Verbes d'action ou verbes d'état / Statifs ou dynamiques
Question d'origine :
Bonjour, Je me demande si des linguistes ont traité précisément de la question de l'opposition entre "verbes d'action" et "verbes d'état" dans les langues indo-européennes, voire de manière générale. Je me posais cette question en comparant cette notion qui varie sensiblement selon les langues : en français, un verbe d'état est plus ou moins un verbe attributif qui fait le trait d'union entre le sujet et son attribut ("Je suis Claude", "je demeure pantois", "je deviens idiot"), tandis qu'en anglais ou en allemand, on parle de cette opposition mais aussi de celle entre les verbes "dynamiques" et les verbes "statifs" (I sit = sitzen = je suis assis, I sit down = setzen = je m'asseois; ou encore "lie/liegen = être allongé" opposé à "lie down / legen = coucher/(se) poser), ou verbes "statives" en anglais. Je me pose d'autant plus cette question qu'un certain nombre de verbes en latin montrent la même opposition que l'anglais ou l'allemand (cf jacio = jeter, mettre / jaceô = être posé, allongé). Est-ce que l'opposition entre verbes d'état et d'action et celle entre verbes dynamiques et statifs ("statives") sont comparables, et dépendent juste des réalités de ce qu'elles décrivent chez chaque langue ? Existe t-il de la documentation précises sur ces distinctions, en linguistique générale ou en linguistique appliqué sur les langues que j'ai citées ? Il s'agit d'un problème épineux et la définition des verbes d'état me semble assez ardue. Je vous remercie d'avance pour la lecture de ce message et le travail que vous faites.
Réponse du Guichet
Bonjour,
Comme vous en faites vous-même la remarque, voilà une question pour le moins épineuse.
Relevant d’une sous-discipline de la linguistique enseignée à l’université et appelée grammaire comparée ou philologie comparative, force nous a été de constater que nous n’avons pas vraiment d’ouvrages traitant de ce sujet dans nos fonds, à l’exception du recueil Grammaire et psychologie actuellement transféré aux archives départementales le temps des travaux de rénovation de nos réserves) qui semblerait aborder ce problème dans l’un de ses articles.
Qu’à cela ne tienne, nous sommes allés fouiller les catalogues et bases de données universitaires pour vous apporter des réponses.
Nous avons ainsi vu que trois grands théoriciens ont travaillé sur ce thème mais dont les œuvres n’ont pas encore été traduites en français :
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Sur le SUDOC (catalogue des bibliothèques universitaires françaises) vous trouverez également plusieurs références pertinentes au regard de votre recherche :
- La thèse de Jacques François : Changement, causation, action : trois catégories fondamentales de la description sémantique du lexique verbal (avec une attention particulière accordée à la mise en contraste du français et de l’allemand)
- Verbes d'action, verbes d'état de Claude Rivière sur les verbes anglais
- Essais sur la grammaire comparée du français et de l’anglais d’Anne Zribi-Hertz et Philip Miller
- ou encore Grammaire du verbe français de Danielle Leeman-Bouix.
Enfin, nous ne saurions que trop vous recommander la lecture de ces deux articles universitaires disponibles gratuitement en ligne :
- Approche cognitive et typologique de l’opposition verbes d’état versus verbes d’action de Loïc-Michel Perrin (CNRS), article publié en 2008 dans le n°XXX de la revue de linguistique Verbum dans lequel le linguiste s’intéresse particulièrement dans cet article à la notion d’agentivité qui se cache derrière le caractère dynamique du verbe d’action, avant de se pencher sur la façon dont les verbes d’action et d’état sont différemment répertoriés d’une langue à une autre (français, anglais, allemand, sénégalais, bambara, polonais, etc).
- Les adjectifs français et l'opposition aspectuelle statif vs dynamique de Pauline Haas et Fayssal Tayalati publié dans le n°56 des Travaux de linguistique. Dans cet article, les deux linguistes qui s’interrogent sur la distinction statif/dynamique de l’adjectif, font un très intéressant passage en revue de cette même question pour le verbe en apportant d’intéressant détails issus de l’étude de la classification quadripartite de Vendler (1967). Elles abordent ainsi dans cet article la notion d’agentivité comme preuve de la dynamicité, et le passage du dynamique au statif dans la langue française.
Bonne lecture et bonne continuation dans vos recherches.