Avez-vous des documents iconographiques sur les cortèges autour du buste de Marianne ?
Question d'origine :
Je m'intéresse à l'histoire du buste de Marianne du Musée Gadagne (classé M.H) porté en triomphe par les Voraces, jeté dans un fleuve, repêché et repeinte selon des traditions orales populaires. 2 ouvrages (Perséé : "Journal d'un bourgeois de Lyon en 1848" (page 464), et OpenEdition Books "les chemins de la manifestation 1848-1914 (PULyon - chap.3) attestent seulement les défilés en s'appuyant sur des lithos ou gravures en votre possession : "bibliothéque de la ville réf. 114.634 ".(mais un bon siècle est passé depuis !). Cette litho. s'appelle "Souvenir du fort St-Laurent : 15 mars 1848". Avez-vous ces documents iconographiques et d'autres aussi (et lesquels ?) , sur ces cortèges autour d'un buste de la République devenu aujourd'hui buste de Marianne ? Avec tous mes remerciements ..
Réponse du Guichet
La bibliothèque municipale de Lyon est bien en possession dans son fonds Coste d’une lithographie intitulée "Les Voraces lyonnais, chanson républicaine, dédiée à tous les Voraces de l'univers, par un autre. Souvenir démocratique. Vue du fort St-Laurent, le 15 mars 1848" / Randon, Gilbert, 1814-1884. Cette chanson "Les Voraces lyonnais" est numérisée et accessible dans la bibliothèque numérique Numelyo.
Nous avons également d’autres documents iconographiques et textuels attestant des défilés menés par le groupe des Voraces de la Croix-Rousse en 1848, ayant porté le buste de la Liberté aujourd’hui visible au musée Gadagne, dans l’espace consacré à la période révolutionnaire. Il s’agit d’un buste en bois peint ; toutefois nous n’avons pas de sources nous indiquant qu’il fut jeté dans un fleuve, repêché et repeint.
Nous avons consulté plusieurs ouvrages confirmant le défilé du 15 mars 1848 ayant porté en triomphe l’un des symboles de la République, le buste de La liberté, au même titre que le drapeau tricolore, symbole et enjeu des luttes.
Voici des extraits de ces ouvrages qui nous décrivent les faits concernant ces révoltes ouvrières et révolutionnaires lyonnaises de 1848 menées par les Voraces :
- Histoire politique de Lyon pendant la Révolution de 1848 : 25 février-15 juillet / par François Dutacq,...
"p. 170 : le cortège du 15 mars 1848 : Les Voraces, «les citoyens armés de la Croix-Rousse» étaient des ouvriers en soie, fort honnêtes gens mais d’un républicanisme exalté. Le 25 fevr 1848 ils s’étaient emparés de quelques points de l’enceinte intérieure de Lyon pour obtenir au plus tôt la démolition de cette enceinte et se tenir en garde contre la tentative de réaction. Quand le comité central rétablit la garde nationale, les plus exaltés d’entre eux exigèrent que la bourgeoisie ne fut pas armée, au du moins ne le fut qu’après les ouvriers. Cette prétention n’ayant pas été admise, ils continuèrent à faire bande à part et placèrent des corps de garde indépendants spécialement à la barrière de la Croix-Rousse aux Bernadines, au grand séminaire. Ils ne leur suffisaient pas d’en occuper les lieux, ils réclamaient leur complète disparition. Des chansonniers répandaient leurs couplets vengeurs contre ces bastilles, souvenir vivant des défiances de Louis Philippe à l’égard des prolétaires lyonnais. […] Le 15 mars,à la suite de laborieuses négociations, les citoyens armés sortirent des Bernardines et de Saint-Laurent au bruit des décharges de mousqueterie. Ils descendirent à Lyon, musique en tête, drapeaux déployés, précédés de la municipalité et accompagnés d’un détachement de la garde national de la Croix-Rousse. Quelques-uns d’entre eux portaient sur un brancard un buste en plâtre de la Liberté qu’ils déposèrent au musée après avoir été rendre visite au Commissaire extraordinaire et au maire provisoire."
D’autres cortèges ont également eu lieu au mois d’avril 1848:
"p. 266 : au milieu des troubles et des inquiétudes, le peuple lyonnais ne négligeait pas les occasions de se réjouir. On vit renaitre les fêtes de la première Révolution, plantations d’arbres de la liberté, solennités commémoratives dont le but était d’honorer les victimes de la monarchie tombées dans les émeutes républicaines. C’est ainsi qu’eurent lieu plusieurs fêtes commémoratives de l’insurrection de 1834 soutenue par le Comité central. Le défilé du 16 avril 1848 mené par les Voraces et un peloton de gares nationauxau rythme des tambours et de la musique, transport fut fait d’une statue du peuple souverain qui allait être déposée place de la liberté (actuelle place Carnot) ; la statue portée par 4 hommes fut suivie d’autres citoyensqui avaient placé sur un brancard un buste de la Liberté. Des milliers de spectateurs se pressaient sur la place."
- L'identité politique de Lyon : entre violences collectives et mémoire des élites, 1786-1905 / Bruno Benoit ; préf. de Maurice Garden
Le Chapitre «Les violences collectives de la Deuxième à la Troisième République» ne fait écho que des défilés du mois d’avril 1848:
"p. 69 : Les Voraces sont les héritiers de cette tradition révolutionnaire lyonnaise dangereuse pour la ville, c’est-à-dire des exagérés de 1793 et de tous leurs épigones. Même s’ils ne sont pas clairement désignés comme tels, les Voraces sont bien les descendants des «Chalier». Le 9 avril 1848, les clubs et les Voraces imposent à la municipalité provisoire un défilé, avec plantation d’arbre de la liberté et catafalque (tombeau vide) place des Cordeliers, pour rendre hommage aux martyrs républicains du 9 avril 1834. Ce défilé part de l’Hôtel de ville pour rejoindre par les quais du Rhône la place des Cordeliers où a lieu la cérémonie, pour s’en retourner par les quais de Saône, à l’Hôtel de ville. Discours et symboles rappellent les fêtes civiques révolutionnaires. Le dimanche suivant, le 16 avril, l’espace lyonnais est investi par une procession organisée par les clubs. Un statue du peuple souverain est promenée dans Lyon et est installée place Perrache. Elle représente un homme du peuple, debout sur une barricade tenant un fusil et foulant à ses pieds les débris d’une couronne et d’une épée avec cette inscription: Qui osera la relever ?»
- Dans le Le Progrès Illustré du 7 mars 1897, nous trouvons une autre illustration du défilé des Voraces du 15 mars 1848 que l’on voit à droite du tableau central intitulé Le Salon, avec le texte suivant: «La descente des Voraces du 15 mars 1848» est le fait historique du mois: voici la curieuse légende accompagnant le document qui nous a servi à établir notre dessin «Promenade des 580 Citoyens de la Croix-Rousse». «Ces braves citoyens ont gardé pendant 21 jours les forts Saint6laurent, Bernardine et Montessuy ainsi que toutes les lignes environnant la ville de la Croix-Rousse, les ont livrés de bonne volonté, après la démolition entière de tous les bastions et meurtrières, à la Garde nationale, le 15 mars 1848, ont promené le buste de la Liberté aux bravos unanimes des populations de la Croix-Rousse et de Lyon et ont reçu les félicitations du brave citoyen Lortet, commandant de la Garde nationale. Le cortège a été salué aux cris de «Vive la République».
Autres sources consultées :
- En 1848, les Voraces avaient faim de liberté / Lyon Capitale, n°166 du 8 au 14 avril 1998, p.15
- Le journal d'un bourgeois de Lyon en 1848 et la question des Voraces par Léon Lévy-Schneider / Revue d'Histoire du XIXe siècle - 1848 Année 1925, pp. 457-477
- Les Voraces / question du Guichet du Savoir, 28/12/2004
- Recherche dans la presse lyonnaise du 19e numérisée sur Numelyo avec les termes "Voraces" et 1848
La base inventaire des oeuvres du Musée Gadagne n'étant pas en ligne, nous n'avons pas pu la consulter ; toutefois nous vous invitons à contacter le centre de documentation du musée, si ce n'est déjà fait !
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