Question d'origine :
J’ai lu récemment le livre de Sylvain Prudhomme « Par les routes » Je voudrais savoir quelle est la ville de V. où se déroule l’histoire et pour quelle raison l’auteur décide d’appeler l’un des protagonistes l’autostoppeur. Le lecteur ne sait pas quel est le prénom du personnage comme si l’auteur avait décidé de gommer son identité.
Réponse du Guichet
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- Département : Langues et Littératures
Le 25/01/2021 à 16h31
Bonjour,
Sylvain Prudhomme ne s'en cache pas. La petite ville provençale de V. n'est autre que la ville d'Arles dans laquelle il réside.
"Dans mon livre, je parle de la ville de V., tous les Arlésiens voient bien qu'il s'agit d'Arles. Je l'avais d'ailleurs déjà nommée, dans Légende. Je me sens bien à Arles et en Provence depuis que j'y habite, j'ai trouvé un équilibre précieux dans la douceur de la ville. Elle est très stimulante, il s'y passe plein de choses, avec beaucoup de gens qui sont dans une démarche de création culturelle. Je m'y sens bien, aussi, parce que beaucoup de gens partagent les valeurs du livre, sont capables d'ouvrir leur porte à l'autre, à l'étranger. Et je trouve que cette ambiance-là est inspirante." (Entretien de Sylvain Prudhomme dans le quotidien La Provence).
Dans son roman "Par les routes", la même indétermination poétique frappe le personnage dit de « l’auto-stoppeur ». Ce flou renvoie, nous semble-t-il, à l’identité insaisissable, mouvante de ce personnage.
Une identité que l’on pourrait même qualifier de fuyante, sur le point de se dissoudre.
En effet, « l’auto-stoppeur » se détache peu à peu mais irrémédiablement de tout ce qui le rattache aux normes d'une vie sociale classique : une femme, un enfant, un logement.
A ce propos, ce mystérieux personnage nous évoque très fortement la figure de Rimbaud, qui, lui aussi, en son temps, a fait le choix de se débarrasser des convenances sociales et bourgeoises pour se perdre dans une vie d’aventures entre l’Abyssinie et Aden.
« L ‘autostoppeur » n’en vient finalement à ne plus exister que par ses incessants déplacements. Et son identité s’en trouve ainsi transformée, réduite à ce mouvement. Jusqu’à tendre à l’abstraction.
Cette indétermination nous prépare donc à sa disparition. Peu à peu, ses attaches avec le monde réel deviennent moins perceptibles. Ses retours, ses lettres deviennent moins fréquents. Et enfin, il disparaît totalement, laissant le narrateur, Sacha, seul face à lui-même. Une ambiguité s’instille alors en nous. Ce personnage, si insaisissable, tant admiré, tant envié, ne l’avons-nous pas rêvé, de même que le narrateur ? A-t-il une existence propre ? N’est-il pas plutôt un double plus libre, plus radical du narrateur ? Une autre identité possible qui aurait pu advenir si les choix de Sacha avaient été différents, s’il était allé au bout de ses désirs de jeunesse ?
Bien à vous,
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