D'où provient la blague « Pas de bras, pas de chocolat » ?
CIVILISATION
+ DE 2 ANS
Le 17/02/2021 à 00h33
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Question d'origine :
D'où provient la blague « Pas de bras, pas de chocolat » ?
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 17/02/2021 à 08h23
Bonjour,
Il est souvent difficile de retrouver les origines des expressions populaires, surtout lorsque celles-ci appartiennent à un genre littéraire aussi exclusivement oral que la blague. Ainsi, interrogé par 20 minutes, l'auteur de recueils d'histoires drôles Frédéric Pouhier ne peut situer la naissance de la blague "pas de bras, pas de chocolat " que dans le vaste et protéiforme espace des... cours d'école françaises . Et pointe au passage une dynamique cyclique de la diffusion de ce type de blagues :
"Mais d’où viennent ces blagues que l’on connaît tous par cœur, un peu comme si elles faisaient partie intégrante de notre ADN ? Les romains rigolaient-ils déjà sur « pas de bras pas de chocolat » ? Charlemagne pleurait-il de rire sur « toc toc toc, qui est là » ? « C’est très très compliqué de dater des blagues, voire impossible », a expliqué à 20 Minutes Frédéric Pouhier, auteur de nombreux livres d’humour, entre autres aux éditions Tut-tut. « Généralement, elles naissent dans les cours d’écoles. Dans les années 1960, c’était la mode des blagues sur les fous, dans les années 1960 celles de » Toto «, puis on a eu les « ta mère »… "
Des tendances de vannes donc, qui comme le pantalon patte d’eph, ont la fâcheuse tendance de pointer régulièrement le bout de leur nez. « Il y a quelque chose de cyclique avec la blague, et c’est intéressant de voir qu’elles reviennent généralement à la mode tous les dix ans ». L’être humain tournerait donc en boucle. Rien de très surprenant ceci dit."
L'article remarque également que l'expression "pas de bras pas de chocolat" a fini par se détacher du récit initial d'où elle est tirée, pour devenir un proverbe en usage en France, et signale que celui-ci jouit de sa propre page Wikipédia, laquelle fait référence à ce qui est peut-être la première occurrence, non pas écrite, mais gravée de la locution : le single du DJPhilippe Corti Pas de bras, pas de chocolat, paru en 1990.
Depuis, l'usage de l'expression a fait florès, notamment dans la publicité, si on en croit Culture pub. Elle est également citée dans le film a succès d'Eric Toledano et Olivier Nakache Intouchables, dans la bouche du comédien Omar Sy où, selon un article de Michèle Bissière et Nathalie Degroult, il participe de la dédramatisation par l'humour noir de la situation de handicap :
"L’humour s’exerce le plus souvent aux dépens de Philippe, sous forme de faux-pas ou de vannes de la part de Driss. Au début de son apprentissage, par exemple, il tend souvent le téléphone à Philippe ou lui dit de ne pas se lever pour le raccompagner. Parmi les nombreuses vannes, on peut citer la fameuse “pas de bras, pas de chocolat ,” que Driss emprunte à la publicité et applique littéralement à Philippe quand celui-ci lui demande un chocolat, ou bien “Où est-ce qu’on trouve un tétra? Ben, là où on l’a laissé.” Dans l’ensemble, les spectateurs handicapés ont réagi positivement, appréciant le refus de l’apitoiement et le fait que le handicap reste au second plan derrière l’histoire d’amitié. Pour le président de l’Apajh (Association pour Adultes et Jeunes Handicapés), l’humour est parfois limite, mais c’est “un moyen de faire tomber le handicap dans le domaine de l’ordinaire” (Rocfort-Giovanni)."
(Source : Michèle Bissière et Nathalie Degroult, "Intouchables: étude d'un film populaire à grand succès", lien pdf sur frenchteachers.org)
Dans son article "Proverbiogenèse et obsolescence : la naissance et la mort des proverbes" (consultable sur hal.archives-ouvertes.fr, Damien Villers attribue d'ailleurs au film la mutation de la chute de la blague en proverbe, détaché de son contexte, plus d'une vingtaine d'années après son apparition dans les cours d'école.
Nous savons par Google livres que l'expression a droit à une entrée dans l'ouvrage On va le dire comme ça [Livre] : dictionnaire des expressions quotidiennes / Charles Bernet et Pierre Rézeau ; préface de Jean Artarit. Pour des raisons liées au télétravail, nous ne pouvons pour l'instant accéder à ce livre, mais il contient peut-être des pistes intéressantes.
Bonne journée.
Il est souvent difficile de retrouver les origines des expressions populaires, surtout lorsque celles-ci appartiennent à un genre littéraire aussi exclusivement oral que la blague. Ainsi, interrogé par 20 minutes, l'auteur de recueils d'histoires drôles Frédéric Pouhier ne peut situer la naissance de la blague "
"Mais d’où viennent ces blagues que l’on connaît tous par cœur, un peu comme si elles faisaient partie intégrante de notre ADN ? Les romains rigolaient-ils déjà sur « pas de bras pas de chocolat » ? Charlemagne pleurait-il de rire sur « toc toc toc, qui est là » ? « C’est très très compliqué de dater des blagues, voire impossible », a expliqué à 20 Minutes Frédéric Pouhier, auteur de nombreux livres d’humour, entre autres aux éditions Tut-tut. « Généralement, elles naissent dans les cours d’écoles. Dans les années 1960, c’était la mode des blagues sur les fous, dans les années 1960 celles de » Toto «, puis on a eu les « ta mère »… "
Des tendances de vannes donc, qui comme le pantalon patte d’eph, ont la fâcheuse tendance de pointer régulièrement le bout de leur nez. « Il y a quelque chose de cyclique avec la blague, et c’est intéressant de voir qu’elles reviennent généralement à la mode tous les dix ans ». L’être humain tournerait donc en boucle. Rien de très surprenant ceci dit."
L'article remarque également que l'expression "pas de bras pas de chocolat" a fini par se détacher du récit initial d'où elle est tirée, pour devenir un proverbe en usage en France, et signale que celui-ci jouit de sa propre page Wikipédia, laquelle fait référence à ce qui est peut-être la première occurrence, non pas écrite, mais gravée de la locution : le single du DJ
Depuis, l'usage de l'expression a fait florès, notamment dans la publicité, si on en croit Culture pub. Elle est également citée dans le film a succès d'Eric Toledano et Olivier Nakache Intouchables, dans la bouche du comédien Omar Sy où, selon un article de Michèle Bissière et Nathalie Degroult, il participe de la dédramatisation par l'humour noir de la situation de handicap :
"L’humour s’exerce le plus souvent aux dépens de Philippe, sous forme de faux-pas ou de vannes de la part de Driss. Au début de son apprentissage, par exemple, il tend souvent le téléphone à Philippe ou lui dit de ne pas se lever pour le raccompagner. Parmi les nombreuses vannes, on peut citer la fameuse “
(Source : Michèle Bissière et Nathalie Degroult, "Intouchables: étude d'un film populaire à grand succès", lien pdf sur frenchteachers.org)
Dans son article "Proverbiogenèse et obsolescence : la naissance et la mort des proverbes" (consultable sur hal.archives-ouvertes.fr, Damien Villers attribue d'ailleurs au film la mutation de la chute de la blague en proverbe, détaché de son contexte, plus d'une vingtaine d'années après son apparition dans les cours d'école.
Nous savons par Google livres que l'expression a droit à une entrée dans l'ouvrage On va le dire comme ça [Livre] : dictionnaire des expressions quotidiennes / Charles Bernet et Pierre Rézeau ; préface de Jean Artarit. Pour des raisons liées au télétravail, nous ne pouvons pour l'instant accéder à ce livre, mais il contient peut-être des pistes intéressantes.
Bonne journée.
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