Question d'origine :
bonjour
apres ecoute et analyse de la suite romantique pour orchestre de Reger j'avoue rester perplexe devant la construction de cette oeuvre organisée autour de courts motifs : existe t il une analyse musicale de la forme de ce morceau svp ?
merci
Réponse du Guichet
bml_mus
- Département : Musique
Le 01/04/2016 à 09h19
Réponse du Département Musique
Bonjour,
Musicien d’origine bavaroise, Max Reger compose en 1912 Eine romantische Suite, sa Suite romantique pour orchestre, op.125, achevée le 28 juillet de la même année.
De 1911 à 1914 Max Reger est directeur musical du Meininger Hofkapelle, l’Orchestre de la Cour de Meiningen, en Thuringe au centre de l’Allemagne. Pendant cette période, le musicien jouit de toutes les possibilités de l’orchestre symphonique de Meiningen en tant que chef et surtout en qualité d’orchestrateur, ce qui est une opportunité rare pour un compositeur.
La suite trouve son origine et sa structure à partir de trois poèmes de Joseph von Eichendorf , Nachtzauber, Elfe et Morgengruß (Enchantements nocturnes, Elfes, Salut matinal). Tout comme les poèmes symphoniques op. 128 à partir de quatre tableaux du peintre symboliste Arnold Böcklin (dont l’Île des Morts).
Tenant de la musique «pure» Reger était un maître de l’écriture polyphonique et harmonique qui a perpétué la tradition classique et romantique – paradoxalement la symphonie est absente de son œuvre. Cette composition semble être, comme quelques autres, une esquisse à la grande symphonie que le compositeur ambitionne. D’après les indications du livret de la Suite romantique conservée à la BmL : «La genèse se situe dans un contexte professionnel parfois frénétique, celui de calendriers très chargés – Reger a confié lui-même qu’il avait conçu la Suite romantique au cours de déplacements nocturnes en chemin de fer […].» Plus loin nous lisons «préparatifs pour la grande œuvre, la symphonie toujours projetée et jamais écrite mais dont les principes formels apparaissent déjà. C’est ainsi que les mouvements extrêmes de la Suite romantique présentent l’exposition et la reprise d’un premier mouvement de forme sonate […].»
Plus loin encore sur le style de ces pages orchestrales «[…] l’extrême complication de leur aspect formel était parfaitement «contemporain» : absence de mélodies que l’on puisse chantonner, la variation ininterrompue des plus petits fragments de motifs, - ce qui confère un grand intérêt à la Suite romantique pour les amis de Schönberg, - une harmonie étirée jusqu’aux confins de la tonalité avec ses transitions sous forme de glissements , enrichis encore par des accents impressionnistes, et enfin la conception formelle régie par la dynamique, la concentration et les timbres […].»
Impressionniste ou postromantique, cette œuvre apparait notamment s’inscrire dans ce que le musicologue Paul-Gilbert Langevin a nommé l’ethnoromantisme, qui englobe un vaste répertoire de la musique européenne de 1863 à 1939. S’il semble difficile de trouver une analyse de l’œuvre proprement dite, nous vous proposons ces éléments plus généraux et néanmoins éclairants sur la musique de Max Reger.
Voici ce que nous pouvons lire dans le recueil d’articles rassemblés dans le volume triple 388-389-390 de La Revue Musicale, daté de 1986, intitulé Musiciens d’Europe, Figure du Renouveau Ethnoromantique, dans le chapitre consacré à Max Reger (pp 43-56) : «Si le genre le plus noble de la musique pure, la symphonie, paraît absent de son catalogue, en réalité l’ensemble de son œuvre symphonique de maturité peut être considéré comme prélude à une immense symphonie qu’il ne devait jamais mener à bien […]. L’élément programmatique, tellement en honneur à l’époque, est pratiquement absent de sa musique, même si certaines pages d’orchestre, comme les quatre Tableaux de Böcklin op.128 ou la Suite romantique op.125 d’après Eichendorf, font appel à une source d’inspiration extra-musicale. Mais c’est là une exception chez lui, exception qui montre la richesse de son invention car les deux œuvres citées comptent parmi ses plus belles. »
Plus loin enfin : « Reger n’est nullement le post-romantique attardé qui s’épuise dans une vaine exacerbation du chromatisme de Tristan […]. Au contraire. Reger rejoint les préoccupations des quatre plus grands pionniers de son époque quant au langage harmonique : Debussy, Busoni, Schönberg et Scriabine. Si, dans sa plus large part, sa musique reste fondamentalement tonale, des agrégats tout à fait étranges peuvent résulter soudain de la liberté des enchaînements, et produire le sentiment d’un atonalisme que toutefois il n’a jamais érigé en système comme le fit Schönberg, bien qu’il ait parfois devancé les trouvailles de ce dernier. Dans certaines de ses pages d’orchestre ou d’orgue, il se montre, de même, étonnamment proche de Debussy jusque dans la recherche d’une certaine poésie impressionniste dont on ne trouve guère d’équivalent chez ses contemporains allemands : le dernier mouvement de la Suite romantique est un bon exemple, ou l’Ermite au violon, premier des Tableaux de Böcklin. Ces deux œuvres montrent la palette orchestrale de Reger sous son meilleur jour. »
Bonjour,
Musicien d’origine bavaroise, Max Reger compose en 1912 Eine romantische Suite, sa Suite romantique pour orchestre, op.125, achevée le 28 juillet de la même année.
De 1911 à 1914 Max Reger est directeur musical du Meininger Hofkapelle, l’Orchestre de la Cour de Meiningen, en Thuringe au centre de l’Allemagne. Pendant cette période, le musicien jouit de toutes les possibilités de l’orchestre symphonique de Meiningen en tant que chef et surtout en qualité d’orchestrateur, ce qui est une opportunité rare pour un compositeur.
La suite trouve son origine et sa structure à partir de trois poèmes de Joseph von Eichendorf , Nachtzauber, Elfe et Morgengruß (Enchantements nocturnes, Elfes, Salut matinal). Tout comme les poèmes symphoniques op. 128 à partir de quatre tableaux du peintre symboliste Arnold Böcklin (dont l’Île des Morts).
Tenant de la musique «pure» Reger était un maître de l’écriture polyphonique et harmonique qui a perpétué la tradition classique et romantique – paradoxalement la symphonie est absente de son œuvre. Cette composition semble être, comme quelques autres, une esquisse à la grande symphonie que le compositeur ambitionne. D’après les indications du livret de la Suite romantique conservée à la BmL : «La genèse se situe dans un contexte professionnel parfois frénétique, celui de calendriers très chargés – Reger a confié lui-même qu’il avait conçu la Suite romantique au cours de déplacements nocturnes en chemin de fer […].» Plus loin nous lisons «préparatifs pour la grande œuvre, la symphonie toujours projetée et jamais écrite mais dont les principes formels apparaissent déjà. C’est ainsi que les mouvements extrêmes de la Suite romantique présentent l’exposition et la reprise d’un premier mouvement de forme sonate […].»
Plus loin encore sur le style de ces pages orchestrales «[…] l’extrême complication de leur aspect formel était parfaitement «contemporain» : absence de mélodies que l’on puisse chantonner, la variation ininterrompue des plus petits fragments de motifs, - ce qui confère un grand intérêt à la Suite romantique pour les amis de Schönberg, - une harmonie étirée jusqu’aux confins de la tonalité avec ses transitions sous forme de glissements , enrichis encore par des accents impressionnistes, et enfin la conception formelle régie par la dynamique, la concentration et les timbres […].»
Impressionniste ou postromantique, cette œuvre apparait notamment s’inscrire dans ce que le musicologue Paul-Gilbert Langevin a nommé l’ethnoromantisme, qui englobe un vaste répertoire de la musique européenne de 1863 à 1939. S’il semble difficile de trouver une analyse de l’œuvre proprement dite, nous vous proposons ces éléments plus généraux et néanmoins éclairants sur la musique de Max Reger.
Voici ce que nous pouvons lire dans le recueil d’articles rassemblés dans le volume triple 388-389-390 de La Revue Musicale, daté de 1986, intitulé Musiciens d’Europe, Figure du Renouveau Ethnoromantique, dans le chapitre consacré à Max Reger (pp 43-56) : «Si le genre le plus noble de la musique pure, la symphonie, paraît absent de son catalogue, en réalité l’ensemble de son œuvre symphonique de maturité peut être considéré comme prélude à une immense symphonie qu’il ne devait jamais mener à bien […]. L’élément programmatique, tellement en honneur à l’époque, est pratiquement absent de sa musique, même si certaines pages d’orchestre, comme les quatre Tableaux de Böcklin op.128 ou la Suite romantique op.125 d’après Eichendorf, font appel à une source d’inspiration extra-musicale. Mais c’est là une exception chez lui, exception qui montre la richesse de son invention car les deux œuvres citées comptent parmi ses plus belles. »
Plus loin enfin : « Reger n’est nullement le post-romantique attardé qui s’épuise dans une vaine exacerbation du chromatisme de Tristan […]. Au contraire. Reger rejoint les préoccupations des quatre plus grands pionniers de son époque quant au langage harmonique : Debussy, Busoni, Schönberg et Scriabine. Si, dans sa plus large part, sa musique reste fondamentalement tonale, des agrégats tout à fait étranges peuvent résulter soudain de la liberté des enchaînements, et produire le sentiment d’un atonalisme que toutefois il n’a jamais érigé en système comme le fit Schönberg, bien qu’il ait parfois devancé les trouvailles de ce dernier. Dans certaines de ses pages d’orchestre ou d’orgue, il se montre, de même, étonnamment proche de Debussy jusque dans la recherche d’une certaine poésie impressionniste dont on ne trouve guère d’équivalent chez ses contemporains allemands : le dernier mouvement de la Suite romantique est un bon exemple, ou l’Ermite au violon, premier des Tableaux de Böcklin. Ces deux œuvres montrent la palette orchestrale de Reger sous son meilleur jour. »
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