Question d'origine :
Vers le IIe siècle de l’ère chrétienne, existait une ville gallo-romaine d’importance : Noviomagus. De cette époque, seule la Géographie, de Claude Ptolémée, nous est parvenue. Selon les auteurs, Noviomagus est situé soit à Brion (Médoc) soit à Talmont (site archéologique du Fâ, Saintonge).
Sur d'autres sources, le site du Fâ est appelé Novioregum : le changement de nom Noviomagus pour Novioregum est-il l'explication ?
Merci de votre éclairage.
Réponse du Guichet

Du temps des Gallo-romains, en Gironde, deux grands ports rivalisaient, l’un était nommé Burdigala et l’autre Noviomagus. Ces deux villes, ainsi que leurs localisations sont citées par Ptolémée, un érudit grecque. Pourtant cinquante ans après, seul le port de Burdigala, qui deviendra par la suite Bordeaux, subsiste ; Noviomagus n’apparaîtra plus sur les cartes.
Le plus simple, pour retrouver Noviomagus serait de reprendre les coordonnées de Ptolémée, homme de foi si l’on en croit sa biographie. Le problème est qu’aucune ville ne correspond à ses coordonnées. Plus aucune ville ne répond au nom de Noviomagus.
Beaucoup d’hypothèses ont été avancées : la ville a très certainement dû être détruite. Les seuls sites dans les alentours à comporter des vestiges Gallo-romains se trouvent à Brion (dans le Médoc) et au Fâ de Talmont, près de Royan.
A moins que Noviomagus et Brion de fassent qu'un ?…
La seconde hypothèse serait que la ville ait été engloutie, et à partir de là beaucoup de sites ont été avancés par les marins pêcheurs pour embellir leur légende. Parmi les endroits les plus connus, nous pouvons citer le banc des Olives (sur la côte) ou dans l’estuaire même de la Gironde…
Malgré cela, aucune ruine n’a été aperçue en surface et plonger s'avéra impossible du fait des courants très dangereux qui règnent dans l’estuaire de la Gironde.
Dans un premier temps, le site au Fâ de Talmont, près de Royan, a été mis en avant car beaucoup de vestiges gallo-romains y ont été retrouvés. De plus, le nom de cette ville était Novioregum qui se rapproche étrangement de la ville disparue. Toutefois, le texte de Ptolémée, qui permet de situer Noviomagus, stipule qu’elle se situait sur la rive gauche de la Gironde, alors que Talmont est sur la rive droite. En outre, l’interprétation des coordonnées de Ptolémée semble peu compatible avec une localisation aussi éloignée de Burdigala. Enfin, le changement de nom Noviomagus pour Novioregum, reste très hypothétique.
S’opposant à ce site, les défenseurs du site de Brion comme le Noviomagus de Ptolémée apportent plus d’arguments. Tout d’abord, les vestiges gallo-romains correspondent à la datation d’une ville du 1er siècle de notre ère. Ils avancent aussi l’argument des coordonnées. En effet, la situation géographique est conforme au texte de Ptolémée. L’étymologie même du mot Noviomagus (nouveau marché) semble correspondre parfaitement aux possibilités de commerce et d’échanges d’un port rivalisant avec Burdigala.
Source : académie de Bordeaux
Les vestiges découverts sur le site archéologique du hameau de Brion, sur la commune de Saint-Germain-d'Esteuil (Gironde), sont ceux d'une cité gallo-romaine construite vers le milieu du Ier s., abandonnée quelques siècles plus tard et depuis oubliée des hommes. On a pu l'identifier à Noviomagus, citée par le savant grec Ptolémée vers 130 dans sa "Géographie" comme étant l'une des vingt villes de l'Aquitaine romaine.
Source : cyberceltes
Les vestiges visibles du site archéologique de Brion sont ceux d'une ville gallo-romaine construite vers le milieu du premier siècle de notre ère. Abandonnée quelques siècles plus tard cette ville fut longtemps ignorée.
Il apparaît maintenant que, selon toute vraisemblance, ce fut celle que le savant grec Ptolémée citait dans sa "Géographie", vers l'an 130 de notre ère, sous le nom de "NOVIOMAGUS".
Noviomagus était alors, avec Burdigala, le Bordeaux antique, l'une des vingt villes de l'Aquitaine romaine qui s'étendait de la Loire aux Pyrénées.
Une implantation urbaine en cet endroit semble aujourd'hui insolite, mais il y a 2000 ans la situation était très différente : le site se trouvait alors, vraisemblablement, sur une île, au fond d'une vaste baie en communication avec la Gironde, une baie qui, progressivement comblée puis assainie, est devenue le marais de Reysson
Source : Musée du patrimoine du site archéologique de Brion
Une autre source confirme ces propos : dans l’Atlas des villes, bourgs, villages de France au passé romain, de Robert Bedon, en cherchant dans l’index, une (et une seule) cité appelée Nouiomagus se situe en Gironde (les autres sont Lisieux et Nyon), à Saint-Germain-d’Esteuil : « l’agglomération occupait une plate-forme, l’actuel lieu dit Brion, qui s’allonge du sud-ouest au nord-est, dominant de quelques mètres le marais de Raysson qui la borde au sud-est. »
Les sources cités par l’auteur sont : « Ptolémée, II, 7, 7 (dans l’hypothèse d’une identification Saint-Germain-d’Esteuil-Nouiomagus) »
L’autre piste que vous évoquez, celle du site gallo-romain du Fâ, à Barzan, à 2 km de Talmont semble ne pas correspondre à Noviomagus mais à Novioregum. Cette conclusion que vous lirez sur le site archéologique du Fâ, a été réalisée à partir des itinéraires romains anciens (recueils de listes de villes et des distances intermédiaires), des textes anciens, cartes et portulans (listes de ports et points remarquables des côtes), de la métrique des voies (repérage sur carte des routes, calvaires, limites administratives... survenant au long d'une voie à des distances régulières, révélatrices d'un bornage antique), de la toponymie (noms révélateurs d'une voie ancienne : La Chaussée, Caussade, chemin Boisné, etc.), et surtout de photographies aériennes.
La version de Jean-Pierre Picot est différente : dans son Dictionnaire historique de la gaule, des origines à Clovis, il donne trois localisations possibles pour les villes portant le nom Noviomagus :
1- la ville principale des Némètes, aujourd’hui Spire
2- la ville des Lexoviens, de nos jours, la ville de Lisieux
3- ancien port de l’Antiquité, englouti par la mer. Il se situait à Soulac-sur-mer, en Gironde
Cette dernière hypothèse nous ramène elle aussi à Brion : ce site de toponymie (site perso) nous dit : Soulac était autrefois un port de grande importance sur la Gironde, servant d'intermédiaire entre l'océan et la Gironde, servant également d'avant-port à Bordeaux.
Au XIII° siècle, les rois d'Angleterre y prenaient la mer. Sa rade, aujourd'hui à peine marquée, se trouvait à l'extrêmité de l'île du Médoc.
On a longtemps cru que là se trouvait le port gallo-romain de Noviomagus, cité par Claude Ptolémée dans sa géographie, qui se trouve en réalité à Saint-Germain-d'Esteuil. Toutefois, il existe bien dans les marais qui séparent aujourd'hui Soulac de l'intérieur de la Gironde des restes d'un autre port, Vieux-Soulac, probablement ensablé vers le VI° siècle. Selon la tradition locale, le port de Vieux-Soulac aurait servi de point de départ au I° siècle de plusieurs campagnes d'évangélisation de l'Aquitaine par Zachée, son épouse Véronique et Saint Martial.
Pour finir, ce site sur l’estuaire de la Gironde, nous montre que le débat sur les origines des différents lieux cités plus haut est loin d’être clos, et nous propose une alternative poétique :
Tout est de la faute de Ptolémée. Ce savant d'Alexandrie, qui a participé durant toute sa vie, de 90 à 168 après JC, à la compilation et l'étude de toutes les connaissances accumulées par les grecs pendant 7 siècles, et a participé à l'extraordinaire renommée d'Alexandrie et de sa bibliothèque. […] Dans son travail de compilation des connaissances de l'époque, il mentionne dans sa "géographie" la ville de Noviomagus comme étant l'une des vingt villes de l'Aquitaine Romaine ; malheureusement les coordonnées qu'il donne laissent beaucoup de libertés aux interprétations.
Des Noviomagus (en latin nouveau marché !) on va en repérer plein, cités par Jules César ou autres, sous ce nom ou approchant : de Nimègue aux Pays Bas, à Lisieux en Normandie, à Noyon entre Reims et Amiens….
Plus sérieusement, trois sites de Noviomagus se disputent les faveurs des spécialistes :
- Coté Charente, à coté de Talmont, le site du Fâ : mais il y aurait là, semble-t-il, plutôt une Novioregum, qui aurait été un grand port - entrepôt de Saintes, ville romaine importante.
- Coté Gironde le site de Brion, près de St Germain d'Esteuil,
- et un site possible au nord médoc, vers Soulac, sous les flots au large de l'Amélie ou de La Négade.
De nombreux arguments valables ont été mis en avant pour ou contre l'une ou l'autre hypothèse girondine.
Mais coté rêves, quoi de mieux qu'une cité mythique engloutie au large des côtes !?...
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