Question d'origine :
Bonjour,
J'ai reçu un courriel dans lequel il est écrit que l'origine de la burka remonterait au culte d'Astarté.
Vous en trouverez une copie ci-dessous.
Pourriez-vous me dire si ce que dit ce texte est véridique et à défaut ce que l'on sait de l'origine de ce voile?
Merci par avance pour votre réponse.
La Burka vient du Culte d'Astarté dans la Mésopotamie antique.
Pour honorer la déesse de l'Amour physique, toutes les femmes, sans exception,
devaient se prostituer une fois l'an dans les bois sacrés qui entouraient les temples
de la déesse...
Pour ne pas être reconnues, les femmes de la haute société prirent l'habitude de se
voiler totalement.
Mustapha Kemal, alias Ataturk, 1er président de la Turquie, de 1923 à 1938, avait mis un terme au port de la burka, en faisant une loi toute simple, avec effet immédiat :
toutes les femmes turques ont le droit de se vêtir comme elles le désirent.
Toutefois, toutes les prostituées doivent porter la burka.
Réponse du Guichet

Bonjour,
Le courriel que vous avez reçu et dans lequel on prétend que la burka remonterait au culte d’Astarté n’est pas nouveau sur la toile. Ce « mythe » circule quasiment à l’identique depuis plusieurs années déjà, et illustre une fois encore la vieille thématique de « la maman et la putain », ici associée à l’islam, époque oblige.
Nous vous proposons de vous reporter à nos anciennes réponses surle voile et la burqa , notamment :
-Du voile de mariée au voile coranique
et
-Dénomination du voile grillagé afghan Tchador ou Burqa ? .
S’il est avéré que le port du voile fut interdit en Turquie par Kemal Atatürk en 1937 après qu’il eut décrété la Turquie état laïc, et dans un souci d’occidentalisation (les hommes furent aussi interdits de turbans et de pantalons bouffants traditionnels), nous n’avons pas trouvé trace d’une mesure obligeant les prostituées à porter une burqa. Par ailleurs, le voile traditionnel des femmes des différentes régions de Turquie, outre qu’il ne portait pas le nom de burqa (terme d’origine pachtoune) n’en présentait pas non plus les caractéristiques, comme vous le constaterez surce site .
Le port du voile dans l’Antiquité du bassin méditerranéen et du Moyen-Orient semble avoir été plus une marque de distinction qu’une marque d’infamie. Déjà au XIIIe siècle avant Jésus-Christ, dans le code d’Hammourabi, le voile distinguait la femme libre de l’esclave. Des lois assyriennes découvertes sur des tablettes à Assur l’attestent aussi : « Un des passages les plus curieux des lois assyriennes est l'obligation pour la femme mariée de porter le voile ; cette obligation est en même temps un privilège, puisque ni les prostituées, ni les servantes n'auront droit au port du voile. S'agit-il comme on l'a pensé généralement du voile musulman dissimulant les traits du visage ? Je ne le crois pas ; il est question à plusieurs reprises de la dénonciation obligatoire pour ceux qui rencontrent des femmes voilées n'ayant pas droit au voile. La chose se comprend mieux si nous admettons un voile comme nous le représentent les bas-reliefs de Zend- jirli et de Karkémish figurant des divinités ou des prêtresses. Du sommet de leur coiffure en forme de tiare, s'épand un voile descendant jusqu'aux pieds et assez large pour envelopper le corps comme d'un manteau, mais laissant le visage découvert. Nulle difficulté, par suite, à reconnaître une femme qui n'étant pas de la classe voilée en portait cependant l'insigne. » G. Contenau, dans une recension d’ouvrage pour leJournal des savants Année 1928 Volume 10 Numéro 1 pp. 470-471. .
Odon Vallet, un spécialiste de l’histoire des religions reconnu, souligne à propos du voile, mais pas spécifiquement de la burqa, dans un article duMonde des religions de janvier-février 2012 : « C’est une prescription d’origine proche-orientale déjà mentionnée dans la tablette A 40 des lois assyriennes attribuées au roi Téglat-Phalazart Ier (vers 1000 avant J.-C.) ». Selon cette loi « les filles d’hommes libres sont obligées de porter le voile. Il est interdit aux prostituées de le porter ».
Le voile étant un élément de l’habillement traditionnel, point besoin de se couvrir pour passer incognito quand on est une femme de la haute société dans l’Antiquité.
Pour approcher de plus près le mythe de la déesse Astarté vous pouvez consulter leDictionnaire de la civilisation mésopotamienne : « Istar : Elle est la déesse la plus célèbre des déesses de Mésopotamie, sous son nom sumérien d’Inanna (variante Innin) ou sous celui, akkadien, d’Istar. (…). Le nom d’Istar est clairement sémitique et se rtattache aux formes de l’Ouest désignant la déesse sous les noms d’Attar, Astar(a)t et Astarté. » L’article qui lui est consacré dépeint une déesse de l’amour et de la féminité, dont les traits guerriers ne sont pas passés sous silence.
L’historien Jean Bottéro, dansAu commencement étaient les dieux évoque avec force détails les pratiques de ce que nous appellerons « prostitution sacrée » dans les temples de Sumer, dont la patronne et le modèle n’était autre que la déesse Innana (Ishtar, Astarté ). Il ne fait aucune mention d’un voile de pudeur permettant aux sumériennes de se refaire une réputation. Il s’agissait de professionnels de la prostitution, de l’un et l’autre sexe.
Vous trouverez une version chypriote de la déesse Astarté danscet article d’un érudit qui, bien qu’ayant mentionné les prostitué-e-s attaché-e-s au temple de la déesse, préfère s’attarder sur le cas des barbiers…. et n’évoque pas plus la question d’un voile : « Dans le monde syro-phénicien, Astarté était la divinité féminine la plus fameuse. Elle incarnait les instincts les plus profonds de la vie : l'amour, la reproduction, la fécondité. Elle était aussi la déesse des combats, la déesse guerrière, — une déesse de mort. Ce double aspect d' Astarté fut très bien exprimé dans ces vers de Plaute : Diva Astarté, hominum deorumque vis, vita, salus; rursus eadem quae est pernicies, mors, interitus « 0 divine Astarté, des hommes et des dieux (tu es) la force, la vie, le salut ; à l'inverse, (tu es) la même (déesse) qui est le malheur, la mort, le trépas ».
Certes, le monde sémitique connaissait d'autres déesses de l'amour et de la beauté : notamment la déesse Anat, et aussi la déesse Ashérat ; ce sont des répliques de la déesse Astarté. Celle-ci fut la plus illustre.
Dans le temple Astarté, à Kition, les fidèles adressaient à la déesse des hymnes, des supplications, des psaumes. Tous ces chants religieux s'accompagnaient des instruments de musique, et les poètes composaient de fervents cantiques en l'honneur de la sainte Souveraine, de la sublime Reine du ciel, de la plus brillante des étoiles du firmament. »
« La déesse babylonienne Ishtar n'est autre que la déesse phénicienne Ashtart (Astarté), dont le nom est pratiquement identique à Ishtar. Dans son beau livre sur Les religions du Proche-Orient asiatique1, René Labat, notre regretté confrère et ami, assyriologue accompli, a su présenter ses admirables traductions, notamment celles des antiques et mystiques prières adressées à Ishtar. »
Vous pouvez lire aussi :
-Sexe et amour de Sumer à Babylone ,
-L’érotisme sacré à Sumer et à Babylone ,
-La grande déesse ,
-Les mystères de la femme .
Bonnes recherches et bonne Journée des femmes !
Le courriel que vous avez reçu et dans lequel on prétend que la burka remonterait au culte d’Astarté n’est pas nouveau sur la toile. Ce « mythe » circule quasiment à l’identique depuis plusieurs années déjà, et illustre une fois encore la vieille thématique de « la maman et la putain », ici associée à l’islam, époque oblige.
Nous vous proposons de vous reporter à nos anciennes réponses sur
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S’il est avéré que le port du voile fut interdit en Turquie par Kemal Atatürk en 1937 après qu’il eut décrété la Turquie état laïc, et dans un souci d’occidentalisation (les hommes furent aussi interdits de turbans et de pantalons bouffants traditionnels), nous n’avons pas trouvé trace d’une mesure obligeant les prostituées à porter une burqa. Par ailleurs, le voile traditionnel des femmes des différentes régions de Turquie, outre qu’il ne portait pas le nom de burqa (terme d’origine pachtoune) n’en présentait pas non plus les caractéristiques, comme vous le constaterez sur
Le port du voile dans l’Antiquité du bassin méditerranéen et du Moyen-Orient semble avoir été plus une marque de distinction qu’une marque d’infamie. Déjà au XIIIe siècle avant Jésus-Christ, dans le code d’Hammourabi, le voile distinguait la femme libre de l’esclave. Des lois assyriennes découvertes sur des tablettes à Assur l’attestent aussi : « Un des passages les plus curieux des lois assyriennes est l'obligation pour la femme mariée de porter le voile ; cette obligation est en même temps un privilège, puisque ni les prostituées, ni les servantes n'auront droit au port du voile. S'agit-il comme on l'a pensé généralement du voile musulman dissimulant les traits du visage ? Je ne le crois pas ; il est question à plusieurs reprises de la dénonciation obligatoire pour ceux qui rencontrent des femmes voilées n'ayant pas droit au voile. La chose se comprend mieux si nous admettons un voile comme nous le représentent les bas-reliefs de Zend- jirli et de Karkémish figurant des divinités ou des prêtresses. Du sommet de leur coiffure en forme de tiare, s'épand un voile descendant jusqu'aux pieds et assez large pour envelopper le corps comme d'un manteau, mais laissant le visage découvert. Nulle difficulté, par suite, à reconnaître une femme qui n'étant pas de la classe voilée en portait cependant l'insigne. » G. Contenau, dans une recension d’ouvrage pour le
Odon Vallet, un spécialiste de l’histoire des religions reconnu, souligne à propos du voile, mais pas spécifiquement de la burqa, dans un article du
Le voile étant un élément de l’habillement traditionnel, point besoin de se couvrir pour passer incognito quand on est une femme de la haute société dans l’Antiquité.
Pour approcher de plus près le mythe de la déesse Astarté vous pouvez consulter le
L’historien Jean Bottéro, dans
Vous trouverez une version chypriote de la déesse Astarté dans
Certes, le monde sémitique connaissait d'autres déesses de l'amour et de la beauté : notamment la déesse Anat, et aussi la déesse Ashérat ; ce sont des répliques de la déesse Astarté. Celle-ci fut la plus illustre.
Dans le temple Astarté, à Kition, les fidèles adressaient à la déesse des hymnes, des supplications, des psaumes. Tous ces chants religieux s'accompagnaient des instruments de musique, et les poètes composaient de fervents cantiques en l'honneur de la sainte Souveraine, de la sublime Reine du ciel, de la plus brillante des étoiles du firmament. »
« La déesse babylonienne Ishtar n'est autre que la déesse phénicienne Ashtart (Astarté), dont le nom est pratiquement identique à Ishtar. Dans son beau livre sur Les religions du Proche-Orient asiatique1, René Labat, notre regretté confrère et ami, assyriologue accompli, a su présenter ses admirables traductions, notamment celles des antiques et mystiques prières adressées à Ishtar. »
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