Sous le Concordat les communes pouvaient elles investir dans la restauration des églises ?
Question d'origine :
Bonjour .
Pouvez vous me dire si avec le Concordat de 1801 et 1809 les communes avaient le droit d'engager des dépenses pour faire de gros travaux dans les églises paroissiales?;J'ai trouvé dans des délibérations de Conseils municipaux de 1839 des décisions pour engager de grosses sommes avec aval du Préfet et autorisations d'emprunts ;Est-ce normal avant 1905? Ou bien est-ce parce que le Maire était président de la fabrique?
Pouvez vous aussi me dire dans quels ouvrages ( en ligne) je peux trouver des renseignements sur les dîmes dans un diocèse particulier( Périgueux ).Aux AD 24?
Je vous remercie par avance pour votre réponse qui me sera très précieuse comme chaque fois.
Cordialement aux chercheurs
Claire V.
Réponse du Guichet
Sous le concordat, il était habituel que les municipalités participent à l'entretien des lieux de culte, notamment en accordant des subventions aux fabriques d'Église.
Bonjour,
Au XIXe siècle, les relations entre les religions et l’État en France sont organisées par le traité de concordat conclu en 1801 par le gouvernement de Napoléon Bonaparte et le pape Pie VII. Ce régime entre en vigueur par la loi du 18 germinal an X (8 avril 1802) et sera aboli en 1905. Une précédente question du guichet du savoir revenait sur le sujet de la propriété des églises avant et pendant cette période et pourra vous apporter des informations.
La loi du 18 germinal an X (8 avril 1802) indique dans son article 76: «Il sera établi de fabriques pour veiller à l’entretien et à la conservation des temples, à l’administration des aumônes.»
Le fonctionnement de ces fabriques sera précisé par le décret du 30 décembre 1809:
Les fabriques d'églises instituées par l'article 76 de la loi du 18 germinal an X susvisée sont des établissements publics chargés d'administrer les paroisses dans les conditions prévues par le présent décret et par un règlement intérieur, dit “ règlement épiscopal des fabriques ”, établi par l'évêque et approuvé par arrêté du ou des préfets de département territorialement compétents. (article 1)
Ce décret fixe la composition de ces établissements publics du culte, qui incluent le maire, le curé et 4 à 9 conseillers, et l’ensemble des règles qui permettent leur fonctionnement. Il décrit ainsi les revenus des conseils de fabriques, dans son article 36:
Les revenus de la fabrique comprennent notamment :
- 1° Le produit des biens, dons, legs et fondations ;
- 2° Les quêtes et revenus des troncs pour frais du culte ;
- 3° Les casuels que, suivant les règlements épiscopaux, les fabriques perçoivent ainsi que les sommes qui leur reviennent sur les droits d'inhumation ;
- 4° Les subventions.
Cet article indique bien l’existence de financements publics de ces institutions.
Mathilde Guilbaud, alors Doctorante à l’Université Paris-xiii Villetaneuse, a publié dans la revue Histoire & Sociétés Rurales un article intitulé Les fabriques paroissiales rurales au xixe siècle. L'exemple des campagnes de Seine-et-Marne. Elle y revient en détail sur le fonctionnement de cette institution complexe, qui relève à la fois de l’administration civile et de l’autorité ecclésiastique. Elle revient notamment sur les liens étroits qu’entretiennent jusqu’aux années 1805-1880 la fabrique et l’administration municipale, qui finance largement l’entretien des églises. Ce passage illustre ainsi bien la dépendance financière des fabriques envers les communes:
En Seine-et-Marne, les communes «s’imposent annuellement de lourds sacrifices» pour financer les réparations de l’église paroissiale, car elles sont elles-mêmes pauvres. En 1848, l’évêque de Meaux démontre qu’il n’y a pas plus de ressources du côté des fabriques que de celui des communes. Un bon exemple de collaboration entre fabrique et commune est celui du village de Trilport, où deux campagnes de réfection de l’église mobilisent toutes les énergies. En 1841, afin de financer les travaux de l’église, la commune vote une imposition extraordinaire, et réunit ainsi 464 francs. La fabrique participe aux travaux dans la mesure de ses ressources, qui sont maigres, en donnant 180 francs en 1845. Impressionnés par les efforts conjoints des habitants pour embellir leur église, l’évêque et le préfet recommandent tous deux la commune auprès du ministre pour que l’État lui accorde un secours de 840 francs. Vingt ans plus tard, alors qu’un incendie a dévasté l’église, une seconde campagne de travaux s’avère nécessaire. L’ampleur des frais excède cette fois-ci de beaucoup les possibilités, non seulement de la fabrique, mais aussi de la commune qui est alors obligée de souscrire un emprunt de 7 000 francs alors que le gouvernement lui accorde un secours de 4 000 francs.
Cela semble donc confirmer que la situation que vous décrivez est plutôt habituelle à l’époque.
Concernant votre deuxième question, pour des informations précises concernant un diocèse particulier, nous vous invitons à vous rapprocher des archives départementales de la Dordogne, voire des archives du Diocèse de Périgueux et de Sarlat.
Voici néanmoins quelques ressources plus générales, mais qui peuvent peut-être vous apporter des informations pertinentes:
- La dîme dans l’Europe médiévale et moderne, dir par Roland Viader, rassemble des textes qui font le point sur l’extrême diversité des formes prises par cet impôt au cours de l’époque moderne. Un des chapitres, rédigé par Guy Astoul,revient sur les contestations des dîmes dans le Sud ouest au XVIIIe siècle, et peut peut-être vous intéresser.
- Les revenus des vicaires perpétuels du chapitre de Périgueux au XVIIIe siècle, de Guy Mandon, également disponible en ligne, peut également vous intéresser, et vous donner des indications sur des sources ou des fonds d’archives pertinents.
- Revenus et actions pastorales des prêtres paroissiaux dans le diocèse de Clermont, René Germain, Année 1991 22 pp. 101-119
- Les abbadies ou abbayes laïques : dîme et société dans les pays de l'Adour (XIe-XVIe siècles), Benoît Cursente, Annales du Midi Année 2004 116-247 pp. 285-305
- La dîme ecclésiastique en France au XVIIIe siècle, abbé P. Gagnol, 1910
Nous vous souhaitons bonnes lectures,
Bien cordialement,
Le département civilisations
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