Question d'origine :
Bonjour, Je recherche des informations sur la confirmation par Alphonse VI de Léon du testament de Gonzalo Ferrandiz en faveur de l'abbaye de Shagun de 1080. Je ne trouve aucune information à son propos, pourriez vous m'aider à comprendre comment cette confirmation du testament par Alphonse VI lui permet de glorifier l'abbaye de Sahagun en même temps que de glorifier son propre pouvoir royal. Merci à vous, vous êtes super
Réponse du Guichet

Bonjour,
Le règne d’Alfonse VI sur la province de Léon (1065-1109), mais également sur les provinces de Galice, de Tolède et de Castille se situe au moment d’un basculement de l’influence musulmane au profit des Chrétiens dans la dynamique de la « Reconquista ».
Par ailleurs, comme l’indique cet article du site d’histoire Notimestore, c’est aussi une phase d’« ouverture de l’Espagne au monde outre-pyrénéen […]. Le monde chrétien ibérique s’ouvre aux cultures « européennes » que ce soit avec le royaume des Francs, l’Italie ou bien même la papauté ».
Pour comprendre l’attrait d’Alphonse Vi sur cette abbaye, on peut s’appuyer sur cet article de Charles Garcia paru dans la Revue E-Spania.
« La vieille abbaye bénédictine, qui fut le véritable pivot de la politique d’aggiornamento alphonsine, sut tirer profit des nombreux séjours prolongés du monarque et de sa cour à l’intérieur de ses murs. Le roi, suivant en cela l’exemple qu’avait donné son père Ferdinand Ier, résida dans les dépendances du monastère de façon pour ainsi dire continue […].Cette "dilectio" du prince pour le monastère n’était pas nouvelle. Elle confirmait un attachement prolongé pour l’institution qu’Alphonse avait déjà affiché en 1080 lorsqu’il avait choisi cette enceinte sacrée comme lieu de sépulture pour lui et les siens ».
Alphonse VI lui-même fit de généreuses donations au monastère pour conforter la domination de ce lieu sur la région. Aussi, peut-on raisonnablement faire l’hypothèse qu’Alphonse avait à cœur que les nobles (ou magnats) de son royaume viennent par leur contributions, confirmer et reconnaître l’importance de ce lieu, cœur géographique du règne.
Charles Garcia le souligne dans son article : « comme par un mouvement d’entraînement, les riches donations royales incitèrent la noblesse à en faire autant. La profusion de cette généreuse politique aboutit, comme on pouvait s’y attendre, à placer l’abbaye bénédictine à la tête d’un fabuleux réseau de propriétés foncières, de prieurés et de droits de toute nature qui s’étendaient depuis la région enclavée de la Liébana, dans les monts Cantabriques, jusqu’aux limites méridionales de la Tierra de Campos ».
C’est sans doute la raison principale de cette confirmation du testament de Gonzalo Ferrandiz.
Plus globalement, il faut noter que Sahagun constitue, en quelque sorte, le fer de lance d’une réforme religieuse qui joue en faveur de l’ordre clunisien, consolidant les liens avec les royaumes chrétiens européens.
Si l’on en croit la notice Wikipedia consacrée à Alphonse VI, celui-ci travaille à « renforcer ses alliances à l'échelle de l'Europe. Sous l'influence, dit-on, de sa femme Constance (nièce de l'abbé Hugues de Cluny), il développe l'ordre clunisien dans son royaume, l'établissant à Sahagún, et choisit un clunisien français, Bernard de Sédirac, comme premier archevêque de Tolède après la reconquête ». Sahagun n’est pas qu’on choix de cœur, c’est aussi un choix résolument politique et même géopolitique.
« La renommée de Cluny […] incita Ferdinand Ier puis Alphonse VI à attribuer à l’abbaye bourguignonne une partie des parias versées par les rois des taifas musulmanes. Des envoyés de Cluny et des légats du pape se succédèrent à la cour pendant la seconde moitié du siècle, jusqu’à ce que le roi prît la décision, vers 1080, d’abandonner le rite wisigothique au profit du rite romain […]. En abandonnant le rite et l’écriture wisigothiques, le roi paraissait trahir, au profit de Rome ou des “Français”, les fondements mêmes de la royauté hispanique. Il avait en réalité sacrifié des symboles et restait le chef de file de l’Eglise, le vicaire de Dieu et le responsable de l’orthodoxie de la foi dans son royaume ». (Source : Adeline Rucquoi, Histoire médiévale de la péninsule ibérique, paru au Seuil en 1993).
Bonnes lectures !
Le règne d’Alfonse VI sur la province de Léon (1065-1109), mais également sur les provinces de Galice, de Tolède et de Castille se situe au moment d’un basculement de l’influence musulmane au profit des Chrétiens dans la dynamique de la « Reconquista ».
Par ailleurs, comme l’indique cet article du site d’histoire Notimestore, c’est aussi une phase d’« ouverture de l’Espagne au monde outre-pyrénéen […]. Le monde chrétien ibérique s’ouvre aux cultures « européennes » que ce soit avec le royaume des Francs, l’Italie ou bien même la papauté ».
Pour comprendre l’attrait d’Alphonse Vi sur cette abbaye, on peut s’appuyer sur cet article de Charles Garcia paru dans la Revue E-Spania.
« La vieille abbaye bénédictine, qui fut le véritable pivot de la politique d’aggiornamento alphonsine, sut tirer profit des nombreux séjours prolongés du monarque et de sa cour à l’intérieur de ses murs. Le roi, suivant en cela l’exemple qu’avait donné son père Ferdinand Ier, résida dans les dépendances du monastère de façon pour ainsi dire continue […].Cette "dilectio" du prince pour le monastère n’était pas nouvelle. Elle confirmait un attachement prolongé pour l’institution qu’Alphonse avait déjà affiché en 1080 lorsqu’il avait choisi cette enceinte sacrée comme lieu de sépulture pour lui et les siens ».
Alphonse VI lui-même fit de généreuses donations au monastère pour conforter la domination de ce lieu sur la région. Aussi, peut-on raisonnablement faire l’hypothèse qu’Alphonse avait à cœur que les nobles (ou magnats) de son royaume viennent par leur contributions, confirmer et reconnaître l’importance de ce lieu, cœur géographique du règne.
Charles Garcia le souligne dans son article : « comme par un mouvement d’entraînement, les riches donations royales incitèrent la noblesse à en faire autant. La profusion de cette généreuse politique aboutit, comme on pouvait s’y attendre, à placer l’abbaye bénédictine à la tête d’un fabuleux réseau de propriétés foncières, de prieurés et de droits de toute nature qui s’étendaient depuis la région enclavée de la Liébana, dans les monts Cantabriques, jusqu’aux limites méridionales de la Tierra de Campos ».
C’est sans doute la raison principale de cette confirmation du testament de Gonzalo Ferrandiz.
Plus globalement, il faut noter que Sahagun constitue, en quelque sorte, le fer de lance d’une réforme religieuse qui joue en faveur de l’ordre clunisien, consolidant les liens avec les royaumes chrétiens européens.
Si l’on en croit la notice Wikipedia consacrée à Alphonse VI, celui-ci travaille à « renforcer ses alliances à l'échelle de l'Europe. Sous l'influence, dit-on, de sa femme Constance (nièce de l'abbé Hugues de Cluny), il développe l'ordre clunisien dans son royaume, l'établissant à Sahagún, et choisit un clunisien français, Bernard de Sédirac, comme premier archevêque de Tolède après la reconquête ». Sahagun n’est pas qu’on choix de cœur, c’est aussi un choix résolument politique et même géopolitique.
« La renommée de Cluny […] incita Ferdinand Ier puis Alphonse VI à attribuer à l’abbaye bourguignonne une partie des parias versées par les rois des taifas musulmanes. Des envoyés de Cluny et des légats du pape se succédèrent à la cour pendant la seconde moitié du siècle, jusqu’à ce que le roi prît la décision, vers 1080, d’abandonner le rite wisigothique au profit du rite romain […]. En abandonnant le rite et l’écriture wisigothiques, le roi paraissait trahir, au profit de Rome ou des “Français”, les fondements mêmes de la royauté hispanique. Il avait en réalité sacrifié des symboles et restait le chef de file de l’Eglise, le vicaire de Dieu et le responsable de l’orthodoxie de la foi dans son royaume ». (Source : Adeline Rucquoi, Histoire médiévale de la péninsule ibérique, paru au Seuil en 1993).
Bonnes lectures !
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