Pourriez-vous me dire la date de la création des États pontificaux ?
Question d'origine :
Bonjour! Madame, Monsieur,
Pourriez-vous me dire la date de la création des États pontificaux et les instigateurs de cette création?
Un grand merci!
R.
Réponse du Guichet

La fondation des états pontificaux remonte à 754 et découle d'une alliance entre le pape Étienne II et le roi franc Pépin le Bref contre Les lombards, dans le cadre de ce qu'on a appelé la "Donation de Pépin", la "Donation de Charlemagne" ou encore le "traité de Quierzy".
Bonjour,
Voici ce que nous apprend le Dictionnaire historique de la papauté / sous la dir. de Philippe Levillain sur la naissance des Etats pontificaux :
C'est au VIIIè siècle que l'on peut assigner la date de première naissance des "Etats du Saint-Siège" [...]. Auparavant [...], l'église de Rome et son évêque ont, comme toutes les églises, un patrimoine, plus exactement des patrimoines : ceux-ci pourtant ne sont qu'une dotation foncière, source de revenus, sans donner lieu à l'exercice de la souveraineté, même si l'on pressent que l'autorité du pape, successeur de Pierre en même temps que rouage de l'Empire, déborde sur le domaine public. Développés non sans ténacité, mais par à-coups et sans aucun plan préconçu, les "Etats" en sont venus, au terme d'une longue période de constitution étirée du VIIIè au XVIè siècle, à former un élément essentiel de la géopolitique italienne, jusqu'à leur liquidation en 1860 [....]"
C'est dans le contexte de relation complexes entre les Eglises d'occident et un Empire byzantin que se placent les premiers balbutiements. En 569, Rome intègre l'Exarchat de Ravenne créé par l'empereur Justin II après que son prédécesseur Justinien a reconquis une partie de l'Italie sur les Ostrogoths. Territoire périphérique d'un empire qui porte pourtant sont nom, Rome s'avèrera peu à peu difficile à gouverner à distance, malgré la délégation par Byzance de gouverneurs délégués, les ducs.
C'est ainsi que peu à peu, le duché se verra absorbé par le patrimoine épiscopale, bien que de manière officieuse : d'ailleurs, comme le disent les auteurs de l'ouvrage cité plus haut, l'administration de nombreuses cités occidentales réside de facto entre les mains de l'évêque - pour Rome, il s'agit à l'époque d'une "zone, souvent définie "d'Acquapendente à Ceprano", [et qui] recouvre grossièrement l'actuel Latium".
Cependant, à l'époque, les Lombards, un peuple germanique, a des vues sur ce territoire. Le roi Astolf soumet le territoire romain à un tribut. Le pape Etienne II se tourne alors vers le roi franc Pépin, dit le Bref. C'est ce que nous raconte le Dictionnaire des papes d'Ivan Gobry :
Celui-ci promit de se rendre au secours du pape, et l'invita à conférer avec lui ; il envoya au-devant de lui l'évêque Chrodegang de Metz et le duc Anscher, qui l'amenèrent de Rome jusqu'à la ville royale de Ponthion sur la Marne (6 janvier 754). Le 14 avril, dans un plaid tenu à Quierzy-sur-Oise, le roi reçut l'approbation de ss guerriers pour une expédition en Italie.
Ici se place un événement qui devait avoir une répercussion dans toute l'histoire de la papauté : la Donation de Pépin qui, renouvelée par le fils du roi, deviendrait la Donation de Charlemagne.
Pépin offre au pape et à ses successeurs "un ensemble de territoires au centre de l'Italie dont la possession les mettrait, dans Rome, à l'abri des attaques et des persécutions [...]. Cadeau fastueux, qui comprenait, outre le Latium, l'Emilie, la Romagne, la Marche, la Toscane et la plus grande partie de la Campanie"... qu'il n'a pas encore conquises !
En échange, le pape sacra Pépin roi des Francs. Ce qui était loin d'être anecdotique, car celui-ci venait de mener une guerre sans merci à la précédente dynastie franque, les mérovingiens. Sa légitimité ne faisait pas consensus dans le monde franc. Le 28 juillet 754, il se fit donc sacrer en compagnie de ses deux fils Charlemagne et Carloman, initiant la nature héréditaire de la dynastie cet événement créait pratiquement : les carolingiens.
Dès 755, Pépin entreprit une campagne dans le nord de l'Italie et balaya les troupes d'Astolf. Après une dernière tentative l'année suivante pour reconquérir Rome, celui-ci mourut et commença une longue et difficile relation entre les papes et les empereurs germaniques.
L'encyclopédie Larousse donne un aperçu de cette histoire :
Craignant que les Lombards ne dominent la papauté, Charlemagne les bat et annexe leur royaume (774). Reprenant le titre de « patrice des Romains » donné à son père par Étienne II, il impose son protectorat à l'État pontifical ; le titre d'« empereur romain », relevé en sa faveur en 800, renforce sa domination. Dès lors, les empereurs prétendent au droit de confirmer l'élection du pape.
[...]
L'Empire carolingien disparaît en 888 ; le Saint Empire romain germanique, fondé par Otton Ier (962), entend bien le continuer, mais le plus souvent les empereurs n'ont pas le loisir d'intervenir à Rome. La féodalisation a désagrégé l'État pontifical, et les nobles romains se disputent la nomination du pape.
Si l'histoire ne fait pas débat dans ses grands traits, nous devons ajouter que les textes des Donations carolingiennes sont sujets à caution : les copies parvenues jusqu'à nous se trouvent dans le Liber Pontificalis, un recueil de chroniques biographiques forgé à Rome par différents papes médiévaux et décrit par le Dictionnaire historique de la papauté comme un "instrument officieux de la propagande pontificale". Si on ajoute à cela les luttes fratricides qui agitèrent les règnes des successeurs de Charlemagne, faisant et défaisant les alliance avec ou contre le pape, et dans ce but validant et invalidant tel ou tel traité passé avec lui, on comprend qu'il existe peu de certitudes sur les débuts des États pontificaux ; ce qui n'empêcha pas ceux-ci de durer onze siècle.
Pour un aperçu abrégé de la suite de l'histoire, nous vous invitons à vous reporter à l'entrée ÉTATS DU PAPE (repères chronologiques) d'Universalis, consultable en ligne avec notre offre numérique.
Pour aller plus loin, voyez également :
États pontificaux - Wikipédia
Une histoire des papes [Livre] : de Pierre à François / John W. O'Malley ; traduit de l'anglais (Etats-unis) par Isabelle Hoorickx-Raucq
Histoire de la papauté [Livre] / Yves Bruley
Pour une approche des relation entre les Francs et la papauté vues du point de vue des Francs, voyez les ouvrages de Bruno Dumézil :
L'Empire mérovingien [Livre] : Ve-VIIIe siècle / Bruno Dumézil
Charlemagne [Livre] / Bruno Dumézil
Bonne journée.
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