Que représentent les statues qui entourent Michel Servet sur son monument ?
Question d'origine :
Bonjour,
Je cherche des renseignements sur le monument dédié à Michel Servet qui se trouve dans le jardin de la ville de Vienne (8 mai 1945) (Isère) :
que représentent les statues qui entourent Michel Servet ?
En vous remerciant.
Très belle journée à toute l'équipe.
Réponse du Guichet

Une statue qui parle d'un martyr du fanatisme religieux.
Le monument dédié à Michel Servet est l’œuvre du sculpteur Joseph Bernard (Vienne, 1866 – Boulogne-Billancourt, 1931 ). Il est situé à l’entrée est du jardin de Ville, ou jardin du 8 mai 1945, à Vienne, 1 place des Allobroges.
Le personnage principal, un aragonais nommé Miguel Serveto y Revés (Villanueva de Sigena, Aragon, 1511 – Genève, 1553 ), dont le nom est francisé en Michel Servet, était médecin, théologien, cartographe et humaniste du début du siècle d’or espagnol, installé comme médecin à Vienne en 1540.
Cet humaniste érudit s'intéresse à toutes les disciplines, de la médecine à la théologie, avec une vision unifiée du savoir. Il découvre la circulation pulmonaire et développe une théologie prônant un retour à la pureté évangélique. En 1531, son ouvrage Des erreurs de la Trinité rejette la divinité du Christ, entraînant une première série d’accusations. Il est naturalisé français en 1548. En 1553, il publie La Restauration du Christianisme, ce qui lui vaut deux condamnations à mort, par les catholiques puis par les protestants. Arrêté à Vienne, il s’évade et est finalement emprisonné à Genève sous l'impulsion de Calvin. Il est brûlé en effigie à Vienne par l'Inquisition catholique le 17 juin 1553. Jugé pour hérésie, il refuse d'abjurer et est brûlé vif le 27 octobre 1553 . Depuis, son nom est associé à la liberté de pensée.
La création du monument
En 1905, un comité est constitué en vue de l’érection du monument. L'année suivante, une souscription publique est lancée. L’Etat, le département de l’Isère et la ville de Vienne contribuent au financement. En 1908, Joseph Bernard commande les blocs de pierre d’Euville. Il emploie trois ouvriers et un modèle. L'importance du travail est cause de retard. Le coût global du monument est de 48 000 F. Le 15 octobre 1911, il est inauguré.
Dans l'article consacré à ce monument de Vienne par wikipedia, on peut lire : "En 1908, le sculpteur Joseph Bernard achève une statue en l'honneur de Michel Servet. Conçue à la demande des libres penseurs, elle doit orner le Mur des réformateurs tout juste édifié à Genève. Mais les autorités helvétiques la refusent à cause de sa contradiction avec un monument honorant Calvin et de son inscription expiatoire trop explicite. La statue est offerte à la ville française de Vienne, où le savant résida après 1540. Camille Jouffray l'inaugure le 15 octobre 1911".
Selon l'article Wikipédia sur le Monument international de la Réformation, le concours pour ce monument a été lancé en 1908 pour célébrer le 400e anniversaire de la naissance de Jean Calvin et le 350e anniversaire de l'Académie de Genève. Ce concours visait à concevoir un monument glorifiant les figures majeures de la Réforme protestante, telles que Calvin, Farel, Bèze et Knox. Les architectes Charles Dubois et Alphonse Laverrière, associés aux sculpteurs Henri Bouchard et Paul Landowski, ont remporté le concours en 1909, et le monument a été inauguré en 1917.
Or, il n'existe aucune preuve claire dans les sources disponibles indiquant que le sculpteur Joseph Bernard ait participé au concours pour le Monument international de la Réformation à Genève en 1908. Il y a peut-être une confusion avec le monument de Michel Servet par Clotilde Roch, installé à Annemasse.
L’édition du Progrès du 11 mars 1907 consacre largement ses colonnes aux Fêtes de Vienne et à la manifestation en l’honneur de Michel Servet, à l’occasion de laquelle le maire de Vienne, M. Brenier, fait un discours suivi d’une conférence du maire de Lyon, Édouard Herriot.
Extrait du discours de M. Brenier :
« Au dessert, M. Brenier, le sympathique maire de Vienne, a pris le premier la parole. Il commence par rendre hommage à M. Jouffray, président du comité de patronage du monument, et à tous ceux qui contribuèrent à la réussite de l’œuvre, dont il rappelle brièvement les débuts. Il remercie tour à tour MM. Albert Monot, le dévoué secrétaire, qui, le premier, eut l’idée d’élever un monument à Michel Servet ; Herpint ; le délégué espagnol Lapuya, énergique propagandiste qui faisait récemment voter cinq cents francs de subvention pour le monument à la ville de Barcelone. [...] Il termine en invitant l’assemblée à l’inauguration du monument, qui se dressera bientôt comme le symbole des luttes du passé pour l’affranchissement de la pensée humaine. »
Extrait du discours d'Édouard Herriot :
« Je me réjouis infiniment de l’honneur que m’a fait la ville de Vienne en m’associant aux efforts qu’elle s’est imposée pour glorifier l’illustre mémoire de Michel Servet, médecin et philosophe, mort en 1553, victime de Calvin. Rien ne pouvait être plus honorable que ces efforts pour la vieille ville de Vienne, dont le rôle dans l’histoire est si considérable. La ville qui a élevé un temple à Auguste et à Livie et qui a été longtemps le siège d’un archevêché fameux veut aujourd’hui honorer la libre pensée sous une de ses formes les plus hautes ; je suis heureux de lui apporter, à cette occasion, le salut cordial et fraternel de sa grande voisine, la ville de Lyon. »
L'édition du Progrès du 16 octobre 1911 relate l'inauguration du monument qui a eu lieu la veille.
Description de la statue
Michel Servet est représenté sur un haut piédestal, les mains liées derrière le dos, les jambes et les orteils crispés par la douleur, symbolisant son supplice. Un livre est accroché à sa poitrine, symbolisant le fait qu’il fut brûlé en même temps que ses écrits.
À ses pieds, à gauche du piédestal, un groupe constitué d'une femme, en surplomb, vêtue d’une grande draperie qui représente la raison protégeant la jeunesse incarnée par un jeune homme et l'avenir par une jeune fille. Les 2 jeunes sont assis, le visage serein, regardant au loin. Ils symbolisent une nouvelle humanité, tournée vers un avenir optimiste, libérée des dogmes et de l’intolérance.
De l’autre côté à droite du piédestal, une statue représente une figure symbolique tournée de dos, accentuant la largeur de son dos pour exprimer le regret ou la honte. La pose, avec un visage douloureux reposant sur un bras replié, s’inspire de l’œuvre de Rodin, La Méditation sans bras. Elle symbolise le remords face à l’intolérance et à l’exécution de Servet.
Voir aussi :
Photographies publiées dans Exposition rétrospective Joseph Bernard (1866-1931) organisée au Musée de l'Orangerie, février-mars 1932. (Musée national de l'Orangerie, Paris). Les illustrations en sont issues (Gauthier, Cl. 1932).
Exposition Joseph Bernard (1866-1931). De pierre et de volupté
La Tribune de Genève. Michel Servet, l’homme qui unit Genève à Annemasse, pour les siècles des siècles…, 24 novembre 2020.
Pièces jointes




