacobins, un dédale inextricable de rues et de ruelles, bordées de hauts immeubles décrépis, élevait un rideau de pierres délabrées et enserrait, à l’étouffer, le cœur de la cité, comme les serpents de Laocoon. A chaque tournant les noms changeaient. Une rue importante, la rue de l’Hôpital, proliférait dans la laideur, jusqu’à enfanter, à l’ouest de Bellecour, un magma de masures si misérables, si enlisées parmi la vase des pourritures qu’on les nommait quartier des Basses-Brayes et qu’on avait dû planter des marronniers en rangs serrés pour en masquer la vue aux hôtes princiers de l’hôtel Mascrani et aux maisons cossues de la grande place, dont l’une, au numéro 3, avait reçu pendant 48 heures le Pape Pie VII se rendant à Paris pour le sacre de l’Empereur […]
Voilà pour les rues. Et les maisons ? Avec leurs murs lépreux, les craquelures de leurs vieilles peaux fendillées, les sanies de leurs de leurs tumeurs ulcéreuses, les portes d’allées soufflant de leurs gueules noires des haleines moisies, leurs escaliers à claire-voie où la rampe, parfois, n’était qu’une corde pourrie, leurs foyers d’infection à chaque palier, leurs coudes fétides, profondes comme des puits, imprégnées de relents écœurants d’une humanité misérable, le pullulement immonde des cancrelats et autres répugnants parasites, si les hospices de la Charité, de la Grande-Aumône et de l’hôtel-Dieu étaient trop étroits pour recevoir les malades de tous âges rongés par la tuberculose ou l’anémie pernicieuse, comment s’en étonner ? »
Autres plans à consulter :
- Projet de rue à ouvrir de la place de la Comédie à la place Bellecour
- Extrait du plan général de la ville de Lyon annexé au rapport de M. le Sénateur chargé de l’administration du département du Rhône sur le projet de traité pour l’exécution de divers travaux d’utilité générale
A lire aussi ces deux articles :
- Projet de la rue Impériale et divers travaux extraordinaires
- Pose de la première pierre de la rue Impériale
Nous vous invitons également à consulter :
- La merveilleuse histoire de la rue Impériale
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