Les institutions culturelles et religieuses font elles du profit à partir de nos valeurs ?
Question d'origine :
Y-a-t-il des gens qui se font de l'argent grâce aux 'valeurs' des autres? On dirait que les religions se font beaucoup d'argent car les gens croient que les religions sont très importantes...on dirait aussi que Disney et Hollywood se font beaucoup d'argent avec le divertissement et les gens trouvent les valeurs véhiculées par les films très belles et très importantes...quelqun qui prêche 'aimez vous les uns les autres' pourrait devenir riche et célèbre car beaucoup de gens aimeraient son message...il y a toujours des gens qui deviennent riches et célèbres en utilisant les valeurs des autres à leur profit?
Réponse du Guichet

Les organisations religieuses, politiques ou culturelles peuvent transformer des valeurs partagées par leurs fidèles / membres/ communautés en moteurs sociaux et économiques, parfois au risque de dérives, mais toutes ne sont pas motivées par un profit cynique. La distinction entre exploitation sincère et manipulation dépend est parfois fine mais dépend de la transparence, de l’usage réel qui est fait des fonds levés et du rapport entretenu avec le public.
Bonjour,
Oui, les institutions religieuses, les industries du divertissement comme le cinéma, mais aussi le marché du développement personnel et même les partis politiques peuvent être considérés comme des organisations capitalisant sur les valeurs/croyances d'autrui. Mais on ne peut pas toutes et tous les accuser de faire du profit aux dépends des croyants / consommateurs / électeurs.
L’Église catholique possède un patrimoine considérable qui la place parmi les organisations humaines les plus riches de la planète comme nous vous l'évoquions dans votre précédente réponse : L'église catholique est-elle la plus riche au monde ?. Si celle-ci fait souvent office d'exemple, elle cache les nombreuses structures religieuses et spirituelles beaucoup plus modestes réparties sur la planète. Si certaines pratiques peuvent laisse deviner des risques de dérive profitables, toutes les organisations religieuses / politiques / culturelles ne peuvent pas être mises dans le même bateau..
Laïques ou religieuses, les communautés de "fidèles" qui se forment autour d'un chef religieux, un leader politique, un cinéaste, un influenceur etc. ne forment pas nécessairement des ensembles cohérents. Une communauté très étendue est bien souvent composée de personnalités hétéroclites. Il est pourtant acceptable de dire reconnaître que leurs membres partagent souvent certaines "valeurs communes", à savoir des valeurs morales, éthiques, spirituelles, esthétiques ou idéologiques... Il faut adhérer à des causes et une vision commune pour faire communauté et défendre une vision du monde (Il va sans dire que ces valeurs sont plus fortes et mieux partagées lorsqu'il s'agit d'une communauté religieuse, d'un groupe politique, que lorsque que l'on parle d'une masse de spectateurs venue voir film d'animation Disney).
Prenons pour exemples la charité envers les plus démunis pour l’Église, la préservation du vivant et le respect de la biodiversité pour des militants écologistes, la lutte contre les discriminations et l'homophobie pour une association en lutte, les valeurs morales de l'Amérique pour les producteurs des œuvres Disney etc. Ce sont autant d’exemples pour lesquels des valeurs ont été transformées en moteurs (sociaux et économiques) pour mener à bien des actions. Ces valeurs forment des attachements collectifs et deviennent alors des "marchés". Disons que quand une valeur est partagée par un groupe, qu’il s’agisse de spiritualité, d’empathie, de justice, de divertissement, d’altruisme ou de bonheur, ceux qui savent répondre à cette attente ou la mettre en scène sont en mesure de mobiliser publics, ressources, bénéfices etc. On pense notamment aux dérives sectaires...
La frontière entre exploitation sincère et instrumentalisation cynique dépend donc de la transparence, de l’utilisation réelle des fonds recueillis, et du rapport au public (respect, manipulation, etc.).
Pour poursuivre vos réflexions et approfondir ce sujet nous pouvons vous conseiller les lectures qui suivent :
- Religion et marché : du réductionnisme économique à l’intégration du rôle des croyances. Revue Française de Socio-Économie par Zemmour, R et Ballet, J. (2016, sur Cairn).
- Un lapin dans les nuages : psychologie des croyances : religions, conspirationnisme, pseudosciences de Daniel Chabot (2024)
- Croyances sociales : spiritualité, religion, croyances ascientifiques, croyances areligieuses / sous la direction de Nicolas Roussiau (2018)
- Les racines de la religion : tradition, rituel, valeurs / Henri Hatzfeld (1993)
- L'article de la revue Esprit : L'argent et la corruption des valeurs
Bonnes lectures.