Origine de la présentation typique d'un devoir scolaire
CIVILISATION
+ DE 2 ANS
Le 24/11/2020 à 00h10
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Question d'origine :
Bonsoir, Je me demandais d'où vient la présentation typique d'un devoir scolaire. J'entends par là le nom et prénom de l'élève, éventuellement sa classe, en haut à gauche, à droite la date du devoir, au centre l'intitulé du devoir et enfin un espace entre deux lignes rouges destiné à recevoir le commentaire du prefesseur. Il semble que cette manière de présenter est commune à tous les élèves de France, mais d'où vient elle ? Qui a décidé de présenter de cette manière pour la première fois et à quelle époque ? Merci d'avance.
Réponse du Guichet
gds_et
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 25/11/2020 à 12h38
Bonjour,
Malheureusement les recherches que nous avons menées ne nous permettent pas de répondre précisément à votre question. Les ressources que nous avons pu consulter sur l’histoire et l’évolution des devoirs scolaires s’intéressent moins à leur présentation qu’à leur contenu et ce qu’ils reflètent des pratiques pédagogiques de leur époque.
Nous n’avons pas réussi à trouver un exemple numérisé d’une copie scolaire datant du XIXe siècle. Nous savons néanmoins que le Musée national de l'Éducation en conserve au sein de ses collections.
Nous pouvons seulement supposer que la présentation actuelle des copies s’est formalisée avec les réformes scolaires situées entre la fin du XIXe et le début du XXe :
« Les devoirs: une construction socio-historique
Des recherches à caractère historique mettent en évidence le fait que les devoirs, dans leur forme actuelle, sont le résultat d'un processus plutôt récent de transformations pédagogiques et structurelles. Si la question des devoirs à la maison n'est pas une question nouvelle et est «consubstantielle à l'organisation de l'école républicaine en France»(Poucet,2008, p.11), le fait de renvoyer la réalisation d'apprentissages en dehors de la classe n'a pas toujours été une évidence (Kherroubi, 2009). À la naissance de l'école primaire républicaine, l'organisation pédagogique fait que l'enseignant est «celui qui fait faire et refaire les exercices pendant le temps même de la classe» (Chartier, 2009, p.19): il est le seul garant de la réalisation du travail scolaire et de son évaluation (Kherroubi, 2009). Le travail que les élèves ont à réaliser le soir à l'étude ou à domicile est une application de ce qui a été fait en classe et est systématiquement corrigé et vérifié par l'enseignant (Poucet, 2008). Selon les préconisations du Dictionnaire de Ferdinand Buisson, les devoirs désignent «tout travail écrit que l'élève doit exécuter comme suite et comme application d'une leçon exposée ou dirigée par le maître» (Dangueuger, 1911). Ils sont exécutés pour la majeure partie en classe bien que soit évoquée la possibilité de donner des devoirs à la maison mais «réduits le plus possible»(Ibid.). Concernant plus spécifiquement l'enseignement secondaire, les devoirs interrogent fortement l'évolution des relations qu'entretiennent travail en classe et hors de la classe. Au XIXe siècle les élèves passent une partie considérable de la journée dans des études encadrées par des surveillants-répétiteurs. La classe est alors un espace de prescription, explication et correction des devoirs effectués en étude. Selon Chevallard (2002),«autour de 1880 s’opère un basculement pédagogique qui, au primat du temps passé en étude, va substituer le primat du cours magistral» (p.2). Au fur et à mesure, le temps de classe prend de plus en plus de place et devient prédominant et c'est dans le contexte de la réforme de 1902 que les études surveillées tendent à disparaître. Progressivement au cours du XXe siècle , la diminution du nombre d'internats, les plans de modernisation des contenus et des méthodes d'enseignement et la massification de l'enseignement modifient profondément l'alternance entre temps de travail en classe et hors de la classe, renvoyant à la classe l'intégralité des temps d'apprentissage que les élèves sont censés réaliser (Savoie, 2003). Cependant, une partie du travail personnel demandé aux élèves demeure et est renvoyée à leur responsabilité, à celle de leurs familles et plus récemment à des dispositifs d'aide, de soutien et d'accompagnement. »
Source : La pratique des devoirs en classe et en-dehors de la classe : de l’analyse de l’activité à la conception d’environnements de formation, Rémi Bonasio
Il est en tout cas certain que l’adoption d’une présentation « uniforme » des copies est postérieure à l’Ancien Régime, où les copies d’élèves délaissaient volontiers les mentions telles que la date, la classe ou le sujet au profit de fantaisies décoratives, surtout chez les plus jeunes. Vous trouverez plus de détails à ce sujet dans cet extrait disponible en ligne : Performances scolaires de collégiens sous l'Ancien Régime: étude de six séries d'exercices latins rédigés au collège Louis-le-grand vers 1720, Marie-Madeleine Compère, Dolorès Pralon-Julia
D’autres ressources nous en apprennent plus sur le contexte pédagogique du XIXe siècle :
« Classes, études et dortoirs : étudier et vivre au lycée au XIXe siècle
Le modèle pédagogique de l’enseignement secondaire, au XIXe siècle, repose sur l’association de la classe et de l’étude. Hérité des collèges d’Ancien Régime, ce modèle a conduit au recrutement de maîtres d’études, les professeurs étant seulement astreints à faire leurs classes. Lycéens et collégiens ont environ quarante heures d’études pour vingt heures de classe. Il convient d’insister sur ce point : le modèle pédagogique accorde à cette époque une place prépondérante au travail personnel des élèves. Pendant les heures d’études, le collégien ou le lycée rédige ses devoirs, versions, discours, narration, etc., sur son cahier avant de recopier chacun sur une feuille de petit format. Après les avoir éventuellement montrées pour avis au maître d’études, il donnera ces « copies » - c’est là l’origine du terme – à ses professeurs. »
Source : Histoire de l'enseignement en France - XIXe-XXIe siècle: XIXe-XXIe siècle, De Jean-Noël Luc, Jean-François Condette, Yves Verneuil
« Toute étude sur l’histoire des travaux d’élève doit les replacer aussi exactement que possible dans les pratiques pédagogiques de leur époque. Ainsi, tout devoir remis au professeur est une « copie », c'est-à-dire la reproduction exacte sur une feuille d’un texte écrit sur le cahier ; et le maître est en principe tenu de veiller à l’identité des deux textes, ce qu’il ne fait d’ailleurs qu’exceptionnellement. La correction elle-même ne s’applique qu’aux devoirs qui en valent la peine. Il est couramment admis que seules les bonnes copies méritent qu’on s’y intéresse ; et il faudra une transformation des mentalités à la fin du siècle pour obliger les professeurs à lire et annoter toutes les copies. Le corrigé du devoir est pris en note par l’élève, et reproduit ensuite sur un autre cahier que le professeur doit également contrôler : on retrouve ici une pratique analogue à celle de la rédaction. L’activité de « mise au net » et de copie tient donc une place très importante dans le travail scolaire. »
Source : Histoire de l'éducation. n° 54, 1992. Travaux d'élèves. Pour une histoire des performances scolaires et de leur évaluation, XIXe-XXe siècles, sous la direction de Pierre Caspard.
(vous pouvez consulter l’intégralité de ce numéro dans Persée)
Précisons qu’en raison du confinement, nous sommes actuellement en télétravail. Il ne nous est donc pas possible pour l’instant de consulter les documents de la BmL. Dès que nous en aurons la possibilité, nous consulterons notamment l’ouvrage d’André Chervel La culture scolaire [Livre] : une approche historique qui nous permettra peut-être de compléter notre réponse.
Bonne journée.
Malheureusement les recherches que nous avons menées ne nous permettent pas de répondre précisément à votre question. Les ressources que nous avons pu consulter sur l’histoire et l’évolution des devoirs scolaires s’intéressent moins à leur présentation qu’à leur contenu et ce qu’ils reflètent des pratiques pédagogiques de leur époque.
Nous n’avons pas réussi à trouver un exemple numérisé d’une copie scolaire datant du XIXe siècle. Nous savons néanmoins que le Musée national de l'Éducation en conserve au sein de ses collections.
Nous pouvons seulement supposer que la présentation actuelle des copies s’est formalisée avec les réformes scolaires situées entre la fin du XIXe et le début du XXe :
« Les devoirs: une construction socio-historique
Des recherches à caractère historique mettent en évidence le fait que les devoirs, dans leur forme actuelle, sont le résultat d'un processus plutôt récent de transformations pédagogiques et structurelles. Si la question des devoirs à la maison n'est pas une question nouvelle et est «consubstantielle à l'organisation de l'école républicaine en France»(Poucet,2008, p.11), le fait de renvoyer la réalisation d'apprentissages en dehors de la classe n'a pas toujours été une évidence (Kherroubi, 2009). À la naissance de l'école primaire républicaine, l'organisation pédagogique fait que l'enseignant est «celui qui fait faire et refaire les exercices pendant le temps même de la classe» (Chartier, 2009, p.19): il est le seul garant de la réalisation du travail scolaire et de son évaluation (Kherroubi, 2009). Le travail que les élèves ont à réaliser le soir à l'étude ou à domicile est une application de ce qui a été fait en classe et est systématiquement corrigé et vérifié par l'enseignant (Poucet, 2008). Selon les préconisations du Dictionnaire de Ferdinand Buisson, les devoirs désignent «tout travail écrit que l'élève doit exécuter comme suite et comme application d'une leçon exposée ou dirigée par le maître» (Dangueuger, 1911). Ils sont exécutés pour la majeure partie en classe bien que soit évoquée la possibilité de donner des devoirs à la maison mais «réduits le plus possible»(Ibid.). Concernant plus spécifiquement l'enseignement secondaire, les devoirs interrogent fortement l'évolution des relations qu'entretiennent travail en classe et hors de la classe. Au XIXe siècle les élèves passent une partie considérable de la journée dans des études encadrées par des surveillants-répétiteurs. La classe est alors un espace de prescription, explication et correction des devoirs effectués en étude. Selon Chevallard (2002),
Source : La pratique des devoirs en classe et en-dehors de la classe : de l’analyse de l’activité à la conception d’environnements de formation, Rémi Bonasio
Il est en tout cas certain que l’adoption d’une présentation « uniforme » des copies est postérieure à l’Ancien Régime, où les copies d’élèves délaissaient volontiers les mentions telles que la date, la classe ou le sujet au profit de fantaisies décoratives, surtout chez les plus jeunes. Vous trouverez plus de détails à ce sujet dans cet extrait disponible en ligne : Performances scolaires de collégiens sous l'Ancien Régime: étude de six séries d'exercices latins rédigés au collège Louis-le-grand vers 1720, Marie-Madeleine Compère, Dolorès Pralon-Julia
D’autres ressources nous en apprennent plus sur le contexte pédagogique du XIXe siècle :
« Classes, études et dortoirs : étudier et vivre au lycée au XIXe siècle
Le modèle pédagogique de l’enseignement secondaire, au XIXe siècle, repose sur l’association de la classe et de l’étude. Hérité des collèges d’Ancien Régime, ce modèle a conduit au recrutement de maîtres d’études, les professeurs étant seulement astreints à faire leurs classes. Lycéens et collégiens ont environ quarante heures d’études pour vingt heures de classe. Il convient d’insister sur ce point : le modèle pédagogique accorde à cette époque une place prépondérante au travail personnel des élèves. Pendant les heures d’études, le collégien ou le lycée rédige ses devoirs, versions, discours, narration, etc., sur son cahier avant de recopier chacun sur une feuille de petit format. Après les avoir éventuellement montrées pour avis au maître d’études, il donnera ces « copies » - c’est là l’origine du terme – à ses professeurs. »
Source : Histoire de l'enseignement en France - XIXe-XXIe siècle: XIXe-XXIe siècle, De Jean-Noël Luc, Jean-François Condette, Yves Verneuil
« Toute étude sur l’histoire des travaux d’élève doit les replacer aussi exactement que possible dans les pratiques pédagogiques de leur époque. Ainsi, tout devoir remis au professeur est une « copie », c'est-à-dire la reproduction exacte sur une feuille d’un texte écrit sur le cahier ; et le maître est en principe tenu de veiller à l’identité des deux textes, ce qu’il ne fait d’ailleurs qu’exceptionnellement. La correction elle-même ne s’applique qu’aux devoirs qui en valent la peine. Il est couramment admis que seules les bonnes copies méritent qu’on s’y intéresse ; et il faudra une transformation des mentalités à la fin du siècle pour obliger les professeurs à lire et annoter toutes les copies. Le corrigé du devoir est pris en note par l’élève, et reproduit ensuite sur un autre cahier que le professeur doit également contrôler : on retrouve ici une pratique analogue à celle de la rédaction. L’activité de « mise au net » et de copie tient donc une place très importante dans le travail scolaire. »
Source : Histoire de l'éducation. n° 54, 1992. Travaux d'élèves. Pour une histoire des performances scolaires et de leur évaluation, XIXe-XXe siècles, sous la direction de Pierre Caspard.
(vous pouvez consulter l’intégralité de ce numéro dans Persée)
Précisons qu’en raison du confinement, nous sommes actuellement en télétravail. Il ne nous est donc pas possible pour l’instant de consulter les documents de la BmL. Dès que nous en aurons la possibilité, nous consulterons notamment l’ouvrage d’André Chervel La culture scolaire [Livre] : une approche historique qui nous permettra peut-être de compléter notre réponse.
Bonne journée.
Réponse du Guichet
gds_et
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 26/11/2020 à 15h04
Bonjour,
De retour momentanément à la bibliothèque, nous avons poursuivi nos recherches dans plusieurs ouvrages sur l'histoire de l'enseignement en France, mais n'y avons pas trouvé d'éléments nouveaux.
Bonne journée.
De retour momentanément à la bibliothèque, nous avons poursuivi nos recherches dans plusieurs ouvrages sur l'histoire de l'enseignement en France, mais n'y avons pas trouvé d'éléments nouveaux.
Bonne journée.
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