Question d'origine :
Bonjour.
Ne trouvant que des réponses floues sur ce sujet, je me permets de vous solliciter.
Le prix de La Nouvelle France fut, notamment, attribué à Gilbert Dupé en 1944 pour son roman Le Bateau à soupe. Ce prix était-il directement lié à la revue, considérée comme d'extrême droite, La Nouvelle France, créée en 1930, mais dont j'ignore la durée d'existence ? De quelle année à quelle année fut attribué ce prix, et à qui ?
Merci de vos lumières.
Réponse du Guichet
gds_db
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 13/07/2020 à 15h57
Bonjour,
Tout d'abord un petit point sur la revue d'extrême droite, La Nouvelle France qui semble sans lien avec le prix littéraire :
Le catalogue de la BNF indique que le premier numéro de la revue La Nouvelle France est paru le 25 janvier 1930. Elle ne dispose que des numéros 1, 2 et 4.
Elle a ensuite été remplacée par La libre parole à partir d'octobre 1930 et jusqu'en 1932.
Elle devient ensuite La Libre parole populaire de 1933 à novembre 1934, puis Libres paroles : journal de propagande nationaliste jusqu'en 1935 et enfin La Libre parole jusqu'en avril 1939.
Le prix littéraire de la "Nouvelle France " a été fondé en 1941 par Jean Luchaire, fondateur du journal collaborationniste "Les Nouveaux Temps".
Voici ce qu'explique Cédric MELETTA dans Jean Luchaire : L'enfant perdu des années sombres :
Nouvelliste et mémorialiste peu convaincant alors qu’il avait 20 ans, fils d’une mère qui traduit Huxley et Dickens, fils d’un père devenu dramaturge à succès sur le tard, neveu de deux créateurs originaux, Marie Lenéru et Armory,Luchaire pourra toujours se consoler et penser marquer la place en innovant dans une sphère qui n’est pourtant pas la sienne, celle des prix littéraires .
Plutôt que de stimuler la création elle-même, mieux vaut œuvrer à son couronnement. A la force d’un récit, on préférera les vivats, les lauriers et l’éclat du palmarès. C’est là toute l’origine duPrix de la Nouvelle France , une appellation bien dans l’air du temps. Sous couvert de nouveauté, on fait comme souvent du neuf avec de l’ancien. Mis sur pied au printemps 1941 à l’occasion d’un déjeuner au restaurant L’Armorique, ce prix de 50 000 francs « remis à l’auteur d’une œuvre nouvelle et prometteuse » est une affaire de propagande servie par la lubie d’un ubiquitaire . Les responsables du Schriftum-Gruppe (Groupe littéraire) de l’hôtel Majestic, Gerhard Heller et Walter Schulz, encourageant une initiative plus coûteuse qu’efficiente puisqu’au montant vertigineux de la récompense viennent s’ajouter les réceptions fastueuses qui accompagnent la remise du prix dans les salons de La Tour d’Argent et les larges émoluments de jurés triés sur le volet .
Pour doter son prix d’un jury prestigieux, Luchaire s’en remet à l’expérience des deux éminences du comité d’organisation, l’omniprésent Marcel Espiau, secrétaire général du prix, et son assesseur, Thierry Sandre, lauréat du Goncourt 1924.Durant les trois années d’existence de ce raout ambitieux , Pierre Benoît, Abel Hermant, Henri Troyat, Léon-Paul Fargue, Maurice Donnay, le poète Paul Fort, André Salmon, Pierre Mac Orlan, l’éditeur Bernard Grasset et son secrétaire particulier Robert de Châteaubriant ont successivement participé aux « travaux » de ce collège confidentiel. Sacha Guitry y a voté une seule et unique fois et, selon ses dires, n’y a jamais trouvé la consistance nécessaire au déplacement de sa personne. Vieille connaissance de Luchaire depuis le début des années 1920, Georges Simenon s’y est montré par éclipses, lors de rares séjours parisiens afin de profiter des largesses du patron en tickets divers et autres ausweis nécessaires aux allées et venues de l’écrivain retiré dans le bocage vendéen.
Tout cela vire à la pantomime, on se déplace « chez Luchaire » sans avoir lu les livres, on regarde la pendule, on sent les bonnes odeurs d’un repas fin sur le point d’être servi. Il faut faire vite. Alorson vote pour un des livres du tas en prenant soin d’indiquer dans le communiqué de presse qu’après deux heures d’âpres délibérations, c’est encore le meilleur qu’on a choisi. Le seul lauréat notoire est Gilbert Dupé, en juillet 1944, pour Le bateau à soupe . Dupé est un auteur estimé de l’écurie Denoël. Avant d’être nommé directeur du Théâtre des Nouveautés peu avant la fin de la guerre, il avait rencontré Luchaire dans le cadre de la programmation du Théâtre de l’Avenue dont le patron des Nouveaux temps s’était rendu propriétaire, au prix d’obscures négociations initiées par le faux baron de Wiet. "
Jean Luchaire est mort fusillé le 22 février 1946 au fort de Châtillon.
Lire aussi ces quelques extraits qui parlent du prix de la Nouvelle France :
- Ces Français qui ont collaboré avec le IIIe Reich / Jean-Paul Lefebvre-Filleau, Gilles Perrault
- Archives secrètes de la Mondaine / Jacques Arnal
Bonne journée.
Tout d'abord un petit point sur la revue d'extrême droite, La Nouvelle France qui semble sans lien avec le prix littéraire :
Le catalogue de la BNF indique que le premier numéro de la revue La Nouvelle France est paru le 25 janvier 1930. Elle ne dispose que des numéros 1, 2 et 4.
Elle a ensuite été remplacée par La libre parole à partir d'octobre 1930 et jusqu'en 1932.
Elle devient ensuite La Libre parole populaire de 1933 à novembre 1934, puis Libres paroles : journal de propagande nationaliste jusqu'en 1935 et enfin La Libre parole jusqu'en avril 1939.
Le prix littéraire de la "
Voici ce qu'explique Cédric MELETTA dans Jean Luchaire : L'enfant perdu des années sombres :
Nouvelliste et mémorialiste peu convaincant alors qu’il avait 20 ans, fils d’une mère qui traduit Huxley et Dickens, fils d’un père devenu dramaturge à succès sur le tard, neveu de deux créateurs originaux, Marie Lenéru et Armory,
Plutôt que de stimuler la création elle-même, mieux vaut œuvrer à son couronnement. A la force d’un récit, on préférera les vivats, les lauriers et l’éclat du palmarès. C’est là toute l’origine du
Pour doter son prix d’un jury prestigieux, Luchaire s’en remet à l’expérience des deux éminences du comité d’organisation, l’omniprésent Marcel Espiau, secrétaire général du prix, et son assesseur, Thierry Sandre, lauréat du Goncourt 1924.
Tout cela vire à la pantomime, on se déplace « chez Luchaire » sans avoir lu les livres, on regarde la pendule, on sent les bonnes odeurs d’un repas fin sur le point d’être servi. Il faut faire vite. Alors
Jean Luchaire est mort fusillé le 22 février 1946 au fort de Châtillon.
Lire aussi ces quelques extraits qui parlent du prix de la Nouvelle France :
- Ces Français qui ont collaboré avec le IIIe Reich / Jean-Paul Lefebvre-Filleau, Gilles Perrault
- Archives secrètes de la Mondaine / Jacques Arnal
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