Quels étaient les privilèges accordés aux zouaves pontificaux ?
Question d'origine :
Cher guichet
je voudrais savoir quels étaient les privilèges des zouaves pontificaux et de leurs descendants directs comme l'exonération de l'abstinence des vendredis et autres ?
Cordialement votre
Réponse du Guichet

Les zouaves pontificaux, un régiment au service du Pape.
Bonjour,
Le Dictionnaire du Vatican et du Saint-Siège, ainsi que le Dictionnaire historique de la Papauté, proposent deux articles fort intéressants sur les Zouaves pontificaux. En voici un extrait :
« La création d’un bataillon de Zouaves pontificaux (zuavi pontifici), formé à partir de tirailleurs franco-belges et grossi de nouveaux volontaires, intervient officiellement le 1er janvier 1861 ; le bataillon est aussitôt employé au rétablissement de l’ordre dans ce qu’il demeure, pour dix ans encore, de l’ancien État pontifical (les cinq provinces de Rome et Comarque, Civitavecchia, Frosinone, Velletri et Viterbe) ainsi qu’à la répression du brigandage dans la Cioriara (Latium méridional). Fort à l’origine de huit compagnies, il est élevé au rang de régiment à dater du 1er janvier 1867, comprenant deux bataillons de six compagnies et une compagnie de dépôt. […] Le régiment des zouaves pontificaux est licencié le 21 septembre 1870 à la suite de l’effondrement de l’État pontifical. »
Les zouaves pontificaux formaient donc un corps de volontaires au service du Pape, qui n'appartenait pas à l'armée française. De ce fait, les archives de ces engagements individuels dépendent directement du Vatican.
De nombreux écrits datant du XIXe siècle et du début XXe évoquent les zouaves pontificaux. Mais leur forme est souvent de l’ordre du récit, un récit chronologique retraçant l’histoire courte de ce régiment. Nous n’y avons trouvé aucune mention de la solde et d’avantages induits par cet engagement militaire.
Des études plus récentes s’intéressent aux Zouaves pontificaux, et proposent des travaux thématisés qui évoquent, même de manière fugace, les aspects matériels de leur engagement. L’ouvrage Pour le Pape-Roi, les catholiques français et l’unification italienne (1856-1871) d'Arthur Hérisson, consacre un chapitre aux zouaves pontificaux (Chapitre 8 : Mourir pour Rome ? Les zouaves pontificaux et la légion d’Antibes). Nous vous conseillons la lecture de ce chapitre : on y apprend que l’engagement de ces volontaires était motivé par plusieurs facteurs. Au niveau idéologique, le fait de soutenir le pape, garant de la chrétienté, mais aussi une sensibilité romantique exaltant goût de l’aventure et esprit de sacrifice. Au niveau matériel, la solde pontificale était par ailleurs plus conséquente que celle de l’armée française.
Extrait : « À côté de ces motivations d’ordre idéologique, des raisons matérielles expliquèrent également les engagements. S’il convient de se garder de reprendre tel quel le discours des adversaires de la papauté, il n’est guère douteux que derrière bien des enrôlements au sein de l’armée pontificale se trouvait le désir de s’enrichir ou, tout au moins, d’améliorer son existence. La solde de l’armée pontificale était en effet à cette époque l’une des plus élevées d’Europe. Jusqu’en 1866, les soldats étrangers y furent mieux payés que les indigènes. Ils bénéficiaient par ailleurs de diverses primes, tant au moment de leur enrôlement que lors des garnisons à Rome ou durant les campagnes militaires. Le grand nombre des désertions auxquelles les zouaves pontificaux comme la Légion d’Antibes furent confrontés au cours de leur existence tend à montrer que l’ensemble des nouvelles recrues étaient loin d’être venues à Rome par pur idéalisme. »
La thèse de Laurent Gruaz intitulée Les officiers français des zouaves pontificaux histoire et devenir entre XIXe et XXe siècle, soutenue à Lyon en 2014 et publiée en 2020, pourrait permettre de répondre à votre interrogation. Ce travail dédie notamment un chapitre au devenir des officiers zouaves pontificaux après la dissolution du régiment. Nous n’avons malheureusement pas pu y avoir accès. Nous vous invitons à consulter cet ouvrage, disponible dans plusieurs bibliothèques universitaires.
Les zouaves pontificaux sont à la suite de la chute de Rome en 1870 rapatriés dans leur pays d’origine. Les zouaves français sont autorisés par l’état français à se constituer en corps-franc, type d’unité prévu par la loi Niel de 1867. Ces corps-francs sont armés et soldés par l’État mais s’équipent, se ravitaillent et se logent à leurs frais ; en principe, ils sont chargés d’intervenir sur les arrières de l’ennemi, pour pratiquer une guérilla entravant les communications avec ses bases. La nouvelle unité, dénommée Légion des volontaires de l’Ouest, doit comporter un régiment d’infanterie à trois ou quatre bataillons, un escadron de cavalerie et une batterie d’artillerie. La mise sur pied d’une telle unité va se réaliser en un peu plus d’un mois. Pour aller plus loin dans l’histoire de la Légion des volontaires de l’ouest, nous vous invitons à la lecture de l’article Combattre "pour Dieu et pour la patrie" : le recrutement des volontaires de l’Ouest en 1870-1871, publié dans les Annales de Bretagne et des pays de l’ouest.
La mémoire des Zouaves pontificaux aujourd’hui :
- Le musée militaire des zouaves pontificaux à Oudenbosch aux Pays-Bas, « présente des uniformes, des photographies et des documents personnels des soldats néerlandais ayant servi dans l'unité des Zouaves pontificaux. »
- Pro Petri Sede, association de zouaves pontificaux fondée en Belgique en 1870 (antennes en Hollande et au Luxembourg) et toujours active aujourd’hui : « Pro Petri Sede, Pour le Siège de Pierre est une association de soutien à l’action du successeur de l’apôtre Pierre, l’évêque de Rome, le Pape ».
- La société royale des zouaves pontificaux de Thuin en Belgique « Née en 1901, cette société, forte de près de 150 membres, se compose de différents pelotons. Elle met à la disposition du clergé, les gardes et les porteurs de la statue de saint Roch. Ils ont l’honneur de la porter au sein de la procession. »
Sur ce sujet :
- Conférence filmée d’Arthur Hérisson : Les zouaves pontificaux, KTO, 2022
- Histoire des zouaves Pontificaux, René Bittard des Portes, Paris, 1894
- La Papauté et les Zouaves pontificaux, quelques pages d’Histoire, C-E Rouleau, Québec, 1905
- Les soldats du pape, Oscar de Poli, Paris, 1868
- Les victoires de Pie IX sur les garibaldiens en 1867 et les soldats du pape devant l’Histoire, R. P. Huguet, Paris, 1868
- Le Zouave pontifical, par le R. P. Bresciani, Paris, 1862
- Les Zouaves Pontificaux, G. Cerbelaud-Salagnac, Paris, France-Empire, 1963
N'hésitez pas à revenir vers nous si vos sources peuvent aider à compléter cette réponse... nous vous souhaitons de bonnes lectures !