Question d'origine :
Bonjour, Dans son ouvrage Pourquoi la Grèce (Le livre de poche, 1994, p. 31), Jacqueline de Romilly évoque la mythologie arménienne : "En Arménie, de même, on trouve des héros dont la lèvre inférieure traîne jusque par terre, ou qui soulèvent d'un coup une poussière qui reste un jour et une nuit...". Pourriez-vous m'indiquer à quels héros l'auteur fait référence ? En vous remerciant d'avance. Sincères salutations. J. Lecouturier
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 23/03/2021 à 11h26
Bonjour,
Jacqueline de Romilly évoque effectivement rapidement et en quelques lignes, la mythologie arménienne. Ne mentionnant pas les références où elle a trouvé mention de ces héros, nous avons mené notre enquête en nous plongeant dans les légendes d’Arménie.
Stepan Ahyan dans son article Les débuts de l’histoire d’Arménie et les trois fonctions indo-européennes in la Revue de l'histoire des religions, pose le cadre de cette mythologie :
« Si le système des dieux indigènes de l'Arménie avant l'influence iranienne n'est pas connu, l'idéologie qui le fondait subsiste, comme il est arrivé chez d'autres peuples indo-européens, dans les récits fabuleux des origines, dans l'« histoire » des premiers chefs. Se succèdent ainsi : un fondateur surhumain, puis son fils, tout humain et organisateur, dont l'œuvre est prolongée, sans nuance, par ses premiers descendants ; puis un roi guerrier, tout occupé de conquêtes ; puis deux rois homonymes, père et fils, tous deux impropres à la guerre, dont le destin dépend de l'amour passionné d'une femme.
Les deux premiers souverains trouvent des correspondants précis dans la mythologie védique (Varuna-Mitra) comme dans l'histoire romaine (Romulus-Numa) ; les deux derniers rappellent, par leurs rapports et par leurs destins respectifs, le couple scandinave des dieux Vanes, Njördr et Freyr, et, dans l'épopée danoise, le couple des rois Hadingus et Frotho qui en est la transposition. »
Malgré nos recherches, nous n’avons pas croisé de héros ayant les attributs décrits par Jacqueline de Romilly. La mythologie arménienne est constituée d’un panthéon de divinités et créatures légendaires mal connues.
L’écrit le plus ancien à ce sujet est L'histoire de l'Arménie de Moïse de Khorène, historien arménien du Ve siècle qui retrace l'histoire du pays des origines jusqu'au Ve siècle où se mêlent les traditions orales de l'Arménie païenne, et le point de vue chrétien sur le sujet.
Il faut préciser que l’Arménie fut le premier royaume à devenir officiellement chrétien en 301 sous le règne de Tiridate IV. Les anciens mythes et légendes furent transformés et les personnages bibliques héritèrent des fonctions des anciennes divinités. A partir de là, un syncrétisme certain se fait dans les croyances arméniennes, mêlant paganisme ancien et religion chrétienne.
Comme le précise cet article Wikipedia :
« La mythologie arménienne semble avoir été fortement influencée par le zoroastrisme, avec des divinités comme Aramazd, Mihr ou Anahit (équivalent de Ahura Mazda, Mithra ou Anahita), et par les traditions assyriennes. On trouve cependant des éléments de traditions propres, avec Haïk, Vahagn et Astghik. Il y aurait aussi des ressemblances avec la mythologie indienne, qui pourraient peut-être provenir d'une mythologie commune aux Indo-Européens (dont les Arméniens font partie). On retrouve certains éléments des rituels de cette religion dans les pratiques de certaines traditions arméniennes qui ont perduré jusqu'au début du XXe siècle, bien que le polythéisme ait été supplanté par le christianisme à partir du IVe siècle.»
Voici enfin comment la mythologie arménienne est définie dans le Dictionnaire des mythologies et des religions des sociétés traditionnelles et du monde antique sous la direction d’Yves Bonnefoi :
« Le paganisme des anciens Arméniens nous demeure pratiquement inaccessible. Nous le connaissons seulement à travers les historiens et les chroniqueurs du haut Moyen Age, sous sa forme iranisée, une sorte de version locale du mazdéisme. A l’autre extrémité de l’histoire, les folkloristes en donnent une image fortement christianisée, où il est difficile, plus difficile qu’en Géorgie, de déceler les vieilles croyances sous leur vêtement chrétien. Même là, malgré l’ancienneté de la conversion au christianisme (Ive siècle), ce sont surtout des concepts mazdéens qui se laissent encore deviner. La pensée religieuse s’y révèle dominée par des couples de concepts opposés chers à la doctrine de Zarathustra : la lumière bonne, face à la ténèbre mauvaise, respectivement servis par des anges et des démons.
Avant la conversion au christianisme, la place du Dieu suprême était dévolue à une entité nommée Aramazd qui avait un temple à Ani, la grande citadelle de l’Arménie classique.
La version arménienne du mazdéisme garde son originalité, d’abord en raison du syncrétisme qui s’y est exercé, ensuite parce qu’il semble bien que l‘influence iranienne provienne aussi d’éléments religieux extérieurs et probablement plus populaires. »
Pour aller plus loin :
Pour avoir le détail du panthéon arménien, nous vous conseillons ce site : mythslegendes.com
Histoire de l'Arménie / Moïse de Khorène
Contes et légendes d’Arménie / Henri Siranyan
Fables et légendes d'Arménie et d'Iran / Vrtanès Papazian
Les plus anciens contes de l'humanité : mythes et légendes d'il y a 3.500 ans / Edition Theodor H. Gaster
Jacqueline de Romilly évoque effectivement rapidement et en quelques lignes, la mythologie arménienne. Ne mentionnant pas les références où elle a trouvé mention de ces héros, nous avons mené notre enquête en nous plongeant dans les légendes d’Arménie.
Stepan Ahyan dans son article Les débuts de l’histoire d’Arménie et les trois fonctions indo-européennes in la Revue de l'histoire des religions, pose le cadre de cette mythologie :
« Si le système des dieux indigènes de l'Arménie avant l'influence iranienne n'est pas connu, l'idéologie qui le fondait subsiste, comme il est arrivé chez d'autres peuples indo-européens, dans les récits fabuleux des origines, dans l'« histoire » des premiers chefs. Se succèdent ainsi : un fondateur surhumain, puis son fils, tout humain et organisateur, dont l'œuvre est prolongée, sans nuance, par ses premiers descendants ; puis un roi guerrier, tout occupé de conquêtes ; puis deux rois homonymes, père et fils, tous deux impropres à la guerre, dont le destin dépend de l'amour passionné d'une femme.
Les deux premiers souverains trouvent des correspondants précis dans la mythologie védique (Varuna-Mitra) comme dans l'histoire romaine (Romulus-Numa) ; les deux derniers rappellent, par leurs rapports et par leurs destins respectifs, le couple scandinave des dieux Vanes, Njördr et Freyr, et, dans l'épopée danoise, le couple des rois Hadingus et Frotho qui en est la transposition. »
Malgré nos recherches, nous n’avons pas croisé de héros ayant les attributs décrits par Jacqueline de Romilly. La mythologie arménienne est constituée d’un panthéon de divinités et créatures légendaires mal connues.
L’écrit le plus ancien à ce sujet est L'histoire de l'Arménie de Moïse de Khorène, historien arménien du Ve siècle qui retrace l'histoire du pays des origines jusqu'au Ve siècle où se mêlent les traditions orales de l'Arménie païenne, et le point de vue chrétien sur le sujet.
Il faut préciser que l’Arménie fut le premier royaume à devenir officiellement chrétien en 301 sous le règne de Tiridate IV. Les anciens mythes et légendes furent transformés et les personnages bibliques héritèrent des fonctions des anciennes divinités. A partir de là, un syncrétisme certain se fait dans les croyances arméniennes, mêlant paganisme ancien et religion chrétienne.
Comme le précise cet article Wikipedia :
« La mythologie arménienne semble avoir été fortement influencée par le zoroastrisme, avec des divinités comme Aramazd, Mihr ou Anahit (équivalent de Ahura Mazda, Mithra ou Anahita), et par les traditions assyriennes. On trouve cependant des éléments de traditions propres, avec Haïk, Vahagn et Astghik. Il y aurait aussi des ressemblances avec la mythologie indienne, qui pourraient peut-être provenir d'une mythologie commune aux Indo-Européens (dont les Arméniens font partie). On retrouve certains éléments des rituels de cette religion dans les pratiques de certaines traditions arméniennes qui ont perduré jusqu'au début du XXe siècle, bien que le polythéisme ait été supplanté par le christianisme à partir du IVe siècle.»
Voici enfin comment la mythologie arménienne est définie dans le Dictionnaire des mythologies et des religions des sociétés traditionnelles et du monde antique sous la direction d’Yves Bonnefoi :
« Le paganisme des anciens Arméniens nous demeure pratiquement inaccessible. Nous le connaissons seulement à travers les historiens et les chroniqueurs du haut Moyen Age, sous sa forme iranisée, une sorte de version locale du mazdéisme. A l’autre extrémité de l’histoire, les folkloristes en donnent une image fortement christianisée, où il est difficile, plus difficile qu’en Géorgie, de déceler les vieilles croyances sous leur vêtement chrétien. Même là, malgré l’ancienneté de la conversion au christianisme (Ive siècle), ce sont surtout des concepts mazdéens qui se laissent encore deviner. La pensée religieuse s’y révèle dominée par des couples de concepts opposés chers à la doctrine de Zarathustra : la lumière bonne, face à la ténèbre mauvaise, respectivement servis par des anges et des démons.
Avant la conversion au christianisme, la place du Dieu suprême était dévolue à une entité nommée Aramazd qui avait un temple à Ani, la grande citadelle de l’Arménie classique.
La version arménienne du mazdéisme garde son originalité, d’abord en raison du syncrétisme qui s’y est exercé, ensuite parce qu’il semble bien que l‘influence iranienne provienne aussi d’éléments religieux extérieurs et probablement plus populaires. »
Pour aller plus loin :
Pour avoir le détail du panthéon arménien, nous vous conseillons ce site : mythslegendes.com
Histoire de l'Arménie / Moïse de Khorène
Contes et légendes d’Arménie / Henri Siranyan
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